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ble, se fût-il réfugié sur le sein de sa mère ou dans le tabernacle du Christ.

Art. 34. Chaque tribunal secret sera compétent, non-seulement pour juger les adeptes coupables, mais encore pour faire mettre à mort toutes les personnes qu'il aura vouées à la mort.

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A cette époque le soleil du catholicisme resplendissait comme un divin météore sur l'Europe entière, car à la voix du vicaire de Jésus-Christ il s'était levé radieux pour éclairer et régler la marche de la civilisation humaine. La main de Pie IX s'était ouverte sur l'Italie pour la bénir et pour sanctifier les réformes que ses souverains venaient de lui accorder. Le nom de Pie IX retentissait sonore d'un pôle à l'autre comme un écho de Dieu; un jour même il réveilla le sultan dans son sérail! La noble et grande figure de Pie IX remplissait le monde; peuples et princes prosternés à ses pieds confondaient leurs voix et leurs cœurs dans un vaste concert d'amour et de bénédictions; la foi catholique, en passant par les lèvres et l'ame ardente de Pie IX, avait retrouvé ses plus beaux jours, enfin le catholicisme triomphait. Les membres des sociétés secrè-tes, réveillés par la voix de leur chef, s'en émurent et se relevant de toute leur hauteur dans leur haine systématique contre l'autorité, ils résolurent de combattre plus ouvertement l'influence que le chef du catholicisme avait conquise non-seulement sur l'esprit de son peuple, mais encore sur celui des populations les plus diverses et les plus lointaines du

globe. Dès lors ils marchèrent plus carrément dans la lutte; ne déguisant plus le dessein qu'ils avaient, d'arriver à la révolution par la réforme, à la licence par la liberté.

L'un d'eux, médecin obscur, homme à figure sinistre sur laquelle se reflétait la perversité de son ame, se fait journaliste. Il engage le combat avec l'idée pour le terminer avec du sang; bientôt le bu reau de son journal devient un club où l'éloge se change en déclamations furibondes, jusqu'au jour où, la plume devenant un poignard, ira briser dans la poitrine de Rossi la pensée qui seule pouvait sauver l'Italie.

Le ministre n'était plus!... mais le pape restait encore debout! Repoussant du pied un cadavre sans prendre même le temps d'essuyer le sang qui le marquait au front, Sterbini s'élance du palais de la chancellerie au palais du Quirinal. Là, d'une voix stridente, il crie: aux armes! et après quelques heures d'une lutte inégale où l'attaque, hélas! ne trouve que des prières pour défense, il oblige Pie IX à passer sur un second cadavre, pour se retirer sur la terre étrangère, et se donner à lui-même l'occasion de reprocher au Pontife une fuite qu'il avait rendue inévitable.

Alors le génie du mal planant sur la ville de Rome, ouvrit les portes à la révolution et convoqua le ban et l'arrière ban des sociétés secrètes. Les principaux chefs de Paris, d'Allemagne et d'Italie, consultés sur la forme qu'il fallait donner au gouvernement romain, répondirent par des conseils d'attitude expee

tative. Les événements correspondaient trop bien au gré de leurs désirs pour les compromettre par trop de précipitation.

Sur ces entrefaites, une catastrophe aussi subite qu'imprévue remua l'Europe jusque dans ses entrailles: un banquet, un cri de vive la réforme! et un coup de pistolet tiré sur le boulevard des Capucines, à Paris, avaient changé en quelques heures la forme gouvernementale de la France. La République avait remplacé la dynastie des d'Orléans: aux cris de détresse de l'Europe entière, les sociétés secrètes répondirent par un long cri de joie, et, dans l'espace de quelques jours, les trônes surpris, ébranlés par la peur et par une force occulte, tremblèrent sur leurs assises. Alors le poignard qui devait frapper Rossi se promenait triomphalement dans les rues de Vienne, de Berlin, de Francfort, et dans presque toutes les capitales du continent; la voix prophétique du rocher de Sainte-Hélène était devenue le mot d'ordre des conjurés; la République se préparait à bivouaquer dans le palais des rois, lorsqu'elle fut proclamée par une poignée d'hommes au Capitole.

Ces succès inespérés enflammèrent davantage encore les passions mauvaises, surexcitées par la marche belligérante de l'armée française contre Rome. Le grand prêtre des sociétés secrètes, Mazzini, persuadé que rien n'est fait tant qu'il reste quelque chose à faire, stimule le zèle de ses adeptes par un virulent article, inséré le 23 mai 1849 dans son journal intitulé: l'Italie du Peuple. Cet article est en quelque sorte le résumé de l'opuscule de Ricciardi. De

tout temps les révolutionnaires se sont calqués les uns sur les autres, en exagérant le trait, comme la révolution de février, qui s'est faite la caricature de 1793, comme la République romaine, qui s'est faite la copie servile de la révolution de février.

« Ces premiers mouvements des peuples, dit Mazzini, ces premières batailles qui se livrent dans les capitales de toute l'Europe sont à leur commencement et non à leur fin. Ce ne sont pas des changements, mais des préliminaires de changements, parce que la vraie révolution républicaine ne fait aujourd'hui que jeter ses premières flammes, et ce que les peuples voient et entendent, n'est que l'ombre des troubles qui se préparent.

la

« Les sociétés où règne l'injustice doivent être renversées jusques au fond de leurs entrailles; les nations asservies aux castes privilégiées, aux exactions des usuriers sont déjà remuées par l'instinct que civilisation imprime à la véritable fraternité sociale. L'homme se sent homme, l'humanité marche dans la voie du progrès; mais comme dans chaque accouchement il y a une opération douloureuse, les hommes, rejetant le servage des supériorités, et les supériorités voulant les retenir dans leurs liens; qui coupera ces liens? L'épée des révolutions.

« Les nations asservies reposèrent pendant des siècles dans le sein des monarchies, elles se formèrent et se nourrirent de ce sang maternel; mais aujourd'hui ce sont des créatures toutes formées qui vont surgir à la lumière de la liberté, et qu'un fer plébéien doit détacher du lien des monarchies.

« Les êtres qui naissent ne peuvent se soustraire aux lois de leurs destinées. Le chemin que parcourt le genre. humain est toujours tracé par des ruines: qui redoute les ruines ne comprend pas la vie. L'Italie tente aujourd'hui de sortir de sa douloureuse prison; elle veut rompre les liens des papes et des empereurs. L'Italie veut être l'Italie, et pourvu que ces destinées s'accomplissent, qu'il coule des fleuves de sang, que les villes s'écroulent les unes sur les autres, que les batailles succèdent aux incendies et les incendies aux batailles, n'importe!.... Que la grandeur de notre guerre terrible soit égale à la grandeur de la Rome future!

Si l'Italie ne doit pas nous appartenir, si nous devons redevenir un fief de l'Autriche, si notre peuple doit se nourrir encore des restes de la table des papes et des cardinaux, si après avoir entrevu un rayon de lumière glorieuse, nous devons retomber dans la plus abjecte servitude!... mieux vaut préparer une guerre d'extermination, la préparer de telle sorte que chaque défaite soit une destruction finale! Nous exhortons donc soldats et peuples par ce cri de guerre, nous exhortons et ces hommes valeureux qui combattent et ceux qui s'apprêtent au combat, et par-dessus tout, celui qui dirige les opérations, à suivre un plan qui ne laisse aucune de nos cités debout au pouvoir du vainqueur, que ce dernier, au contraire, ne rencontre à chaque pas que la mort.

."

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Pourquoi Bologne est-elle vaincue ? parce qu'elle a capitulé. Dans la guerre que nous faisons, on ne

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