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M. Demarçay, pour prouver qu'il est urgent de réorganiser l'armée, se plaint de ce que l'anarchie se manifeste dans plusieurs communes. On a laissé jusqu'ici, dit-il, des villes de 5,000 habitans sans autorité ; le ministère avoit beaucoup promis, et il n'a presque rien fait. M. de Lameth et d'autres membres de la gauche interrompent plusieurs fois l'orateur, en disant qu'il excitoit au trouble. M. Sébastiani justifie aussitôt la conduite du ministère, en rappelant tout ce qu'il a fait en si peu de temps.

Après quelques observations de M. Lamarque, on adopte les articles du projet de loi, portant que le contingent de l'armée de terre et de mer sera fixé chaque année par les chambres. On rejette, après deux éprenves, un amendement de M. de Genin, tendant à rectifier la répartition des départemens.

M. Paixhans combat l'article 3, parce qu'il porte que la législation militaire est maintenue dans ses autres dispositions. M. le ministre de l'intérieur fait observer qu'il ne faut pas trop attaquer les lois, quand elles ne sont pas en discussion. Il saisit l'occasion pour répondre à M. Demarcay, qu'on ne doit pas s'étonner de l'agitation qui a lieu, qu'elle est la conséquence de la transition à un nouvel état de choses. On ne peut pas précipiter les mesures, ajoute M. Guizot, et il faut de la modération et de la prudence en ce moment.

- L'ensemble de la loi est adopté à la majorité de 229 contre 8. M. Boissy-d'Anglas développe ensuite sa proposition, d'après laquelle il ne pourroit plus être accordé de pensions aux grands fonctionnaires qu'en vertu d'une loi.

Des scènes scandaleuses ont eu lieu à Poitiers et à Metz à l'occasion de la prestation du serment des cours et tribunaux. A Poitiers, à l'audience du 8 septembre, lorsque le premier président, M. Descordes, lut la formule, des murmures partirent de tous les côtés de l'auditoire; ils furent suivis de sifflets, puis de cris à bas le parjure! et d'autres insultes. M. Parigot, président de chambre, fut accueilli aussi par des huées et des sifflets; son crime étoit d'avoir présidé aux assises où fut condamné le général Berton. Les sifflets ont recommencé lorsque le premier président est descendu de son siége. En même temps on applaudissoit à outrance les conseillers que l'on croyoit favorables au parti libéral. Ces 'insultes sont d'autant plus graves, qu'elles partent, dit-on, de gens qui ne sont pas, pour la plupart, étrangers au barreau, et qui devroient en connoître et en observer les convenances. Mais on sait qu'il s'est formé parmi eux une ligue contre

l'inamovibilité de la magistrature. Les grands patrons de l'ordre légal auroient voulu qu'on chassât de leurs siéges, sans plus de façon, tous les magistrats institués depuis la restauration. Ils appeloient cela épurer la magistrature; et puis il y a une autre raison secrète qu'ils n'avouent pas, c'est qu'ils espéroient succéder aux Imagistrats destitués.

C'est donc pour effrayer et dégoûter les membres de la cour de Poitiers qu'on a eu recours à cette espèce de charivari, qu'une certaine Gazette raconte avec complaisance pour appuyer ses plaidoyers contre l'inamovibilité. Ainsi on excite du tumulte contre des magistrats qui déplaisent, et on se sert de ce tumulte même pour prouver qu'il faut les renvoyer. Le grief qu'on fait valoir le plus contre la cour royale de Poitiers, c'est une adresse au Roi, signée le 12 juillet par le premier président, par les trois prési dens de chambre, par douze conseillers, deux conseillers-auditeurs et par tout le parquet. Dans cette adresse, qui fut, dit-on, portée à Paris par M. de Montaubricq, procureur-général, les magistrats félicitoient le Roi de la prise d'Alger, et ajoutoient que cette victoire étoit un dédommagement des peines qu'il ressentoit en voyant des Français méconnoître sa voix, et refuser leur concours aux bienfaits que sa bonté méditoit. Mais ce jugement que les magistrats de Poitiers portoient sur l'adresse et sur les 221 les empêche-t-il d'être des hommes intègres, de rendre la justice' à leurs concitoyens, de remplir avec zèle leurs fonctions? Cette adresse efface-t-elle tous les titres qu'ils avoient à l'estime de leurs concitoyens? Qu'auroit-on dit sous la restauration, si on eût destitué des magistrats pour une phrase?

A Metz, les choses se sont passées d'une manière plus scanda leuse encore. Une centaine d'individus n'ont pas craint de faire connoître à l'avance à quels magistrats on comptoit donner des témoignages non équivoques de réprobation; c'est ainsi qu'ils s'exprimoient dans une lettre du 7 septembre au maire de la ville. Leur liste désignoit dix membres de la cour et cinq du tribunal. Le maire alla chez les magistrats repoussés par l'opinion du parti. Le premier président, M. d'Hannoncelles, consentit à donner sa démission, les autres refusèrent de céder aux menaces. La prestation du serment eut lieu le 9, et fut accompagnée de murmures: mais on ne se borna pas là; les factieux se rendirent dans la cour du palais, et là attendirent les magistrats à leur sortie pour les huer et les siffler. MM. de Romécourt, Pyrot, Virvaux, Fontaine, Robinet de Cléry, de Julvécourt furent particulièrement en butte aux outrages; on vouloit les forcer de se démettre ou de promettre leur démission. D'autres conseillers ou juges n'osèrent pas sortir, et attendirent que le rassemblement fût dissipé. La force armée n'a point paru pour réprimer ces insultes; elle ne s'est pas crue

apparemment assez puissante pour protéger des fonctionnaires publics insultés par des étourdis qui prétendoient réprimer l'opinion publique.

