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II. Considérez qu'alors le monde finira pour ce qui vous regarde, il n'y en aura plus pour vous; il renversera sens dessus dessous devant vos yeux : oui, car, alors, les plaisirs, les vanités, les joies mondaines, les affections vaines nous apparaîtront comme des fantômes et nuages. Ah! chétive, pour quelles bagatelles et chimères ai-je offensé mon Dieu ! Vous verrez que nous avons quitté Dieu pour néant. Au contraire, la dévotion, les bonnes œuvres vous sembleront alors si désirables et douces et pourquoi n'ai-je suivi ce beau et gracieux chemin? Alors les péchés qui semblaient bien petits paraîtront gros comme des montagnes, et votre dévotion bien petite.

III. Considérez les grands et langoureux adieux que votre âme dira à ce bas monde ; elle dira adieu aux richesses, aux vanités et vaines compagnies, aux plaisirs, aux passe-temps, aux amis et voisins, aux parents, aux enfants, au mari, à la femme, bref, à toute créature. Et enfin, finalement, à son corps, qu'elle délaissera pâle, hâve; défait, hideux et puant.

IV. Considérez les empressements qu'on aura pour lever ce corps-là et le cacher en terre, et que, cela fait, le monde ne pensera plus guère à vous, ni n'en fera plus mémoire, non plus que vous n'avez guère pensé aux autres. Dieu lui fasse paix !

dira-t-on, et puis c'est tout. O mort! que tu es considérable, que tu es impétueuse.

V. Considérez qu'au sortir du corps, l'âme prend son chemin, ou à droite ou à gauche. Hélas! où ira la vôtre? quelle voie tiendra-t-elle? Non autre que celle qu'elle aura commencée en ce monde.

Affections et Résolutions.

I. Priez Dieu et vous jetez entre ses bras. Las! Seigneur, recevez-moi en votre protection pour ce jour effroyable. Rendez-moi cette heure heureuse et favorable, et que, plutôt, toutes les autres de ma vie me soient tristes et d'affliction.

II. Méprisez le monde. Puisque je ne sais l'heure en laquelle il te faut quitter, ô monde ! je ne me veux point attacher à toi. O mes chers amis, mes chères alliances, permettez-moi que je ne vous affectionne plus que par une amitié sainte, laquelle puisse durer éternellement; car, pourquoi m'unir à vous, en sorte qu'il faille quitter et rompre la liaison?

III. Je me veux préparer à cette heure, et prendre le soin requis pour faire ce passage heureusement; je veux assurer l'état de ma conscience de tout mon pouvoir, et veux mettre ordre à tels et tels manquements.

Conclusion.

Remerciez Dieu de ces résolutions qu'il vous a données; offrez-les à sa Majesté; suppliez-la, derechef, qu'elle vous rende votre mort heureuse, par le mérite de celle de son fils. Implorez l'aide de la Vierge et des saints. Pater, Ave Maria. Faites un bouquet de myrrhe.

MEDITATION VI.

DU JUGEMENT.

Préparation.

I. Mettez-vous devant Dieu.

II. Suppliez-le qu'il vous inspire.

Considérations.

I. Enfin, après le temps que Dieu a marqué pour la durée de ce monde, et après une quantité de signes et présages horribles pour lesquels les hommes sècheront d'effroi et de crainte, le feu, venant comme un déluge, brûlera et réduira en cendre toute la face de la terre, sans qu'aucune des choses que nous voyons sur celle-ci en soit exempte.

II. Après ce déluge de flammes et de foudres, tous les hommes ressusciteront de la terre, excepté ceux qui sont déjà ressuscités, et, à la voix de l'archange, comparaîtront en la vallée de Josaphat. Mais, hélas! avec quelle différence! car les uns y seront en corps glorieux et resplendissants, et les autres en corps hideux et horribles.

III. Considérez la majesté avec laquelle le souverain juge comparaîtra environné de tous les anges et saints, ayant devant soi sa croix, plus reluisante que le soleil, enseigne de grâce pour les bons et de rigueur pour les mauvais.

IV. Ce souverain juge, par son commandement redoutable, et qui sera soudain exécuté, séparera les bons des mauvais, mettant les uns à sa droite, les autres à sa gauche; séparation éternelle, et après laquelle, jamais plus, ces deux bandes ne se trouveront ensemble.

V. La séparation faite et les livres des consciences ouverts, on verra clairement la malice des mauvais et le mépris dont ils ont usé contre Dieu; et, d'ailleurs, la pénitence des bons et les effets de la grâce de Dieu qu'ils ont reçue; et rien. ne sera caché. O Dieu ! quelle confusion pour les uns, quelle consolation pour les autres !

VI. Considérez la dernière sentence des mauvais. Allez, maudits, au feu éternel, qui est pré

paré au diable et à ses compagnons. Pesez ces paroles si pesantes: Allez, dit-il, c'est un mot d'abandonnement perpétuel que Dieu fait de tels malheureux, les bannissant pour jamais de sa face. Il les appelle maudits : ô mon âme ! quelle malédiction; malédiction générale, qui comprend tous les maux ; malédiction irrévocable, qui comprend tous les temps de l'éternité. Il ajoute : au feu éternel. Regarde, ô mon cœur! cette grande éternité; ô éternelle éternité des peines, que tu es effroyable!

VII. Considérez la sentence contraire des bons: Venez, dit le juge: ah! c'est le mot agréable de salut par lequel Dieu nous tire à soi et nous reçoit dans le giron de sa bonté. Bénits de mon père ô chère bénédiction qui comprend toute bénédiction!' possédez le royaume qui vous est préparé dès la constitution du monde. O Dieu ! quelle grâce! car ce royaume n'aura jamais de fin.

Affections et Résolutions.

I. Tremble, ô mon âme, à ce souvenir; ô Dieu! qui me peut assurer cette journée, en laquelle les colonnes du ciel trembleront de frayeur.

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