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en ce sens que l'on ne peut pas se changer à soi-même la cause et le titre de sa posses

sion.

Ainsi le fermier, quelque long-temps qu'il ait joui de l'héritage à titre de ferme, ne peut. pas prescrire la propriété de l'héritage. ( Code civil, art. 2240 et 2236.)

Scriptum est apud veteres neminem sibi causam possessionis mutare posse. (L. XIX, Dig. de acquir. possessione.)

V. La bonne foi requise pour servir de basé à la prescription ne se considère que dans le possesseur actuel, sans qu'on puisse exciper contre lui de la mauvaise foi de ses auteurs.

Si malæ fidei possessor alii bonâ fide accipienti tradiderit, poterit ei longâ possessione acquiri. ( Instit. de usu.)

De auctoris dole, exceptio emptori non objicitur. (L. IV, § 27.)

VI. Mais cette règle n'a lieu que pour le cas où le possesseur auroît acquis à titre singulier; car, s'il est héritier ou représentant à titre universel du premier usurpateur, la mauvaise foi de celui-ci infecte les possessions subséquentes, et s'oppose à l'effet de la prescrip

tion.

Cùm hæres in jus omne defuncti succedit ignoratione, suâ, defuncti vitia non excludit. (L. xi, Dig. de divers.)

Usu capere hæres non poterit quod defunctus non potuit.....

Vitia possessionum à majoribus contracta perdurant, et successorem auctoris sui culpa comitatur. (L. 11, Cod. de acquir. rer. possessione.)

« Le méritiers de ceux qui tenoient la chose à quel

» qu'un des titres désignés par l'article précédent, ne » peuvent non plus prescrire.» (Code civil, art. 2237.)

VII. Ainsi, de deux possesseurs d'un héritage usurpé, il est possible que l'un puisse s'aider de la prescription, qui sera inutile pour l'autre.

Par exemple, si l'usurpateur du domaine en vend une métairie à un tiers qui l'achète de bonne foi, et croyant le vendeur véritable propriétaire.

Supposons encore que ces deux individus, après avoir possédé paisiblement les deux por tions pendant trente ans, soient troublés par le propriétaire qui revendique son domaine : l'acquéreur de bonne foi sera maintenu; mais l'usurpateur sera évincé, malgré la presoription, à cause de sa mauvaise foi.

Si partem possessionis malæ fidei possessor vendidit, id quidem quod ab ipso tenetur, omnia cum fructibus recipi potest.

Portio autem quæ distracta est ita demùm rectè petitur à possidente, si sciens aliena comparavit. (L. v, Cod. de usucap.)

CHAPITRE TROISIÈME.

De la Manière d'acquérir par la voie de l'ALLUVION.

On entend par alluvion l'accroissement lent et imperceptible d'un héritage limitrophe du cours de l'eau, de telle manière que l'esprit ne puisse pas discerner le moment de la réu

nion C'est cette lenteur dans l'accroissement de l'héritage rural qui distingue l'alluvion de l'atterrissement.

« L'alluvion profite au propriétaire riverain » soit qu'il s'agisse d'un fleuve ou d'une rivière na» vigable, flottable ou non. A la charge, dans le » premier cas, de laisser le marche-pied, ou che» min de hallage, conformément aux réglemens. >> (Code civil, art. 556.)

Est alluvio incrementum latens ut intelligi non possit, quantum, vel quo momento temporis adjiciatur. (Instit. lib. II, tit. 1.)

« Il en est de même des relais que forme l'eau >> courante qui se retire insensiblement de l'une de » ses rives en se portant de l'autre. Le proprié– » taire de la rive découverte profite de l'alluvion »sans que le riverain du côté opposé y puisse ve>>nir reclamer le terrain qu'il a perdu. (Code civil, art. 557.)

