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yen. Comme toutes les autres grandes fêtes chinoises, on les célèbre toujours par un grand festin de cérémonie, des concerts, des représentations théâtrales et autres divertissements; mais elles ont cela de particulier qu'elles ont toujours lieu sous de vastes et riches tentes, qu'on dresse exprès dans les cours ou les jardins du palais. Il n'y a rien de certain sur l'origine de cet usage; tout ce que l'on a pu dire à ce sujet n'est que conjectural. Mais il suffit, en Chine, qu'une coutume soit ancienne pour qu'on la respecte scrupuleuse

ment.

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Amusements populaires et divertissements particuliers des Chinois. Bateleurs et acrobates chinois. Quelques exemples de leur entente du métier. Marionnettes chinoises. La chasse. Chasses impériales. La pêche. La pêche « au cormoran ",

à la « planche », etc. Les cerfs-volants; le sabot, la toupie, etc.

· Jeux de cartes,

des dés et des échecs. Passion effrénée des

Chinois pour les jeux de hasard.

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La gravité très-connue des Chinois ne les empêche pas d'aimer les divertissements et les jeux de toutes sortes; souvent même, malgré toutes les règles qui tendent à modérer chez eux l'ardeur des plaisirs amusants, ils s'y livrent, comme la plupart des Asiatiques, avec une passion tout enfantine.

Il n'est pas de fête possible en Chine sans qu'on y voie figurer, à la grande joie du peuple, voire

même des plus graves personnages, la gent nombreuse des histrions de toutes les espèces, depuis les simples danseurs de corde et sauteurs ordinaires, ou acrobates en tous les genres, Hercules sans pareils, faiseurs de tours prodigieux de force et d'agilité, etc., jusqu'aux escamoteurs les plus émérites et « montreurs de phénomènes curieux et surprenants ». Les bateleurs chinois jouissent, au reste, d'une réputation méritée, et peuvent soutenir, par l'habileté rare qu'ils déploient dans le métier, une avantageuse comparaison avec leurs confrères de l'Europe. On pourra s'en convaincre par les exemples que nous allons citer.

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« Des Chinois, dit Isbrands Ides dans sa relation, << soutenaient sur la pointe d'un bâton des boules « de verre aussi grosses que la tête d'un homme, «< et les agitaient de différentes manières sans les «< laisser tomber. Ensuite, dix hommes, ayant pris « une canne en bambou d'environ sept pieds de long, la levèrent droite, et tandis qu'ils la soule<< vaient dans cet état, un enfant de dix ans se glissa jusqu'au sommet avec l'agilité d'un singe, << et se plaçant sur le ventre à la pointe, il s'y << tourna plusieurs fois en cercle; après quoi, « s'étant levé, il se soutint sur un pied à la même pointe, et dans cette situation il se baissa jusqu'à saisir la canne de la main ; enfin, quittant prise, il << battit d'une main contre l'autre et s'élança légère<<ment à terre, où il fit d'autres exercices de la « même agilité. »

Hüttner cite cet autre exemple de force et

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d'adresse dont il fut témoin : « Un homme se coucha " par terre et éleva ses jambes en l'air, de manière qu'il formait un L couché. Alors on posa sur la plante de ses pieds un vase de pierre très-pesant << de deux pieds et demi de haut et de dix-huit pouces de diamètre; il le fit tourner en tout << sens avec une extrême rapidité. Mais nous fumes bien plus étonnés quand nous vîmes placer sur le « vase un enfant, qui en fit le théâtre de ses jeux. Il mit son corps et ses petits membres dans des postures extraordinaires. Il se glissa ensuite la tête la première dans le vase, et se pliant d'une effrayante manière, il en sortit. S'il eût fait le « moindre faux mouvement, la chute du vase l'eût écrasé, ainsi que l'homme qui le soutenait'. »