Plaintes et complaisances du Sauveur, par M. Lassausse.

Ce petit ouvrage est distribué de manière qu'il y a pour chaque jour de l'année un court sujet de méditation. Le titre de Plaintes et Complaisances vient de ce que chaque sujet commence par ces mots, je me plains ou je suis content, que l'auteur met dans la bouche du Sauveur. Une sentence à la fin de chaque sujet est destinée à rappeler la méditation dans le cours de la journée et à en faire tirer du fruit. On trouvera en tête du livre un avis sur l'usage que l'auteur conseilloit de faire de ses méditations.

M. Lassausse étoit un prêtre estimable, mort il y a quelques années, et auteur d'un assez grand nombre d'écrits de piété. Il a fait dans le même genre les Plaintes et complaisances de la sainte Vierge, annoncées dans notre no 595, tome XXIII.

AVIS.

MM. les Souscripteurs dont l'abonnement devoit expirer au 12 novembre prochain, sont prévenus qu'ayant reçu, depuis le 1er août, trois numéros par semaine au lieu de deux, leur abonnement finira au 1er octobre prochain, ainsi qu'ils en ont été avertis. Ils sont invités à le renouveler sans retard, s'ils veulent ne pas éprouver d'interruption.

VOIR, pour les prix et conditions, l'Avis imprimé sur la couverture de ce numéro.

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Trois p. 100, joniss. du 22 juin, ouvert à 64 fr. 75 c., et fermé à 63 fr. 50 c. Cinq p. 100, jouiss. du 22 sept., ouv. à 94 fr. 00 c., et fermé à 92 fr. 50 c.

MARDI 24 SEPTEMBRE 1830.

AN° 1687.)

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Précis sur les derniers évènemens à Bruxelles et dans les Pays-Bas.

(Suite des numéros 1682 et 1685.)

Le 1er septembre, le prince d'Orange fit son entrée à Bruxelles, accompagné seulement de quelques officiers. La garde bourgeoise lui rendit les honneurs accoutumés. Il descendit à son palais, publia une proclamation et nomma une commission se concerter avec pour lui sur les mesures à prendre ; quelques membres de cette commission déplurent à l'opinion. Le 2, la députation envoyée à La Haye étoit de retour; elle avoit vu le roi, et lui avoit exposé les vœux des Bruxellois. Le prince l'avoit écoutée avec bonté ; on avoit discuté paisiblement, et le roi avoit laissé entrevoir qu'il pourroit céder sur quelques points, mais il ne vouloit point avoir l'air d'être forcé. Le rapport de la députation ayant été publié dans la ville, on s'en montra peu satisfait, on n'y voyoit que des promesses vagues. La proclamation de la députation fut brûlée au milieu de la grande place. On étoit irrité contre les journaux hollandais, qui traitoient les Belges de traitres et de rebelles, et qui provoquoient contre eux des mesures sévères. On se plaignoit de l'attitude hostile du prince Frédéric à Vilvorde avec des troupes. Les esprits s'échauffoient de plus en plus. Toutes les villes de la Belgique paroissoient animées des mêmes dispositions, et la garde bourgeoise de Liège envoya au secours de celle de Bruxelles.

La députation qui étoit allée à La Haye avoit porté au roi les vœux des Belges, mais ils formèrent bientôt une autre demande dont on ne s'étoit pas avisé d'abord; c'étoit la séparation de la Belgique et de la Hollande. Ces deux par

Tome LXV. L'Ami de la Religion.

Y

ties du royaume auroient chacune une administration séparée, quoique sous le gouvernement du même prince. Cette idée fut aussitôt accueillie avec enthousiasme. La commission nommée par le prince d'Orange lui proposa, le 3 septembre, cette séparation, comme le seul moyen de conserver la Belgique à la maison de Nassau. Les députés aux états-généraux qui se trouvoient à Bruxelles appuyèrent cet avis. L'état-major de la garde bourgeoise, les députés des sections, la députation de Liège furent appelés au palais pour exprimer leur vou. Tous demandèrent la séparation et l'éloignement des troupes, mais en même temps ils protestèrent de leur attachement à la maison d'Orange et de leur résolution de repousser les Français, s'ils se présentoient. Le prince d'Orange partit le jour même pour La Haye, après avoir dissous la commission qu'il avoit créée. Immédiatement après, les troupes renfermées depuis dix jours dans le palais quittèrent Bruxelles. Des proclamations annoncèrent au peuple que le prince portoit au roi les vœux des Belges. Le conseil de régence de la ville fit une adresse au roi pour réclamer la séparation des provinces du midi et de celles du nord. Les membres de la seconde chambre qui se trouvoient à Bruxelles, au nombre de vingt, publièrent une déclaratien dans le même sens. En même temps les journaux entretenoient la chaleur des esprits par des articles pleins d'énergie. Le Courrier des Pays-Bas, par exemple, disoit le 5 sep

tembre :

« Nous ne sommes pas en révolte; la dynastie est toujours là, entourée de respect et de soumission, mais d'une soumission raisonnée et conditionnelle, comme il convient à un peuple qui ne se croit pas le troupeau d'un berger... Nous sommes armés pour dicter nos conditions, et pour ne pas souffrir qu'on nous les fasse... Mais si nous ne sommes pas en révolte, nous sommes assurément en pleine révolution, et il y auroit puérilité et péril à le dissimuler... Il nous faut un gouvernement qui soit notre ouvrage et notre pupille... Qu'on se hâte de prendre un parti décisif, vigoureux, entraînant...

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