II. L'alluvion a lieu de deux manières :

l'une, quand un fleuve apporte peu à peu au fonds voisin des amas de terre, de sable et de gravier, qui s'y consolident; l'autre, quand, en détournant à peu peu ses eaux, il laisse le sol de son lit à découvert et réuni au fonds voisin.

III. Cette contiguité forme un titre au propriétaire riverain pour s'emparer de la portion mise à sec; car l'alluvion est un des moyens légitimes d'acquérir, même quand l'alluvion dériveroit d'une rivière non navigable ni flottable.

Quod per alluvionem agro tuo flumen adjicit, jure gentium tibi acquiritur.

Alluvio restituit agrum.

« La rivière ôte et donne. » (Loisel Instit. liv. II, tit. 11, art. 9.)

IV. Le bénéfice de l'alluvion est acquis au propriétaire riverain, quelque récente que soit son acquisition, sans que le précédent vendeur puisse tirer avantage de cette circonstance pour se dispenser de fournir la mesure portée au contrat de vente.

Id quod post emptionem accessit fundo per alluvionem, ad emptoris commoduni pertinet.

V. Le bénéfice d'alluvion profite aussi à l'usufruitier et au fermier.

Placuit alluvionis quoque usumfructum ad fructuarium pertinere.

<«< L'usufruitier jouit de l'augmentation survenue par » alluvion à l'objet dont il a l'usufruit: » ( Code eivil, art. 596.)

VI. Le bénéfice d'alluvion ne peut pas être réclamé à l'égard des eaux d'un lac ou d'un étang.

Après la retraite de ces eaux, le terrain mis à sec continue d'appartenir à son propriétaire, sans que le propriétaire limitrophe puisse, en aucun cas, le revendiquer à titre d'alluvion.

« L'alluvion n'a pas lieu à l'égard des lacs et étangs, » dont le propriétaire conserve toujours le terrain que » l'eau couvre, quand elle est à la hauteur de la décharge de l'étang, encore que l'eau vienne à dimi» nuer.» (Code civil, art. 558.)

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VII. Mais si, par l'effet d'une crue extraor dinaire, les eaux du lac ou de l'étang se répandoient sur les champs voisins, le proprié taire du lac ou de l'étang ne peut pas, après la retraite de ces eaux, prétendre au droit d'alluvion sur le terrain inondé.

« Réciproquement, le propriétaire de l'étang n'ac

» quiert aucun droit sur les terres riveraines que son » cau vient à couvrir dans les crues extraordinaires.» (Code civil, art. 550.)

VIII. Il est permis aux propriétaires riverains de fortifier leurs fonds à leur gré, nonseulement pour les mettre à couvert contre le débordement des eaux, mais encore pour se préparer un accroissement par alluvion pourvu toutefois qu'ils ne détournent cours du fleuve en le rejetant sur l'autre

rive.

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Ripam suam adversùs rapidi amnis impetum munire, prohibitum non est. (Cod. de alluvione.)

« Si la rivière mine ou accroît la rive, la perte » et le profit suivent le propriétaire de l'héritage >> chacun en droit soi; il est loisible au propriétaire » d'empêcher, s'il peut, sans dommage d'autrui, que » la rivière mine son héritage, ou change son cours »en canal ordinaire. » (Cout. de Metz, tit. XII, art. 28.)

IX. Si, entre l'héritage et la rivière, îl se trouve un grand chemin, cette circonstance n'enlève pas à l'héritage le plus voisin le bénéfice de l'alluvion, parce que le chemin n'est considéré lui-même que comme empiétation sur la propriété limitrophe; étant annexé à cette propriété, il ne la divise pas de la rivière.

une

Il en faut dire autant d'un fossé, d'un rivage, d'un aqueduc, etc., par la raison que, quoique leur usage soit public, la propriété réside néanmoins sur la tête des maîtres des fonds auxquels ils sont inhérens; ils ne forment pas de séparation du fonds, quoiqu'ils le divisent en deux.

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