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LE MARCHE.

Dépêchez-vous de préparer le déjeûner, ensuite vous irez au marché. Que voulez-vous que j'achète aujourd'hui ? - Nous aurons quelqu'un à dîner; il nous faudra de la volaille, avec une pièce de gibier. — Vous ne voulez pas de poisson? Vous pourrez prendre un morceau de saumont, s'il n'est pas trop cher, ou bien un maquereau. Vous n'aimez pas la raie? — Si; mais il faut qu'elle soit si fraîche pour être bonne ! Avant le dîner, vous offrirez aux Dames un verre de lait de poule, et aux Messieurs, une absinthe légère. La tourte que vous avez commandée chez le confiseur, servira d'entrée; pour entremets, des légumes, avec une friture de chaque côté, seront suffisants. Vous garderez les œufs au lait pour le dernier service. Il faut quelque chose pour le dessert. Vous achèterez quelques chopinées de fraises, comme il n'y a pas de fruit à présent; et puis nous aurons de la compote, de la crême, et des confitures. Au reste, faites pour le mieux, vous avez carte blanche. Echo.

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LA LANGUE ANGLAISE.

Com

Il est vrai

Est-ce

Vous parlez anglais, je crois, Mademoiselle? - Bien peu, Monsieur. C'est par modestie que vous dites: bien peu ; je suis persuadé que vous parlez très-bien. Oh! je vous assure; il y a trop peu de temps que je l'apprends. bien y a-t-il de temps? — Trois mois seulement. que c'est bien peu de temps; surtout pour l'anglais. que vous le trouvez bien difficile? — Oui, à cause de la prononciation. Le français est plus facile à prononcer; mais le genre des noms et les différentes terminaisons des adjectifs et des verbes offrent des difficultés qui n'existent pas en anglais; d'ailleurs la syntaxe anglaise est beaucoup plus simple. D'où peut venir cette différence entre les deux

langues? D'abord des langues dont elles sont formées, et ensuite, du caractère des nations qui s'en servent, lequel, à son tour, tient beaucoup au climat que chacune habite. Ainsi le climat influe sur le langage des peuples, comme sur leurs mœurs et leurs usages. Vous croyez? Assurément ; et voilà pourquoi les langues du Midi sont plus douces que celles du Nord; et celles-ci plus énergiques que celles-là. Je connais quelqu'un qui vous contesterait cette assertion. Mais je me tais: ce serait une querelle d'allemand.

UNE LEÇON DE DANSE.

Mesdemoiselles, si vous êtes prêtes, nous commencerons. Voyons, si vous vous souvenez du pas nouveau que je vous ai montré la dernière fois. Bien; Mademoiselle Émilie le fait à merveille. Faites une révérence à présent: pliez un peu davantage, et plus lentement. . . . C'est ça . . . haussez la tête; regardez-moi; effacez vos épaules. . . la tête droite tournez les pieds en dehors un peu plus; donnez-moid observez la cadence. Il faut retomber plus Vous dansez avec grâce.

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la main légèrement . . . cela vaut mieux. La danse est nécessaire au corps comme à l'âme, au physique comme au morale. "En effet, lorsq'un homme a commis un manquement dans sa conduite, soit aux affaires de sa famille, ou au gouvernement d'un état, ou au commandement d'une armée, ne dit-on pas qu'il a fait un faux pas ? Et faire un faux pas, peut-il procéder d'autre chose que de ne savoir pas danser." Donc, exercez-vous fidèlement.

UNE LETTRE DE CONSEIL.

