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ans de la nation une somme considérable pour les intérêts.

2o. Dans une nation ainsi perpétuellement débitrice, le change doit être très-bas.

3o L'impôt levé pour le paiement des intérêts de la dette fait tort aux manufactures en rendant la main de l'ouvrier plus chère.

4°. On ôte les revenus véritables de l'état à ceux qui ont de l'activité ou de l'industrie, pour les transporter aux gens oisifs; c'est-à-dire, qu'on donne des commodités pour travailler à ceux qui ne travaillent point, et des difficultés pour travailler à ceux qui travaillent.

Voilà les inconvénients; je n'en connois point les avantages. Dix personnes ont chacune mille écus de revenus en fonds de terre ou en industrie; cela fait pour la nation, à cinq pour cent, un capital de deux cents mille écus. Si ces dix personnes emploient la moitié de leur revenu, c'est-à-dire, cinq mille écus, pour payer les intérêts de cent mille écus qu'elles ont empruntés à d'autres, cela ne fait encore pour l'état que deux cents mille écus; c'est, dans le langage des algébristes, 200,000 écus, 100,000 écus + 100,000 écus 200000 écus.

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Ce qui peut jeter dans l'erreur, c'est qu'un papier qui représente la dette d'une nation est un signe de richesses; car il n'y a qu'un état riche qui puisse soutenir un tel papier sans tómber dans la décadence; que, s'il n'y tombe pas il faut que l'état ait de grandes richesses d'ailleurs,

On dit qu'il n'y a point de mal, parce qu'il y a des ressources contre ce mal; et on dit que le mal est un bien, parce que les ressources surpassent le mal.

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CHAPITRE XVIII.

Du paiement des dettes publiques.

Il faut qu'il y ait une proportion entre l'état

créancier et l'état débiteur. L'état peut être créancier à l'infini, mais il ne peut être débiteur qu'à un certain gré; et, quand on est parvenu à passer ce degré, le titre de créancier s'évanouit.

Si cet état a encore un crédit qui n'ait point reçu d'atteinte, il pourra faire ce qu'on a pratiqué si heureusement dans un état a d'Europe: c'est de se procurer une grande quantité d'espèces, et d'offrir à tous les particuliers leur remboursement, à moins qu'ils ne veulent réduire l'intérêt. En effet, comme lorsque l'état emprunte, ce sont les particuliers qui fixent le taux de l'intérêt; lorsque l'état veut payer, c'est à lui à le fixer.

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Il ne suffit pas de réduire l'intérêt, il faut que le bénéfice de la réduction forme un fonds d'amortissement pour payer chaque année une partie des capitaux ; opération d'autant plus

a L'Angleterre.

heureuse

jours.

, que le succès en augmente tous les

Lorsque le crédit de l'état n'est pas entier c'est une nouvelle raison pour chercher à former un fonds d'amortissement, parce que ce fonds, une fois établi, rend bientôt la confiance,

1o. Si l'état est une république, dont le gouvernement comporte par sa nature que l'on y fasse des projets pour long-temps, le capital du fonds d'amortissement peut être peu considérable : il faut, dans une monarchie, que ce capital soit plus grand.

2o. Les réglements doivent être tels que tous les citoyens de l'état portent le poids de l'établis sement de ce fonds, parce qu'ils ont tout le poids de l'établissement de la dette; le créancier de l'état, par les sommes qu'il contribue, payant luimême à lui-même.

3o. Il y a quatre classes de gens qui paient les dettes de l'état; les propriétaires de fonds de terre, ceux qui exercent leur industrie par le négoce, les laboureurs et artisans, enfin les rentiers de l'état ou des particuliers. De ces quatre classes, la dernière, dans un cas de nécessité, sembleroit devoir être la moins ménagée, parce que c'est une classe entièrement passive dans l'état, tandis que ce même état est soutenu par la force active des trois autres. Mais, comme on ne peut la charger plus sans détruire la confiance publique dont l'état en général et ces trois classes en particulier ont un souverain besoin; comme la

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foi publique ne peut manquer à un certain nombre de citoyens sans paroître manquer à tous; comme la classe des créanciers est toujours la plus exposée aux projets des ministres, et qu'elle est toujours sous les yeux et sous la main, il faut que l'état lui accorde une singulière protection, et que la partie débitrice n'ait jamais le moindre avantage sur celle qui est créancière.

CHAPITRE X I X.

L'ARGEN

Des prêts à intérêt.

ARGENT est le signe des valeurs. Il est clair que celui qui a besoin de ce signe doit le louer, comme il fait toutes les choses dont il peut avoir besoin. Toute la différence est que les autres choses peuvent ou se louer ou s'acheter; au lieu que l'argent, qui est le prix des choses, se loue et ne s'achète pas 2.

C'est bien une action très-bonne de prêter à un autre son argent sans intérêt; mais on sent que ce ne peut être qu'un conseil de religion, et non une loi civile.

Pour que le commerce puisse se bien faire, il faut que l'argent ait un prix, mais que ce prix soit peu considérable. S'il est trop haut, le négociant, qui voit qu'il lui en coûteroit plus en intérêts qu'il ne pourroit gagner dans son commerce,

a On ne parle point des cas où l'or et l'argent sont considérés comme marchandises.

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n'entreprend rien: si l'argent n'a point de prix, personne n'en prête, et le négociant n'entreprend rien non plus.

Je me trompe quand je dis que personne n'en prête. Il faut toujours que les affaires de la société aillent; l'usure s'établit, mais avec les désordres que l'on a éprouvés dans tous les temps.

La loi de Mahomet confond l'usure avec le prêt à intérêt. L'usure augmente dans les pays mahométans à proportion de la sévérité de la défense le prêteur s'indemnise du péril de la contravention.

Dans ces pays d'Orient, la plupart des hommes n'ont rien d'assuré; il n'y a presque point de rapport entre la possession actuelle d'une somme, et l'espérance de la ravoir après l'avoir prêtée : l'usure y augmente donc à proportion du péril de l'insolvabilité..

CHAPITRE XX.

Des usures maritimes.

LA grandeur de l'usure maritime est fondée

sur deux choses: le péril de la mer, qui fait qu'on ne s'expose à prêter son argent que pour en avoir davantage, et la facilité que le commerce donne à l'emprunteur de faire promptement de grandes affaires et en grand nombre: au lieu que les usures de terre, n'étant fondées sur aucune de ces deux raisons, sont ou prescrites par les

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