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» des leurs (1) »? Ainsi, comme dit Vincent de Lérins (2), il arriva dans cette occasion, «< comme » il arrive dans toutes les autres : l'antiquité fut » reconnue et la nouveauté rejetée ». Que s'il fallut des conciles, ce n'est pas, comme le ministre semble l'inférer; ce n'est pas, dis-je, pour établir une chose nouvelle, mais pour déclarer et confirmer authentiquement la tradition ancienne. Et quand, après les conciles, on a rebaptisé les Marcionites et les Ariens, c'est que ces Marcionites et ces Ariens s'éloignoient de la forme solennelle et toujours reçue dans l'Eglise, comme il seroit aisé de le montrer; de sorte que la tradition anéantissoit autant leur Baptême, qu'elle confirmoit celui des hérétiques qui baptisoient selon la forme reçue. Que ceux qui méprisent cette tradition nous rendent raison de leur foi: qu'ils nous disent sur quoi ils se fondent pour accepter le Baptéme des hérétiques et des faux pasteurs, qui n'ont qu'une apparence de vocation. Quand je demande aux ministres sur quoi ils appuient cette tradition de leur Discipline, qui, pour valider le Baptême, se contente de cette apparence de vocation, M. de la Roque croit me répondre, en disant, «< que cette expres»sion désigne une vocation, qui, pour n'être » pas parfaite dans toutes ses parties, ne laisse » pas d'être suffisante pour l'administration du » Baptême (3)». Mais ce n'étoit pas assez de le dire,

(1) Hier. Dial. adv. Lucif. tom. IV, col. 294 et 306. — (2) Vinc.. Lirin. 1 Comm. P. 331. (3) La Roque, pag. 162.

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il falloit le prouver par quelque passage. Il falloit, dis-je, prouver par quelques passages, qu'une vocation imparfaite et même trompeuse, telle qu'elle est dans les hérétiques déclarés, est suffisante pour administrer le sacrement de Baptême, encore que Jésus-Christ n'en ait confié l'administration qu'à ses disciples véritables, et qu'il avoit lui-même appelés. Allez, leur dit-il (1), enseignez et baptisez. Mais je vois bien que ce que les ministres ont eu dans l'esprit, quand ils ont agréé le Baptême donné par ceux qu'ils pensent hérétiques; c'est qu'en effet ils nous croient tels, hérétiques et pires qu'hérétiques, puisqu'ils nous croient idolâtres. Si donc ils avoient rejeté le Baptême donné par ceux qu'ils rejettent comme hérétiques, ils seroient contraints d'avouer qu'ils ne seroient pas baptisés, eux dont les pères n'ont reçu que de nous le saint Baptême. Les voilà donc encore une fois réduits à n'avoir aucune certitude de leur Baptême, que sur la foi de la tradition et sur le fondement de l'autorité de l'Eglise.

Mais avant que de sortir de cette matière du Baptême, voyons encore ce qu'on répondra sur cette difficulté proposée dans le Traité de la Communion (2): D'où vient que « le Fils de >> Dieu n'ayant donné la charge d'administrer le » Baptême qu'aux apôtres, c'est-à-dire, aux » chefs du troupeau, toute l'Eglise a entendu >> non-seulement que les prêtres, mais encore les » diacres, et même tous les fidèles en cas de né

>>

(1) Matt. xxvii. 19.—(3) Tr. de la Communion, p. 554.

