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enivrés par leur fiévreuse éloquence et leurs fabuleux triomphes, défiaient l'Europe et jetaient le gant aux armées catholiques. Les troupes autrichiennes, après avoir envahi les frontières pontificales, assiégeaient la ville de Bologne; d'un autre côté, le général Cordova avait rejoint la première expédition espagnole débarquée à Terracine: les triumvirs répondirent ainsi aux manifestes de ces deux puissances:

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« L'Espagne nous envoie aussi, en langage hautain suivant son habitude, un insolent défi. Le chorus est donc complet, l'Autriche, la France, Naples et l'Espagne recommencent l'histoire des temps anciens et répondent à l'appel d'un pape!

"Qu'ils soient contre nous, trois ou quatre, peu importe! Rome ne déviera pas de son ferme dessein. Il y a trois siècles et demi que ces superbes agresseurs trouvèrent une Italie mourante; aujourd'hui ils trouveront une Italie qui surgit, l'Italie du peuple! »

Dans le même temps, leur journal officiel annonça, par dépêche télégraphique, une importante victoire remportée par les troupes romaines sur l'armée napolitaine. De nombreux prisonniers et plusieurs pièces de canon tombées en leur pouvoir, devaient arriver dans la soirée. Cette nouvelle, démentie le lendemain par le Moniteur lui-même, fut, pour les Romains, une véritable mystification. Une foule immense, stationnée au dehors de la porte de Saint-Jean de Latran, attendit en vain, toute la soirée, les trophées de la victoire qui se réduisit aux proportions d'un simple engagement d'avant-postes à Palestrine.

Pour donner une espèce de dédommagement à la populace, les triumvirs lui apprirent, par deux décrets officiels, que le couvent de Saint Sylvestre, tous les hôpitaux de Rome et des provinces étaient déclarés proprié

tés de la République. Le lendemain, la statue de Pasquin offrit aux regards des passants un écriteau sur lequel une main réactionnaire avait écrit:

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Réjouis-toi, bon peuple, pare-toi de ton dernier habit de fête, dépense tes dernires baïoques pour illuminer ta maison, entonne en signe d'allégresse ton chant de guerre: plus de pape! plus de roi! Réjouis-toi, ô bon peuple, car ceux qui ont remplacé le pape et qui voudraient se substituer aux rois, t'accorderont une liberté si grande, qu'après avoir pris ton dernier écu ils te laisseront celle de mourir de faim. En attendant, sois reconnaissant, ô bon peuple, autant qu'ils se montrent généreux et justes. A eux les palais de ton pape, de tes cardinaux, de tes princes; à eux les honneurs et la fortune, à toi les coups de fusil, les hôpitaux et la misère! réjouistoi donc, ô bon peuple! »

Ce pamphlet resta pendant plus d'une heure exposé aux yeux du peuple qui, tout en donnant raison à Pasquin, se rendit aux barricades pour défendre son indépendance à raison de trois francs par jour.

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CHAPITRE VINGT-TROISIÈME.

Suspension des hostilités.

De. Combat de Velletri.

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Retraite volontaire de l'armée Napolitai

Incendie des confessionnaux. Res

tauration du duc de Parme. · Prise de Bologne. Fanfaronnade

républicaine. Visites domiciliaires.

Meurtre du curé de la Mi

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Projet d'ac

nerve. Assassinats de Sainte-Calixte. Attitude de l'armée expéditionnaire. Des renforts arrivent aux Romains. commodement. - Continuation des négociations. Conseil de guer

re.

--

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Lettres pressantes du général en chef à M. de Lesseps.
Curieuse dépêche. — Patriotisme du général Oudinot.
Contre-projet. Conflit militaire et diplomatique.

lennelle.

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Ultimatum.
Scène so-

La suspension des hostilités procurait quelques jours de répit aux Romains et leur assurait la neutralité momentanée de l'armée française.

