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Pour quiconque veut savoir l'histoire, il est indispensable de connaître les hommes qui en fournissent la matière, d'approfondir les motifs de leur conduite, de scruter leurs opinions, d'étudier leurs passions, afin d'en saisir la marche et la politique; en un mot, d'apprendre à se connaître dans les autres.

Mais on n'atteindra point ce but, par la lecture seule des histoires générales. Les détails intéressans y disparaissent, ensevelis sous la multitude des événemens et des révolutions, que présentent la plupart de ces volumineux ouvrages. Leurs auteurs ne

peuvent descendre à ces particularités si instructives pourtant, et si nécessaires pour faire observer le caprice et le jeu des passions. Tous les récits, toutes les anecdotes qui peignent et qui développent si bien le goût, le génie d'un siècle et le cœur humain, on les abandonne aux histoires particulières, qui sont loin d'être une des moins curieuses parties de notre littérature.

L'histoire générale nous offre, il est vrai, beaucoup de traits, qui ont en quelque sorte créé la renommée des grands hommes; mais combien de faits épars, quoique intéressans et instructifs, sont nécessairement exclus de l'histoire d'une nation! Ils ne peuvent trouver place que dans les histoires particulières et dans les biographies. C'est ainsi que l'Histoire de France nous donne l'idée générale des personnages, qui ont illustré chaque règne. On n'y trouve point, et l'on doit chercher ailleurs et leurs caractères distinctifs et leurs actions privées, afin de discerner parfaitement ce qu'ils ont

reçu de la nature, de ce qu'ils doivent à la fortune.

Toutefois il n'est pas aussi facile, qu'on pourrait le supposer, de faire l'histoire d'une ville, d'un petit pays. On achète par beaucoup de veilles la gloire d'y réussir. Les commencemens en sont, pour l'ordinaire, fort obscurs; avec les différens peuples qui se sont succédés dans la possession de son territoire, les noms ont changé, les monumens ont disparu, ou du moins ils ont perdu leur usage et leur célébrité; une puissante capitale est devenue quelquefois un hameau, et une mince bourgade s'est élevée au plus haut degré de splendeur et d'opulence. Il faut, pour ainsi dire, mettre à contribution les provinces et les cités, pour y découvrir les traces de leur ancienne existence, il faut errer parmi des ruines, pour interroger l'antiquité savante ou la barbarie destructive. Encore, le plus souvent, ne peut-on former que des conjectures, d'après un petit nombre d'auteurs et des monumens

difficiles à expliquer. Que dirons-nous de la plupart des légendes? écrites sans art, la vérité s'y trouve presque étouffée sous une infinité de mensonges. Les chartes ellesmêmes ne sont pas toujours d'un puissant secours: altérées par les fautes des copistes, elles sont souvent indéchiffrables; on en peut tirer, tout au plus, quelques faits isolés qui, pour n'être pas sans prix aux yeux

d'un petit nombre de connaisseurs, n'ont aucun attrait pour la plus grande partie des lecteurs qui, dans une série d'événemens, recherchent moins une instruction utile, qu'un agréable délassement.

Déjà diverses publications spéciales ont eu lieu, depuis le milieu du xviie siècle, au sujet de plusieurs villes du Poitou et de l'Aunis, telles que Loudun, Thouars, La Rochelle et Saint-Jean. Niort n'avait point encore eu d'historien. Bien que Thibaudeau ait dû parler de cette ville dans son Histoire du Poitou, publiée en 1782, comme cet auteur n'a pas porté ses investi

peu

gations au-delà de la révocation de l'édit de Nantes, une lacune d'un siècle et demi nous est restée à remplir. Ajoutons que le de détails dans lesquels il est entré, au sujet de Niort, dans son long Abrégé, ne suffisent pas pour faire connaître une ville, dont il passe sous silence l'origine, les monumens, les mœurs, l'industrie et le commerce. Nous avons pensé que nous ferions une chose utile et agréable, pour cette importante cité et les autres villes des Deux-Sèvres, en nous appliquant à recueillir et à classer tous les documens, qui peuvent en relever l'éclat, et qui doivent en perpétuer le souvenir.

L'Histoire de Niort se lie sous beaucoup de rapports avec celle de France. Elle nous semble donc devoir intéresser non seulement les habitans de cette ancienne ville, mais encore la plupart des autres Français. Quelque nombreuses que que fussent les difficultés que ce travail nous a présentées d'abord, rien n'a pu nous détourner de notre dessein,

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