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son approche. On en vient aux mains; le combat reste douteux pendant quelque temps; enfin la bravoure et la discipline des Brabançons, l'emporte sur la fougue des Poitevins. Arthur est entièrement défait, ses troupes sont taillées en pièces ou mises en fuite, lui-même est fait prisonnier et envoyé à Falaise, où il fut enfermé dans le château.

Après un exploit militaire, qui semblait ne devoir pas être réservé à une femme octogénaire, Aliénor retourna dans sa retraite de Fontevrault, où elle accorda, l'année suivante, la charte de franche-commune à la ville de Niort (1). Malgré cet acte authentique, rapporté par Thibaudeau dans son Abrégé de l'Histoire du Poitou, cet historien place en 1202 la mort de cette reine. Le même anachronisme a été commis par Baudot de Juilly, dans son Histoire de Philippe-Auguste ; par le père d'Orléans, et par le sieur Duverdier. Aliénor mourut en 1203, selon Smollet, Larrey, et l'Art de vérifier les dates. Mais l'auteur de ce dernier ouvrage, oubliant qu'il avait dit, p. 365, que l'année 1203 fut la dernière de la vie de cette princesse, rapporte à la page 805, qu'elle s'était retirée à Fontevrault, où elle mourut le 31 mars 1204. Cette date est suivie par Dreux du

(1) Voyez les Pièces justificatives.

Radier. Elle est avancée d'un jour par Arcère, qui cite pour son autorité le nécrologe de l'abbaye de Fontevrault, où Alienor fut inhumée, près de son époux Henri, et de son fils Richard. Pour éclaircir ce point de chronologie, il suffit de remarquer qu'au xi° siècle, l'année ne commençait point encore, en France, au 1o janvier, mais à Pâques; que dans l'Aquitaine, le 25 jour de mars ouvrait le nouvel an. La fête de Pâques, en 1204, arriva le 25 avril. En faisant donc, au point controversé, l'application de ces deux calendriers, on dira, d'après celui de France, qu'Aliénor mourut en 1203, et, suivant celui d'Aquitaine, que cette reine mourut en 1204 (1),

er

La mort de la mère de Jean-sans-Terre précéda, de bien peu de jours, l'assassinat que commit cet oncle barbare sur son neveu Arthur. Il l'égorgea de ses propres mains, dans un bateau près de la tour de Rouen, et il le fit jeter ensuite dans la rivière. Son corps fut pêché le lendemain, 4 avril, et enterré secrètement dans le prieuré de Notre-Dame-du-Pré.

Constance, mère d'Arthur, était morte dès la

(1) L'Aquitaine, sous les Romains, était une province distincte de la Gaule. La même distinction subsista sous nos rois. Leblanc, pag. 106.

fin de l'année 1201. Elle n'eut point la douleur de survivre au meurtre de son fils. Les barons et les évêques de Bretagne, indignés de cet attentat, s'assemblent à Vannes, et députent Gui de Thouars, dernier époux de Constance, au roi Philippe-Auguste, pour lui demander justice de l'assassinat d'Arthur. Philippe fait citer le roi Jean, comme son vassal, le 30 avril 1204, à la cour des pairs de France, pour répondre sur le crime dont il est accusé. Jean-sans-Terre ne comparaît point. La cour des pairs prononce contre lui un jugement, qui le déclare coupable de félonie, de parricide, et confisque toutes ses terres mouvantes de la couronne. Philippe se met aussitôt en devoir d'exécuter ce jugement. Dans le cours de deux années, il s'empare de la Normandie, il porte ensuite ses armes victorieuses dans le Maine, l'Anjou, la Touraine, et la plus grande partie du Poitou. Mais il ne peut soumettre Niort, Thouars, ni La Rochelle qui faisait alors partie de cette province. Vainement ce prince avait tenté, dès l'an 1204, de couper la ligne de communication entre ces trois villes, en donnant à la ville de Niort une charte, renfermant des priviléges aussi étendus que ceux dont jouissait la ville de Rouen (1). Niort resta

(1) Voyez les Pièces justificatives.

fidèle à son légitime souverain: il était défendu par Savary de Mauléon, l'un des plus grands capitaines de son siècle (1).

En 1206, Jean-sans-Terre fit une tentative, pour recouvrer les provinces qu'il venait de perdre. Il débarque à La Rochelle, avec une puissante armée. Mais, après s'être rendu maître de plusieurs villes importantes, telles que Montauban, Angers, Dol en Bretagne, il abandonne toutes ses conquêtes, au bruit de la venue de Philippe-Auguste. Il se retire à Thouars, d'où il se rend bientôt, par Niort, à La Rochelle, et repasse en Angleterre. Les députés des deux rois concluent à Thouars une trève de deux ans.

Le roi Jean fit une autre descente sur le continent, en 1214. Il l'avait concertée avec son neveu, l'empereur Otton, qui devait, à la tête de 150,000 hommes, entrer en France par la Flandre, tandis qu'il ferait la guerre en Poitou. Mais le roi d'Angleterre, après une marche victorieuse dans cette province, dans l'Anjou et la Bretagne, hésite à accepter la bataille que vient lui présenter Louis, fils de Philippe. Ses

(1) Magno virtutis magnarumque opum vir; militaris peritiæ, magnæ domi nobilitatis vir memorandus. Sponde, évêque de Pamiers.

alliés l'abandonnent à cause de sa lâcheté. Il s'enfuit à Parthenay, où il se livre au désespoir, n'osant ni fuir, ni paraître en campagne. Il se trouve trop heureux d'obtenir, par l'intervention du pape, une trève de cinq ans. A l'expiration de cette trève, le prince Louis vint mettre le siége devant La Rochelle, qui fut prise et rendue presque aussitôt, en vertu d'un nouveau traité de suspension d'armes pour quatre ans. Cette trève n'était pas expirée, lorsque PhilippeAuguste mourut.

Son fils Louis VIII lui succéda. Henri III, roi d'Angleterre, au lieu d'assister à son sacre, comme il le devait, en qualité de duc de Guienne et de pair de France, se contenta de lui envoyer des ambassadeurs, pour le complimenter sur son avénement au trône, et pour lui demander la restitution des provinces enlevées à l'Angleterre. Louis, pour toute réponse, fit publier la confiscation, que son père avait faite, de tous les fiefs de la couronne possédés par les Anglais. L'année suivante, il se met en marche pour dépouiller de ce qui leur restait sur le continent. Il assemble son armée, à Tours, vers la SaintJean, passe la Loire et vient mettre le siége devant Niort, le 3 juillet. Il y trouva Savary de Mauléon, qui lui opposa une assez longue résistance. Quand enfin ce brave capitaine vit

les

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