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mais je craindrois de me trop échauffer je n'en ai nul besoin. Je m'en vais guérir paisiblement mes mains pendant ces vendanges; je reçois ces marques d'amitié avec plaisir, mais je ne veux point lui obéir : j'ai bien des auteurs graves de mon parti, et ce qui vaut mieux que tout, c'est que je me porte bien.

Quanto n'a point été un jour à la comédie, ni joué deux jours. On veut tout expliquer; on trouve toutes les Dames belles, c'est qu'on est trop fin: la belle des belles est gaie, c'est un bon témoignage. Madame de Maintenon est revenue; elle promet à Madame de Coulanges un voyage pour elle toute seule cette espérance ne lui fait pas tourner la tête; elle l'attend fort patiemment à Livry : elle a mille complaisances pour moi.Le Maréchal d'Albret se meurt. Le d'Hacqueville vous dira les nouvelles de gazette, et comme nous avons pris du canon et de la poudre.

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La Mitte n'a point de ramier, au moins de la grande volée. Savez-vous bien qu'elle est assez sotte? Cela n'attire point les chalands. M. de Marsillac est allé en Poitou avec Gourville : M. de la Rochefoucauld va les trouver; c'est un voyage * Madame de Senneterre.

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d'un mois. Mais, ma fille, commencez un peu à me parler du vôtre; n'êtes-vous pas toujours dans le dessein de partir de votre côté, quand votre mari partira du sien? C'est cette avance qui fait toute votre commodité et toute ma joie. J'approuve vos bains, ils vous empêchent d'être pulvérisée; rafraîchissez-vous, et apportez-nous toute votre santé.

LETTRE 453.

A la même.

à Paris, mardi au soir 8 Septembre 1676.

JE couche à Paris, ma très-chère. Je suis

venue ce matin dîner chez Madame de Villars pour lui dire adieu; il n'y a plus de raillerie, elle s'en va jeudi, et quoiqu'elle ait fort envie de savoir le petit mot que vous avez à lui dire, elle ne vous attendra point. Elle n'attend pas même que cette Lieutenance de Languedoc soit donnée, quoiqu'on dise qu'elle y a très-honne part. Elle s'en va trouver son mari, et jouer son personnage dans une autre Cour. Madame de SaintGéran (1) paroît triste de cette séparation;

(1)Françoise-Madeleine-Claude de Warignies, ComLesse de Saint-Géran.

elle demeure accompagnée de sa vertu, et soutenue de sa bonne réputation, La moitié du monde écrit qu'elle ne sera pas difficile à consoler. Pour moi, je pense qu'elle regrette de bonne foi une si douce et si agréable compagnie. Madame de Villars m'a chargée de mille et mille tendresses pour vous: je regrette fort cette maison. Madame de Coulanges étoit avec moi; elle reviendra à Livry dès qu'elle aura été à Châville pour une affaire. Je ne suis point en peine du séjour qu'elle fait à Livry; la complaisance n'y a nulle part : elle est ravie d'y être : elle est d'une bonne société; nous sommes fort loin de nous ennuyer. Corbinelli y est souvent, Brancas, Coulanges, et mille autres qui vont et viennent. Nous trouvâmes l'autre jour au bout du Petit-Pont l'Abbé de Grignan et l'Abbé de Saint-Luc. Je m'en retournerai demain dès le matin dans ma forêt. Corbinelli a trouvé mon petit Médecin très-habile. La poudre du bon homme m'a fait beaucoup de bien ; je m'en vais prendre tous les matins une pilule pendant quelques jours, pour empêcher les sérosités qui s'amassèrent l'année passée sur mon pauvre corps; le remède est spécifique; et puis je mettrai mes mains en pleine vendange, et ne cesserai point les remèdes qu'elles ne

soient guéries, ou qu'elles né disent qu'elles ne veulent pas. Je me porte très-bien du reste, et mes petits voyages de Paris me font un plaisir plutôt qu'une fatigue. Je ne prends point le serein, et pour la lune, je ferme les yeux en passant devant le jardin, pour éviter la tentation del demonio. Enfin, vous me persuadez si bien que ma santé est une de vos principales affaires, que, dans cette vue, je la conserve et la ménage, comme une chose que vous aimez et qui est à vous; soyez persuadée que je vous en rendrai un très-bon compte. Mon fils me mande que les frères de Ripert ont fait des prodiges de valeur à la défense de Maestricht : j'en fais mes complimens au Doyen et à Ripert.

Mercredi matin.

Je n'ai pas trop bien dormi, mais je met porte bien, et je m'en retourne seule dans ma forêt, avec une impatience et une espérance de vous voir, qui sont continuellement les deux points de mon discours, c'est à-dire, de ma rêverie; car je sais, comme il faut, ménager aux autres ce que nous avons dans la tête.

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LETTRE 454.

A la même.

à Paris, vendredi 11 Septembre 1676.

Vous me parlez bien plaisamment de notre Coadjuteur. Vous avez donc repris les libertés dont nous usions l'année que j'étois à Grignan; quel tourment nous lui faisions sur ces contes, que M. de Grignan disoit que le Coadjuteur pouvoit porter hardiment partout, sans crainte de la gabelle! Je n'ai jamais vu personne entendre si parfaitement la raillerie. Nous pensons que M. de V....* ne l'entend pas si bien, lui qui, à ce que dit Madame Cornuel (1), a mis un bon Suisse à sa porte ; c'est qu'on assure qu'il a donné une belle maladie à sa femme. Il y eut l'autre jour une vieille trèsdécrépite qui se présenta au dîner du Roi, elle faisoit frayeur. MONSIEUR la repoussa, et lui demanda ce qu'elle vouloit: Hélas! Monsieur, lui dit-elle, je voudrois bien prier le Roi de me faire parler à M. de Louvois, Le Roi lui dit: Tenez, voilà M. de

* M. de Vantadour. Voyez les Amours des Gaules. (1) Madame Cornuel s'étoit fait une réputation par ses bons mots,

Rheims

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