Images de page
PDF
ePub

20 JY 59

TRAITÉ

DE

L'EMPOISONNEMENT

ET DES POISONS EN GÉNÉRAL

OU

TOXICOLOGIE GÉNÉRALE

Dans la toxicologie spéciale nous supposons que le poison est connu et passons en revue les diverses recherches auxquelles il peut donner lieu, les moyens d'investigation à l'aide desquels on peut reconnaître chaque espèce d'empoisonnement, les voies par lesquelles il peut se produire, les questions médico et chimico-légales qu'il peut soulever.

Dans la toxicologie générale nous abordons un problème plus complexe et admettons au contraire que nous sommes en présence d'un cas supposé, par conséquent nous indiquons les moyens de démontrer s'il y a empoisonnement, de le distinguer de tout autre état morbide, de reconnaître l'espèce toxique, de résoudre les questions médico et chimico-légales qui peuvent se présenter. Afin d'arriver à ce but et pour ne pas déroger de la marche que nous suivons

que nous adopterons et les matières dont nous traiterons dans autant de chapitres suivants :

1o Absorption, séjour et élimination des poisons;

2o Etiologie. Recherche des poisons dans les matières alimentaires, le tube intestinal, absorbés, etc.-Description des procédés. Recherche et caractères des poisons en particulier. 3o Effets, lésions, mode d'action des poisons;

4

Thérapeutique de l'empoisonnement ;

5° Pronostic de l'empoisonnement;

6° Diagnostic de l'empoisonnement;

Classification des poisons;

8° Questions chimico et médico-légales; 9° Rapports toxicologiques;

10° Corollaires toxicologiques.

Cet ordre, que nous suivons dans nos cours, nous permettra d'embrasser la toxicologie dans son ensemble, d'en exposer les bases fondamentales. Dans les ouvrages spéciaux nationaux, on y traite aussi des généralités sur les poisons, mais elles sont ordinairement disséminées dans le corps de l'ouvrage et non coordonnées en un ensemble systématique. Nous possédons plusieurs traités de toxicologie générale, parmi lesquels se distingue surtout celui d'Anglada, trop peu connu à Paris, remarquable par cet esprit philosophique et doctrinal qui caractérise les productions de l'école de Montpellier.

CHAPITRE Ier.

Absorption, séjour, élimination des poisons.

L'absorption des poisons, les surfaces par lesquelles ils peuvent pénétrer dans l'économie, leur séjour plus ou moins prolongé dans nos organes, ainsi que leur voie d'élimination sont des questions si importantes, sous le point de vue de la toxicologie, de la thérapeutique, qu'elles nous semblent devoir être traitées avec quelques détails.

[blocks in formation]

Dans le traité de toxicologie spéciale, surtout aux poisons inorganiques de la quatrième section, et aux poisons organiques les plus importants, nous rapportons des observations, des expériences physiologiques et chimiques qui démontrent l'absorption des poisons, que c'est même par suite de leur passage dans le sang qu'ils produisent l'intoxication. Les effets généraux ou spéciaux propres à certains poisons (mercuriaux, cantharides, etc.), l'odeur, la couleur, la saveur, etc., dont s'imprègnent soit les os, la chair des animaux, l'air expiré, le lait, les urines, la sueur, et autres liquides, sous l'influence de certains aliments, médicaments, aromates, matières colorantes, ont dù faire admettre l'absorption de toute antiquité; c'est ce que semble prouver l'expression de passage des poisons, des médicaments dans le sang, qu'on trouve dans les anciens auteurs, ainsi que l'emploi de la ligature du côté du coeur, trèsanciennement employée, pour s'opposer à l'absorption des

venins.

L'absorption des poisons a été mise hors de doute par

plusieurs expérimentateurs, Brodie, Magendie et Delille, Christson et Coindet, Segalas, Panizza, Antonio Roselli, Gaetano Strombio, etc. Ces physiologistes ont démontré : 1° qu'un poison, déposé sur le tissu cellulaire d'un membre, dans une anse intestinale, qui ne communiquent avec le corps que par les nerfs et même les vaisseaux lymphatiques, ne produisent pas d'effet toxique, tandis que c'est l'inverse si la communication a lieu seulement par une artère et une veine, et cela mème aussi rapidement que lorsque le membre, l'intestin restent intacts; 2° que c'est surtout par les veines que s'opère l'absorption des poisons, ce qui explique la rapidité de leurs effets; 3o qu'une ventouse, appliquée sur le lieu où est déposé le poison, peut en retarder, en suspendre l'effet, même l'annuler, pourvu qu'elle soit appliquée à temps et pendant un temps assez prolongé, (Barry). Enfin nous verrons ci-après que tous les poisons minéraux et plusieurs poisons organiques peuvent être décelés dans le foie et autres organes, les liquides sécrétés, etc.

L'absorption varie, est plus ou moins active selon la surface absorbante, son état normal, pathologique ou physiologique actuel, selon la nature du poison, son état d'agrégation, de division, sa solubilité, les liquides, les substances avec lesquels il est mélangé; c'est ce que nous allons examiner dans autant de paragraphes suivants.

1° Absorption par la peau. Quoique niée par quelques auteurs, elle est mise hors de doute, mais elle est très-lente. Si, dans le cours de ce traité, nous n'avons pu citer des cas d'intoxication par plusieurs poisons appliqués sur la peau, à moins que celle-ci ne fût dénudée par l'effet caustique local, nous en rapportons cependant un assez grand nombre, l'épiderme étant resté intact, par l'opium, les plantes vireuses, l'onguent mercuriel, le sublimé corrosif. Plusieurs auteurs admettent l'absorption des préparations plombiques par la peau et qu'on peut éviter les accidents

« PrécédentContinuer »