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des biens une partie des hommes qui devoient faire ce partage. La loi civile qui restitue sur les contrats qui contiennent quelque lésion, ne peut s'empêcher de restituer contre un accord qui contient la lésion la plus énorme de toutes.

La troisième manière, c'est la naissance. Celleci tombe avec les deux autres; car si un homme n'a pu se vendre, encore moins a-t-il pu vendre son fils qui n'étoit pas né; si un prisonnier de guerre ne peut être réduit en servitude, encore moins ses enfants.

Ce qui fait que la mort d'un criminel est une chose licite, c'est que la loi qui le punit a été faite en sa faveur. Un meurtrier, par exemple, a joui de la loi qui le condamne; elle lui a conservé la vie à tous les instants: il ne peut donc pas réclamer contre elle. Il n'en est pas de même de l'esclave la loi de l'esclavage n'a jamais pu lui être utile; elle est dans tous les cas contre lui, sans jamais être pour lui; ce qui est contraire au principe fondamental de toutes les sociétés.

On dira qu'elle a pu lui être utile, parce que le maître lui a donné la nourriture. Il faudroit donc réduire l'esclavage aux personnes incapables de gagner leur vie. Mais on ne veut pas de ces esclaves-là. Quant aux enfants, la nature, qui a donné du lait aux mères, a pourvu à leur nourriture; et le reste de leur enfance est si près de l'âge où est en eux la plus grande capacité de se rendre utiles, qu'on ne pourroit pas dire que celui qui les nourriroit, pour être leur maître, donnât rien.

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L'esclavage est d'ailleurs aussi opposée au droit civil qu'au droit naturel. Quelle loi civile pourroit empêcher un esclave de fuir, lui qui n'est point dans la société, et que par conséquent aucunes lois civiles ne concernent? Il ne peut être retenu que par une loi de famille, c'est-à-dire par la loi du maître.

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СНАРITRE

I I I.

Autre origine du droit de l'esclavage.

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'AIMEROIS autant dire que le droit de l'esclavage vient du mépris qu'une nation conçoit pour une autre, fondé sur la différence des coutumes. Lopes de Gama a dit que les Espagnols trouvèrent près de Sainte-Marthe des paniers où les habitans avoient des denrées; c'étoient des cancres, des limaçons, des cigales, des sauterelles. Les vainqueurs en firent un crime aux ,, vaincus. L'auteur avoue que c'est là-dessus qu'on fonda le droit qui rendoit les Américains esclaves des Espagnols, outre qu'ils fumoient du tabac, et qu'ils ne se faisoient pas la barbe ǎ l'espagnole.

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Les connoissances rendent les hommes doux; la raison porte à l'humanité: il n'y a que les préjugés qui y fassent renoncer.

a Biblioth. angl. tome XII, part. II, art. 3.

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CHAPITRE IV.

'Autre origine du droit de l'esclavage.

'AIMEROIS autant dire que la religion donne à ceux qui la professent un droit de réduire en servitude ceux qui ne la professent pas, pour travailler plus aisément à sa propagation.

Ce fut cette manière de penser qui encouragea les destructeurs de l'Amérique dans leurs crimes a. C'est sur cette idée qu'ils fondèrent le droit de rendre tant de peuples esclaves; car ces brigands qui vouloient absolument être brigands et chrétiens, étoient très-dévots.

Louis XIII b se fit une peine extrême de la loi qui rendoit esclaves les Nègres de ses colonies; mais quand on lui eut bien mis dans l'esprit que c'étoit la voie la plus sûre pour les convertir, il y consentit.

a Voyez l'histoire de la conquête du Mexique, par Solis et celle du Pérou, par Garcilasso de la Vega.

b Le P. Labat, nouveau Voyage aux îles de l'Amerique, tome IV, page 114, an 1722, in-12.

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De l'esclavage des Nègres.

Si j'avois à soutenir le droit que nous avons eu

de rendre les Nègres esclaves, voici ce que je dirois :

Les peuples d'Europe ayant exterminé ceux de l'Amérique, ils ont dû mettre en esclavage ceux de l'Afrique, pour s'en servir à défricher tant de terres.

Le sucre seroit trop cher, si l'on ne faisoit travailler la plante qui le produit par des esclaves.

Ceux dont il s'agit, sont noirs, depuis les pieds jusqu'à la tête; et ils ont le nez si écrasé, qu'il est presque impossible de les plaindre.

On ne peut se mettre dans l'esprit que Dieu, qui est un être très-sage, ait mis une ame, sur-tout une ame bonne, dans un corps tout noir.

Il est si naturel de penser que c'est la couleur qui constitue l'essence de l'humanité, que les peuples d'Asie qui font des eunuques, privent toujours les noirs du rapport qu'ils ont avec nous, d'une façon plus marquée. ..

On peut juger de la couleur de la peau par celle des cheveux, qui, chez les Égyptiens, les meilleurs philosophes du monde, étoient d'une si grande conséquence, qu'ils faisoient mourir tous les hommes roux qui leur tomboient entre les mains.

Une

Une preuve que les Nègres n'ont pas le sens commun, c'est qu'ils font plus de cas d'un collier de verre que de l'or qui, chez des nations policées, est d'une si grande conséquence.

Il est impossible que nous supposions que ces gens-là soient des hommes, parce que, si nous les supposions des hommes, on commenceroit à croire que nous ne sommes pas nous-mêmes chrétiens,

De petits esprits exagèrent trop l'injustice que l'on fait aux Africains; car, si elle étoit telle qu'ils le disent, ne seroit-il pas venu dans la tête des princes d'Europe, qui font entre eux tant de conventions inutiles, d'en faire une générale en faveur de la miséricorde et de la pitié?

CHAPITRE VI.

Véritable origine du droit de l'esclavage.

Il est temps de chercher la vraie origine du

droit de l'esclavage. Il doit être fondé sur la nature des choses: voyons s'il y a des cas où il en dérive.

Dans tout gouvernement despotique on a une grande facilité à se vendre; l'esclavage politique y anéantit en quelque façon la liberté civile.

M. Perry a dit que les Moscovites se vendent très-aisément. J'en sais bien la raison, c'est que leur liberté ne vaut rien.

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IZI7, in-12.

présent de la Grande Russie, par Jean Perry. Paris,

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