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d'une grande sacristie devinrent la proie des devastateurs, et le dénuement de la sacristie de la métropole est aujourd'hui tel, que lorsque le chapitre a recommencé ces jours derniers à célébrer ses offices, if a fallu emprunter à la petite sacristie une chasuble pour dire la messe. Cette petite sacristie n'a aucune communication avec la grande, et c'est ce qui l'a préservée du pillage. Elle sert pour la paroisse, et l'on y entre par la nef. N'est-il pas étonnant qu'aucun journal n'ait parlé de ce pillage, comme si on croyoit pouvoir dissimuler des faits si affligeans et si notoires? Pourquoi garde-t-on le silence aussi sur le pillage du Palais de Justice, où on est revenu à deux fois, où on a mutilé le tableau du roi, mis en pièces les tentures, les meubles, les robes des conseillers et des juges, etc.? A-t-on craint que ces excès ne déparassent le tableau qu'on se plait à tracer des opérations de ces trois jours? Dieu veuille que l'impunité de ces désordres et de ces profanations ne soit pas pour les coupables un appât qui les porte à renouveler ces excès à la première occasion favorable!

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Les nouvelles des évènemens de la capitale, à mesure qu'ils se répandoient dans les provinces, y ont échauffé les têtes et ont fait éclore des voies de fait et des désordres. A Châlons, on se porta le dimanche 1er août à l'évêché. Il roît que ce n'étoient point des habitans de la ville, mais des gens venus de Reims. Ils allèrent trois fois dans la journée à l'évêché; la première fois pour y planter un drapeau tricolore. Comme ils trouvèrent la porte fermée, ils escaladèrent les murs. Ils y retournèrent la seconde fois à onze heures et demie du soir, demandant M. l'évêque; on parvint cependant à les engager à se retirer. Enfin ils revinrent une heure après et cherchèrent partout M. l'évêque. Le prélat n'eut que le temps de se revêtir d'une soutane et de gagner la cathédrale, accompagné d'un de ses grands-vicaires et de son secrétaire. de là il fut recueilli dans une maison voisine, et se retira ensuite à l'hospice. Pendant ce temps, les assaillans firent main basse sur la cave. La garde nationale se trouva trop foible pour réprimer ce désordre. M. l'évêque a donné dans cette circonstance des preuves de ce calme, de cette patience et de ce courage que la foi inspire et que fortifient l'habitude de la prière et la confiance en Dieu. Îl devoit d'autant moins s'attendre à cette insulte, qu'il venoit quelques instans auparavant de rendre service à l'administration dans un moment où

on manquoit de fonds. Il avoit avancé généreusement la somme dont on avoit besoin pour des choses urgentes.

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. On ne nous apprend que peu de choses sur le voyage de la famille royale. Il paroît qu'elle voyage à petites journées. Elle a couché le jeudi à Verneuil; elle n'étoit accompagnée que des gardes-du-corps. On dit qu'un voyageur a rencontré auprès de Verneuil le Roi et M. le Dauphin à cheval; les princesses et leur suite étoient en voiture. On se rendoit à Cherbourg par Argentan, Vire, Carentan et Valognes. L'embarquement devoit avoir lieu vers le 11; on croyoit que la famille royale se rendroit aux Etats-Unis. Les trois commissaires devoient l'accompagner jusqu'au port.

-M. le duc d'Orléans a nommé ses deux fils aînés, les ducs de Chartres et de Nemours, grands-croix de la Légion-d'Honneur.

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Des ordonnances du lieutenant-général nomment un grand nombre de préfets. M. d'Arros est nommé préfet de la Meuse à la place de M. de Caunan; M. de Riccé, préfet du Loiret, au lieu de M. de Foresta; M. Tourangin, préfet de la Sarthe; M. Pompéi, préfet de l'Yonne, au lieu de M. de Gasville; M. Target, préfet du Calvados, au lieu de M. de Montlivault; M. Leroy, préfet d'Ille-et-Vilaine, au lieu de M. Jordan; M. Langlois d'Ămilly, préfet d'Eure-et-Loire, au lieu de M. Giresse; M. A. Passy, préfet de l'Eure, au lieu de M. Delaitre; M. Merville, préfet de la Meurthe, au lieu de M. d'Allonville; M. Clogenson, préfet de l'Orne, au lieu de M. de Kersaint; M. Louis de Saint-Aignan, préfet de la Loire-Inférieure, au lieu de M de Vanssay; M. Fargues, préfet de la Haute-Marne, au lieu de M. de Saint-Genest; M. F. Barthélemi, préfet de Maine-et-Loire, au lieu de M. de Bagneux; M. Dugied, préfet du Haut-Rhin, au lieu de M. Locard; M. L. P. Didier, préfet de la Somme, au lieu de M. de Villeneuve; M. Lucien Arnault, préfet de Saône-et-Loire, au lieu de M. de Puymaigre, et M. Am. Thierry, préfet de la HauteSaône, au lieu de M. Lebrun des Charmettes.

