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mission mixte les dégâts occasionnés aux monuments artistiques par les nécessités de la guerre; mais avant, l'établissement des soldats était l'objet de son incessante sollicitude. Privé de la ressource des casernes encombrées par les troupes pontificales, il fit établir les divers corps dans les couvents et les palais; enfin, de concert avec la municipalité romaine, il prit toutes les mesures qu'il crut indispensables au bien-être de l'armée. Comprenant l'impossibilité de conserver aux députés des pouvoirs incompatibles avec le nouvel état de choses, il avait, dès le second jour de l'entrée à Rome, dissous l'Assemblée constituante. Le détachement d'infanterie chargé de s'emparer du local réservé à cette assemblée, n'avait pas trouvé les députés à leurs places; quelques membres seulement travaillaient dans la salle des séances à la vue des soldats français, ils comprirent de suite l'objet de leur expédition, l'un d'eux alors, Quirico Filipanti, revêtant ses insignes de représentant, rédigea la déclaration suivante:

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« Au nom de Dieu et du peuple des États-Romains, qui nous a librement élus ses représentants.

"Au nom de l'article V de la Constitution de la république française, l'Assembléc constituante romaine proteste devant l'Italie, devant la France et devant le monde civilisé, contre l'invasion violente de sa résidence, opérée par les troupes françaises le 4 juillet 1849, à sept heures du soir.

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Depuis le 17 juin l'Assemblée constituante avait transféré, de la Chancellerie au Capitole, le lieu de ses séances, trop rapproché du théâtre de la guerre.

Le jour même de son entrée à Rome, le général Oudinot, voulant donner aux troupes du génie un témoignage de sa satisfaction, avait confié au colonel Niel, chef d'état-major de cette arme, la mission de porter au souverain Pontife, avec les clefs de Rome, une lettre officielle annonçant la nouvelle de la cessation des hostilités. Cet officier supérieur embarqué sur le Tibre et promptement arrivé à Gaëte, avait été immédiatement introduit auprès du Saint Père. A sa vue, la joie et la satisfaction de Pie IX avaient rayonné sur son front à travers un nuage de larmes; le saint Pontife apprenait enfin la délivrance de son peuple, la guerre était finie, le sang ne coulerait plus, il était heureux. Oh! parlez-moi de mes fils de Rome et de France, s'était-il écrié; combien ils ont dû souffrir! combien j'ai prié pour eux! et il avait écouté avec un intérêt tout paternel le récit des souffrances de l'armée française, le détail de ses travaux, prolongés dans le seul but d'épargner à la ville sainte des désastres irréparables. Enfin, ne pouvant plus maitriser son émotion, le souverain pontife s'était exprimé ainsi :

"Colonel, je l'ai dit souvent en d'autres occasions et je suis heureux de pouvoir le répéter aujourd'hui après un si grand service, c'est sur la France que j'ai toujours compté. La France ne m'avait rien promis, mais je sentais qu'au moment opportun elle donnerait à l'Église ses trésors, son sang, et, ce qui est peut-être plus difficile pour ses valeureux fils, ce courage contenu, cette persévérante patience auxquels je dois qu'on ait conservé intacte ma ville de Rome, ce trésor du monde, cette cité si aimée, si éprouvée, vers laquelle, pendant l'exil, mon cœur et més regards pleins d'angoisses furent toujours tournés. Dites au général en chef, à tous les généraux sous ses ordres, à tous les officiers, et je voudrais que

cela pût être dit à chaque soldat de la France, que mareconnaissance est sans bornes; mes prières pour la prospérité de votre patrie en seront plus ferventes. Quant à mon amour pour les Français, il est devenu plus vif, si cela est possible, après les services qu'ils m'ont rendus. Quant à vous, colonel, je serais heureux de pouvoir vous donner une preuve de mon estime particulière.

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A ces mots, le pape présenta au colonel un magnifique chapelet, disant: « Voilà pour l'épouse chrétienne; » et il ajouta, en décorant l'officier supérieur de la croix de commandeur de saint Grégoire-le-Grand: « Voilà pour le vaillant guerrier.

Cet entretien avait duré près de deux heures, pendant lesquelles Pie IX remit au colonel Niel, pour le commandant en chef de l'armée française, une lettre autographe ainsi conçue:

"Monsieur le général,

«La valeur bien connue des armes françaises soutenues par la justice de la cause qu'elles défendaient a recueilli le fruit dû à de telles armes: la victoire. Acceptez, monsieur le général, mes félicitations pour la part principale qui vous est due dans cet événement, félicitations non pas pour le sang répandu, ce que mon cœur abhorre, mais pour le triomphe de l'ordre sur l'anarchie, pour la liberté rendue aux personnes chrétiennes et honnêtes, pour lesquelles ce ne sera plus un délit de jouir des biens que Dieu leur a départis et de l'adorer avec la pompe religieuse du culte, sans courir le danger de perdre la vie ou la liberté. Sur les graves difficultés qui pourront se présenter par la suite, je me confie dans la protection divine. Je crois qu'il ne sera pas inutile à l'armée française de connaître l'histoire des événements qui se sont succédé pendant mon pontificat. Ils sont relatés

dans mon allocution dont vous avez connaissance, monsieur le général, mais dont je vous remets néanmoins un certain nombre d'exemplaires pour qu'elle puisse être communiquée à ceux auxquels vous jugerez utile de la faire connaître. Cette pièce prouvera suffisamment que le triomphe de l'armée est remporté sur les ennemis de la société humaine, et votre triomphe devra, par cela même, éveiller des sentiments de gratitude dans tout ce qu'il y a d'hommes honnêtes dans l'Europe et dans le monde entier.

« Le colonel Niel qui, avec votre dépêche très-honorée, m'a présenté les clefs de Rome, vous remettra la présente. C'est avec beaucoup de satisfaction que je profite de cet intermédiaire pour vous exprimer mes sentiments d'affection paternelle et l'assurance des prières que j'adresse continuellement au Seigneur pour vous, pour l'armée française, pour le gouvernement et pour toute la France.

Recevez la bénédiction apostolique que je vous donne de cœur.

Datum Cajctæ, die 5 julii 1849.

" PIUS P. P. IX. »

Le général en chef avait également remis au colonel Niel une lettre pour le roi des Deux-Siciles, par laquelle il lui annonçait le succès définitif des armes françaises. Le roi Ferdinand II se trouvait alors à Naples. Le colonel s'empressa de s'y rendre; et reçut de Sa Majesté souveraine l'accueil le plus empressé. Ces deux missions remplies, il revint immédiatement à Rome.

CHAPITRE VINGT-SEPTIÈME.

Lettre du président de semblée nationale.

Aspect de Rome.

mission provisoire. Détails.

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Discipline.

Com

Scène du Café Neuf.
Rétablissement de l'autorité temporelle du pape.

Proclamation pontificale.

Alors l'entrée triomphante de l'armée française dans Rome était connue à Paris. La nouvelle de cette victoire remportée par les soldats de l'ordre sur l'anarchie organisée fut un coup de foudre pour les prétendus patriotes qui ostensiblement faisaient des vœux pour le triomphe des idées révolutionnaires. En revanche, tout ce qui possédait un cœur français s'applaudit hautement d'un fait qui ajoutait une brillante page à l'histoire politique et militaire de la patrie.

Le président de la république s'empressa d'écrire au commandant en chef la lettre suivante:

« Mon cher général,

« Je suis heureux de vous féliciter du résultat que vous avez obtenu en entrant dans Rome malgré la vive résistance de ceux qui s'y défendaient. Vous avez maintenu

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