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Van Braam a vu exécuter aussi ce tour du vase, qui, selon son estimation, pesait au moins de soixante à soixante-trois kilogrammes, puis il cite cet autre tour de force du même homme et peutêtre du même enfant : « Cet homme, couché sur le dos, tient ses jambes élevées verticalement en « l'air. Sur la plante de ses pieds est posée une « échelle composée de six larges échelons, et dont << l'extrémité inférieure est étendue et plate. Ensuite << un enfant de sept ou huit ans grimpe sur les échelons, et, assis sur celui d'en haut, il fait plusieurs singeries, tandis que l'homme tourne « l'échelle sur ses pieds, tantôt dans un sens, tantôt << dans l'autre. L'enfant descend et monte le long

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1 Voyage de Macartney, t. V, p. 149.

« des échelons, en formant autour d'eux des sinuo

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sités, de sorte que des parties de son corps se « trouvent alternativement sur une face de l'échelle « et sur la face opposée. Ce jeu a duré au moins " un quart d'heure 1. »

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Aderson, qui faisait partie de l'ambassade anglaise, rapporte de son côté le fait suivant : « Par << un mouvement imperceptible des jointures de « leurs bras et de leurs jambes, les sauteurs chinois, dit-il, semblaient donner à des vases pleins d'eau qu'ils soutenaient une force motrice au moyen << de laquelle ces vases, se mettant progressivement «< en équilibre, passaient et repassaient, sans se répandre, d'une partie du corps de l'acteur à << l'autre, avec une rapidité si extraordinaire que je « n'osais en croire le témoignage même de mes

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« propres yeux. »

Les bateleurs et baladins chinois ne le cèdent pas, on le voit, en fait de tours de force et d'agilité, à ceux d'Europe, dont ils sont assurément les devanciers. Nous n'en finirions pas si nous voulions décrire tout ce qu'ils sont aptes à faire dans cet art de la souplesse et de l'agilité; disons, pour terminer le tableau des amusements populaires des fêtes chinoises, que les théâtres enfantins de « Guignol le terrible ", de «Gringalet le triste », de la virago «< mère Gigogne », et autres célébrités de l'avenue Marigny, ont leurs pendants en Chine, et que là comme ailleurs les grotesques personnages qu'on y fait mouvoir n'attirent et ne fixent pas les regards 1 Voyage de Van Braam, t. II, p. 221.

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des seuls enfants: comme parmi nous il y a des innocents et des badauds de tout âge qui s'en amusent.

Parmi les divertissements particuliers des Chinois, la chasse est au premier rang, et ce plaisir tout royal, dont le droit est dans nos pays d'Europe si sévèrement réservé, est en Chine un plaisir pour ainsi dire banal. Le dernier des villageois peut, au gré de son adresse ou de son bon plaisir, s'emparer du gibier qui hante son domaine ou tuer l'animal qui dévaste ses moissons. Ce plaisir, que le simple paysan ne se fait pas faute de se donner à travers champs, le Chinois riche se le procure avec un égoïsme jaloux dans les vastes parcs qu'il fait clore pour mieux tenir sous sa main, et tout à la portée de ses flèches, un abondant gibier.

Les empereurs de la Chine de leur côté ont toujours passé, et c'est à juste titre, pour être entre tous les Nemrods couronnés les plus fameux et les plus passionnés. Ils font chaque année des chasses générales en Tartarie, et la suite qui les y accompagne prend souvent les proportions d'une véritable armée. Sous les anciennes dynasties, ces chasses avaient lieu aux quatre saisons; mais l'empereur Kang-hi a changé cet usage, et, dans le but de laisser aux quadrupèdes et aux oiseaux le temps de se reproduire, il a limité à deux pour toute l'année le nombre de ces expéditions cynégétiques. Ce prince à grandes vues savait joindre au plaisir de la chasse le but tout politique d'exercer l'adresse de ses soldats et de les tenir ainsi toujours préparés à la Écoutons-le guerre.

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