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Un ordre de M. le lieutenant-général porte que les élèves de l'école polytechnique qui ont concouru au affaires des 27, 28 et 29 juillet, sont promus au grade de lieutenant, et leur accorde un congé de trois mois avec dispense de subir des examens. Les élèves qui se destinent aux services civils recevront un avancement analogue à ce grade.Vu la difficulté de reconnoître ceux qui se sont les plus distingués, les élèves désigneront douze d'entre eux pour recevoir la décoration de la Légion-d'Honneur.

M. le duc d'Orléans a décidé que quatre décorations de la Légion-d'Honneur seroient accordées aux élèves de l'école de droit et quatre aux élèves de l'école de médecine.

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MM. Clausel de Coussergues, de Courville et Delvincourt, ont donné leur démission de membres du conseil d'instruction publique. Les circonstances actuelles expliquent suffisamment cette démarche, qui prive le conseil du concours d'hommes distingués par leur sagesse et leurs lumières. Une des places vacantes

est conférée à M. Čousin.

-M. le général comte Colbert a été chargé de prendre le commandement de toute l'artillerie de la garde royale. Les généraux Renaud, Al. Colbert et Delaitre, sont chargés de rallier ces militaires à Melun, Fontainebleau, Provins, Versailles, Meaux, Compiègne, Beauvais et à Paris.

-MM. Couture fils, Cocagne, Farey, de Moras, Nasse, L. Dubois, Richard et Colombel, sont nommés sous préfets à Yvetot, Neufchâtel, Cambrai, Bayeux, Lisieux, Bernay, Lure, Falaise.

-MM. Lepasquier, Collet-Dubignon, Verny, Mourgeon et Marie, sont nommés secrétaires généraux des préfectures de la SeineInférieure, de Maine-et-Loire, du Haut-Rhin, du Doubs et du Calvados.

MM. Madier de Montjau, Bresson et Félix Faure, conseillers aux cours royales de Nîmes, Nancy, Grenoble; Colin et Lerouge, avocats généraux à Dijon et Besançon, sont nommés procureurs généraux près les cours royales de Lyon, Nancy, Grenoble, Dijon et Besançon, en remplacement de MM. Seguy, Saladin, Morand de Jouffrey, Nault et Clerc. M. La Feuillade de Chauvin, procureur général à Bastia, va remplir ces fonctions à Bordeaux, en remplacement de M. Rateau. M. Varambey, avocat à Dijon, est nommé avocat général à la cour royale de cette ville. M. Čochelin est fait procureur du Roi au Mans.

M. Larreguy est nommé commissaire extraordinaire dans le département des Bouches-du-Rhône, où il exercera toutes les fonctions de préfet.

- M. le duc d'Orléans vient d'accorder une pension de 1500 fr. sur sa cassette à M. Rouget-Delisle, auteur de la Marseillaise. On chante maintenant la Marseillaise, ainsi que d'autres chansons de cette nature, sur les théâtres et dans les rues.

On vient de rendre aux réfugiés portugais les secours qui leur avoient été accordés sous le ministère de concession, et que M. de Peyronnet leur avoit retirés.

-La commission municipale a arrêté qu'il seroit publié une narration officielle de tous les traits éclatans qui ont marqué les dernières journées de juillet, et en a confié la rédaction à M. Plougoulm, avocat à Paris.

CHAMBRE DES PAIRS.

La chambre des pairs avoit tenu une courte séance le samedi 7 à trois heures, et il ne s'y étoit passé rien d'important. Mais le soir on lui communiqua ce qu'avoit fait la chambre des députés. Les pairs s'assemblèrent donc à neuf heures du soir au nombre de 114. La discussion s'ouvrit sur la déclaration des députés. M. de Chateaubriand s'éleva à la fois contre la mesure qui supprime les pairs de Charles X, contre l'idée de faire une république et contre le projet de créer une monarchie nouvelle. Il fit l'éloge du peuple de Paris dans la dernière révolution, parla en faveur du duc de Bordeaux, et vota contre la déclaration. Ce discours, mélange singulier de dévouement à la monarchie légitime et à la liberté, se ressent beaucoup des opinions où l'auteur s'étoit laissé entraîner dans ces derniers temps.

