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CHAPITRE X.

Différence de l'obeissance dans les gouvernemens modérés & dans les gouvernemens defpotiques.

DANS

ANS les états defpotiques, la nature du gouvernement demande une obéiffance extrême; & la volonté du prince une fois connue, doit avoir auffi infailliblement fon effet, qu'une boule jetée contre une autre doit avoir le fien.

Il n'y a point de tempérament, de modification, d'accommodement, de termes, d'équivalens, de pourparlers, de remontrances; rien d'égal ou de meilleur à propofer. L'homme eft une créature qui obéit à une créature qui veut.

On n'y peut pas plus représenter fes craintes fur un événement futur, qu'excufer les mauvais fuccès fur le caprice de la fortune. Le partage des hommes, comme des bêtes, y eft l'instinct l'obéiffance, le châtiment.

Il ne fert de rien d'oppofer les fentimens naturels, le refpect pour un père, la tendresse pour fes enfans & fes femmes, les loix de l'honneur, l'état de sa santé; on a reçu l'ordre, & cela fuffit.

En Perfe, lorfque le roi á condamné quel qu'un, on ne peut plus lui en parler, ni demander

grace. S'il étoit ivre ou hors de fens, il fau droit que l'arrêt s'exécutât tout de même ; fans cela il fe contrediroit, & la loi ne peut fe contredire. Cette manière de penfer y a été de tout tems: l'ordre que donna Affuérus d'exter miner les Juifs ne pouvant être révoqué, on prit le parti de leur donner la permiffion de se défendre.

Il y a pourtant une chofe que l'on peut quelque fois oppofer à la volonté du prince; c'est la religion. On abandonnera fon père, on le tuera même, file prince l'ordonne: mais on ne boira pas du vin, s'il le veut & s'il l'ordonne. Les loix de la religion font d'un précepte fupérieur, parce qu'elles font données fur la tête du prince comme fur celles des fujets. Mais, quant au droit naturel, il n'en eft pas de même; le prince eft fuppofé n'être plus un homme.

Dans les états monarchiques & modérés, la puiffance eft bornée par ce qui en eft le reffort, je veux dire l'honneur, qui régne, comme un monarque, fur le prince & fur le peuple. On n'ira point lui alléguer les loix de la religion; un courtifan fe croiroit ridicule on lui alléguera fans ceffe celles de l'honneur. De-là réfultent des modifications néceffaires dans l'obéiffance; l'honneur eft naturellement fujet à des bifarreries, & l'obéiffance les fuivra

toutes.

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Quoique la manière d'obéir foit différents

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dans ces deux gouvernemens, le pouvoir eft
pourtant le même. De quelque côté que le
monarque fe tourne, il emporte & précipite la
balance, & eft obéi. Toute la différence eft
que, dans la monarchie, le prince a des lumières,
&
que les miniftres y font infiniment plus habiles
& plus rompus aux affaires que dans l'état
defpotique.

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СНАРІTRE X І.
Réflexions fur tout ceci.

TEL

ELS font les principes des trois gouverne mens ce qui ne fignifie pas que, dans une certaine république, on foit vertueux; mais qu'on devroit l'être. Cela ne prouve pas non plus que, dans une certaine monarchie, on ait de l'honneur: & que, dans un état defpotique particulier, on ait de la crainte; mais qu'il faudroit en avoir : fans quoi le gouvernement Tera imparfait.

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Que les loix de l'éducation doivent étre relatives aux principes du gouvernement.

CHAPITRE PREMIER.

Des loix de l'éducation.

LEs loix de l'éducation font les premières que nous recevons. Et comme elles nous préparent à être citoyens, chaque famille particulière doit être gouvernée fur le plan de la grande famille qui les comprend toutes.

Si le peuple en général a un principe, les parties qui le compofent, c'eft-à-dire, les familles l'auront auffi. Les loix de l'éducation feront donc différentes dans chaque efpèce de gouvernement. Dans les monarchies, elles auront pour objet l'honneur; dans les républiques, la vertu; dans le defpotifme, la crainte.

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CHAPITRE II.

De l'éducation dans les monarchies.

CE n'eft point dans les maifons publiques où

l'on inftruit l'enfance, que l'on reçoit dans les monarchies la principale éducation; c'est lorsque l'on entre dans le monde, que l'éducation en quelque façon commence. Là eft l'école de ce que l'on appelle honneur, ce maître univerfel qui doit par-tout nous conduire.

C'est là que l'on voit & que l'on entend toujours dire trois choses; qu'il faut mettré dans les vertus une certaine nobleffe, dans les mœurs une certaine franchise, dans les manières une certaine politeffe.

ce que

Les vertus qu'on nous y montre, font toujours moins ce que l'on doit aux autres, que l'on fe doit à foi-même : elles ne font pas tant ce qui nous appelle vers nos concitoyens, que ce qui nous en diftingue.

On n'y juge pas les actions des hommes comme bonnes, mais comme belles; comme juftes, mais comme grandes; comme raisonnables, mais comme extraordinaires.

Dès que l'honneur y peut trouver quelque chofe de noble, il eft ou le juge qui les rend légitimes, ou le fophifte qui les juftifie.

Tome I.

Q

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