Le triumvirat n'ignorait point la première partie du contenu de cette dépêche télégraphique, en date du 10, qui par ordre du gouvernement français, lui avait été communiquée.

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Faites dire aux Romains que nous ne voulons pas nous joindre contre eux aux Napolitains.

"Poursuivez vos négociations.

"Laissez vos déclarations se répandre.

"On vous envoie des renforts.

"Attendez-les: tâchez d'entrer à Rome d'accord avec les habitants. Si vous êtes contraint d'attaquer Rome, que ce soit avec la chance de succès la plus positive.

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Dès son arrivée à Rome, M. de Lesseps s'était empressé de faire placarder cette dépêche sur tous les murs de la ville.

La nouvelle attitude du gouvernement français, la convention Lesseps, arrêtée en dehors de l'armée napolitaine et paralysant les sympathies du général Oudinot, résolu cependant à ne fairé aucun mouvement rétrograde, changèrent aussitôt les dispositions militaires du roi des DeuxSiciles. Dans la prévision des événements qui, d'un moment à l'autre, pouvaient surgir à Paris et révolutionner davantage encore la politique de la république française, cet auguste monarque rappelé d'une part à Gaëte par des lettres pressantes du souverain pontife, et craignant d'un autre côté l'action combinée de la France et de Rome, se décida à rentrer dans ses États. En conséquence, le 17 mai, l'armée napolitaine reçut l'ordre de quitter les positions qu'elle occupait à Albano. Elle abandonna cette ville à deux heures pour se porter sur Ariccia où le roi, marchant à l'arrière-garde, la rejoignit dans la soirée. A deux heures du matin, l'armée, après avoir pourvu à l'évacuation des magasins, continuà son mouvement sur Velletri.

Elle commençait à s'y établir lorsqu'elle apprit par ses éclaireurs qu'un corps de dix mille Romains arrivait à Palestrine et continuait à marche forcée son mouvement sur Velletri. ::

La cavalerie, les équipages et presque toute l'artillerie sortirent de la ville et bivouaquèrent à la porte de Naples.

Le 19, au matin, tout était paisible dans la ville et le roi donnait les derniers ordres pour continuer le mouvement de ses troupes lorsque des hauteurs où le palais du délégué se trouve situé, on aperçut un gros de cavalerie se diriger par la route de Valmontone sur 'Velletri. C'était l'avant-garde des bandes de Garibaldi. Peu de temps après, les troupes romaines commandées par le général Roselli prenaient position à travers les arbres de ces fertiles campagnes. Le roi, avec le calme, dont il a fait preuve dans toutes les circonstances difficiles de son règne, prit aussitôt ses dispositions pour arrêter l'ennemi et manœuvrer de manière à ne pas être coupé dans son mouvement de retraite.

Velletri, célèbre par la victoire de Charles III de Bourbon, est située sur le sommet d'une montagne où conduisent des rampes ornées de vignes et d'oliviers. La base de cette montagne est coupée par trois routes reliant trois magnifiques vallées, au mont Artemisio. Vis-à-vis de la porte romaine s'élève la colline des Capucins, au pied de laquelle partent deux routes, l'une desservant Valmontone, l'autre conduisant à Gensano et Ariccia. La tradition militaire et la nature topographique du terrain font de cette colline la clef de Velletri; c'est là que l'armée napolitaine prit ses positions. D'après les ordres du roi, le maréchal de champ Casella, qui se trouvait à l'avant-garde, détacha un escadron de dragons pour aller reconnaître l'ennemi, en même temps il disposa sur les hauteurs un cordon des chasseurs de la garde. Un bataillon d'infanterie et un détachement de chasseurs à cheval, commandé par le lieutenant Oscar Muzzitelli, jeune officier de grande espérance, se disposant en bon ordre sur les bords de la route et dans les vignes voisines, engagèrent le combat avec les troupes romaines, qui l'acceptèrent, Dans ce moment, le major Colonna, à la tête des chasseurs à cheval, char

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