M. le comte d'Andlau, pair nommé en 1827, résigne sa pairie. Cet exemple est suivi par MM. de Bouillé, Hocquart et de Grosbois. Au moment où l'on alloit délibérer sur la vacance du trône, plusieurs pairs se sont retirés, entr'autres MM. de Glandéves, de Brézé, de Maillé, de Rougé; M. de Castelbajac a dit qu'il se retiroit aussi, que sa conscience et son serment lui ordonnoient de voter contre la proposition faite, et que personne n'avoit le droit de déclarer le trône vacant.

MM. de Barante et de Pontécoulant se sont élevés contre la suppression des pairs de Charles X. La chambre a déclaré, sur leur avis, qu'elle ne pouvoit délibérer sur ce point, et qu'elle s'en rapportoit à la haute prudence du lieutenant-général. Le scrutin a donné le résultat suivant: pour la déclaration, 89 voix; contre 10; billets blancs, 14; 1 bulletin nul. La décision a été portée immédiatement au prince par une grande députation.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

Le 6, M. le doyen d'âge est à 10 heures au fauteuil : à 11 heures il n'y a qu'une soixantaine de membres.

Sur la proposition de M. Martin Laffitte, on ajourne l'élection des candidats à la questure, jusqu'à ce qu'on sache si la chambre ou le prince les nommera.

M. le doyen veut lire l'adresse des habitans de Saint-Quentin; mais on lui fait observer que c'est contraire aux usages de la chambre, et que les adresses des citoyens de Paris auroient d'ailleurs la priorité.

Un congé d'un mois est accordé à M. Guilhem, qui est malade. M. Labbey de Pompières lit une ordonnance de M. le lieutenant-général, qui nomme président de la chambre M. Casimir Perrier, celui des candidats qui a réuni le plus de suffrages, et qu'ainsi la chambre auroit nommé elle-même.

Comme M. Casimir Perrier est absent, M. le doyen cède le fauteuil à M. J. Laffitte, qui se trouve le premier vice-président, comme étant le second des cinq candidats à la présidence. Les quatre secrétaires définitifs prennent place en même temps.

M. Salverte remet une proposition, portant que la chambre accuse de haute-trahison les ministres signataires des ordonnances du 25 juillet. Cette proposition est renvoyée dans les bureaux sans la moindre opposition.

L'élection de M. de Vaulchier est annullée pour violation du secret des votes.

On apporte une lettre de M. Casimir Perrier, par laquelle il expose que le mauvais état de sa santé l'empêche de présider en ce moment, et où il prie M. J. Laffite de continuer à le remplacer.

M. de Corcelles demande que tous les membres qui siégent dans la chambre signent la proclamation faite par quelques députés, pour conférer la lieutenance-générale du royaume à M. le duc d'Orléans, afin qu'il n'y ait dans la chambre aucun ennemi se

cret ou caché.

M. Berryer représente que cette proposition devroit préalablement être renvoyée dans les bureaux.

M. Bérard soutient que la Charte ayant été violée, Charles X et son fils n'ont aucun droit de transmettre un pouvoir qu'ils ne possèdent plus; que le peuple, représenté par ses députés, a maintenant le droit de se choisir un chef; qu'on trouvera toutes les garanties constitutionnelles dans M. le duc d'Orléans, et qu'il n'y a pas à s'occuper de question de l'ancienne légitimité, d'établissement de la république, de donner le trône à Napoléon II; en conséquence il soumet les propositions suivantes :

1o La chambre des députés prenant en considération, dans l'intérêt public, l'impérieuse nécessité qui résulte des évènemens des 26, 27, 28 et 29 juillet, et de la situation générale de la France, déclare que le trône est vacant, et qu'il est indispensablement besoin d'y pourvoir;

2o Selon le vœeu, et dans l'intérêt du peuple français, la Charte sera modifiée ainsi qu'il suit :

L'art. 6, relatif à la religion de l'Etat, seroit supprimé.

L'art. 14 portera que le roi rend des ordonnances pour l'exécution des lois (et non pour la sûreté de l'état). Les lois pourront être proposées par les chambres; on siégera à la chambre des pairs à 25 ans, et les séances de cette chambre seront publiques, sauf la demande de cinq membres. On pourra être électeur et même député à 25 ans. Les présidens de colléges électoraux seront nommés par les électeurs, et le président de la chambre des députés par elle-même. Les art. 19, 20, 21, 31, 36, 46, 47 et 56 de la Charte sont supprimés. La Charte et les lois sont mises sous la protection

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