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» cessité, étoient tous les ministres de ce sacre»ment »? Se trouvera-t-il ici quelque passage de l'Ecriture, qui leur ait donné ce pouvoir? Il ne s'en trouvera aucun. C'est pourquoi M. de la Roque décide sans hésiter « que les ministres » du sacrement de Baptême, sont les seuls mi»nistres de la parole, Jésus-Christ ayant joint » ces deux fonctions; instruisez les nations en » les baptisant »; d'où il infère « que les laïques » et les simples particuliers n'ont pas droit de » baptiser, comme on l'assure (1) ». Il falloit ici distinguer le droit ordinaire d'avec le cas de nécessité, où tout le monde étoit réputé ministre légitime du Baptême. C'est aussi ce que nous avoue de bonne foi l'auteur de la seconde Réponse. « On demeure d'accord, dit-il (2), que » pour conserver le bon ordre', et éviter la confusion, c'est aux pasteurs à qui le peuple et » l'Eglise confie l'autorité du ministère, et celle » d'administrer seuls les sacremens de Jésus» Christ; car dans la nécessité tout fidèle jouit » de ce même droit ». Il a raison pour le Baptême; la tradition l'a décidé sans aucune autorité de l'Ecriture, et je puis dire à cet égard que la tradition est constante.

Ces remarques sur le Baptême nous font voir dans un cas semblable ce qu'il faut croire de l'Eucharistie. Car si l'Eglise suffit pour nous donner notre sûreté touchant l'un de ses sacremens, elle n'est pas moins forte à l'égard de l'autre. Voilà (1) La Roque, p. 159. — (2) Anon. p. 97.

ce que nous concluons de ces argumens tant méprisés par nos adversaires, qu'ils appellent des argumens de missionnaires, de vieux argumens, des argumens rebattus. Mais loin que ces reproches en affoiblissent la force, ils servent à faire voir qu'il n'y a pas moyen d'y résister; puisque tous les Protestans, après avoir eu le loisir d'y bien songer, depuis près d'un siècle qu'on les fait, ne savent encore qu'y répondre ; et n'y peuvent rien opposer de solide, ni même s'accorder

entre eux.

CHAPITRE III.

Second argument tiré de l'Eucharistie. Les Protestans n'observent point dans la célébration de la Cène ce que Jésus-Christ a fait, et ils omettent plusieurs choses importantes.

MAIS après avoir si mal répondu sur l'institution du Baptême, ils vont encore répondre plus mal, et se déconcerter plus visiblement sur l'institution de l'Eucharistie. Le principe dont ils se servent, est que ces paroles, Faites ceci (1), nous obligent à tout ce que Jésus-Christ a fait : principe aussi faux qu'il est spécieux, comme on le va bientôt voir de leur aveu propre.

Et premièrement M. Jurieu pousse la chose bien loin, quand il dit que ces paroles de notre Seigneur, Faites ceci, nous obligent à considé(1) Luc. XXII. 19.

rer toutes les circonstances qu'il a observées comme étant de la dernière nécessité (1). M. Jurieu se fortifie de l'exemple des sacremens de l'ancienne loi, où les moindres circonstances étoient essentielles et indispensables. Ce ministre conclut de là qu'il en faut croire autant de l'Eucharistie; et que lorsque le Sauveur dit, Faites ceci, c'est de même que s'il disoit : Désormais quand vous célébrerez ce sacrement, faites tout ce que je viens de faire. En effet, il faut pousser la chose jusque-là, pour conclure quelque chose; et la moindre exception que l'on voudroit opposer, par son propre sens, à une loi générale, en rendroit l'observance arbitraire. Voilà donc apparemment un beau principe, et d'une étendue bien générale; mais les ministres vous vont faire voir qu'il y a beaucoup à en rabattre. Quand M. de la Roque a vu ce principe de M. Jurieu dans mon Traité de la Communion, il a vu en même temps qu'il le falloit restreindre. « Par ces circonstances, dit» il (2), qui sont de la dernière nécessité, M. Ju» rieu entend simplement celles qui appartien» nent à la substance du sacrement, et non pas » celles qui ne sont pas de son essence ». Quelle réponse! C'est de quoi nous disputons. On est d'accord entre nous qu'il faut faire tout ce qui est de l'essence du sacrement; nous disputons pour savoir ce qui en est, ou ce qui n'en est pas, et nous demandons qu'on nous trouve ici une (1) Examen de l'Euch. Tr. vi, sect. v, p. 465, et sect. vi, p. 474. · (2) La Roq. II. part. ch. vii, p. 306.

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