Cette lettre sera pour vous comme si elle venait du séjour des morts. Celui qui vous l'écrit, sera dans le tombeau avant que vous puissiez peser ses conseils. Votre tendre et excel

lent père m'a demandé de vous adresser quelque chose qui pût exercer une influence favorable sur la direction future de votre vie. Et moi aussi, qui porte le même nom que vous, je me sens intéressé à votre avenir. Peu de mots suffiront, si vous y apportez de bonnes dispositions: adorez Dieu, vénérez et chérissez vos parents, aimez votre prochain comme vousmême, et votre patrie plus que vous-même, soyez juste, soyez sincère, ne murmurez jamais contre les ordres de la Providence; ainsi la vie dans laquelle vous êtes entré sera pour vous une introduction à une félicité ineffable et éternelle. S'il est permis aux morts de prendre encore part aux choses de ce monde, je vous suivrai dans tous les actes de votre vie. Thomas Jefferson.

PALISSY.

Né de parents pauvres qui purent à peine lui faire donner quelques leçons de lecture et d'écriture, Bernard Palissy apprit seul le dessein et devint très habile dans cet art. Avec le produit de quelques travaux d'arpentage et de peinture sur vitraux, il visita, pour s'instruire, une grande partie de la France. Il avait près de quarante ans, et il était établi à Saintes, lorsqu'ayant vu une magnifique coupe émaillée, il résolut de chercher le secret de l'émail, secret connu alors seulement de quelques ouvriers italiens. Pendant quinze ans, il multiplia en vain ses expériences.

Chaque jour, dit l'un de ses biographes, sa maison retentissait des plaintes de sa femme. Souvent même ses enfants se joignaient à leur mère pour le prier, les mains jointes, et les yeux pleins de larmes, de reprendre son ancienne profession de peintre sur verre, qui lui procurait les moyens de vivre heureux. Palissy opposait aux plaintes de sa femme, aux prières de ses enfants, une volonté impitoyable. Il avait foi dans son œuvre. Bafoué, traité de fou, soupçonné de sorcel

lerie et de fausse monnaie, son courage n'est pas ébranlé. Enfin, par une nouvelle combinaison, il croit toucher au moment de la réussite, lorsqu'un potier, qu'il s'était attaché, le quitta tout à coup en réclamant son salaire.

Palissy, sans crédit, dénué de tout, est obligé de lui donner en payement, une partie de ses vêtements. Livré à lui-même, il se dirige vers son four, qu'il avait bâti dans la cave de sa maison. Mais, hélas ! le bois lui manque. Que faire ? Dans la cuison de ce dernier essai, repose la dernière de ses espérances. Il court à son jardin, en arrache les treillages, les brise, et bientôt le four est embrasé; mais la flamme menace de s'éteindre. Alors Palissy, hors de lui, précipite dans le four ses meubles, les portes, les fenêtres et même les planches de sa maison. Les larmes, les supplications de sa famille, ne peuvent l'arrêter; il lui faut du bois pour alimenter son four, et tout ce qui peut servir à cet effet est impitoyablement sacrifié par lui. Palissy est ruiné . . . mais le succès va enfin récompenser ses efforts. Un long cri de joie frappe les voûtes de la cave, et se fait entendre dans toute la maison; et lorsque la femme de Palissy, étonnée de l'étrangeté de ce cri, descend, elle trouve son mari debout, le regard fixé avec stupéfaction sur une poterie aux couleurs brillantes, qu'il tient dans ses deux mains. Le succès de Palissy avait été chèrement acheté; mais sa renommée se répandit au loin, et bientôt, appelé à Paris, il reçut le brevet d'inventeur de rustiques figulines du roi.

LA GROTTE DE CALYPSO.

FENELON (FRANÇOIS DE SALIGNAC).

1651-1715.

Godefroy résume en peu de mots toute la biographie de Fénelon Théologien et controversiste, orateur et philosophe, littérateur et moraliste, Fénelon est toujours un admirable

écrivain, et l'on peut appliquer à ses moindres productions ce que disait madame de Maintenon des manuscrits trouvés par Louis XIV. dans la cassette du duc de Bourgogne après sa mort, et brûlés impitoyablement: jamais on ne peut rien écrire de si beau et de si bon.

On arrive à la porte de la grotte de Calypso, où Télémaque fut fort surpris de voir, avec une apparence de simplicité rustique, tout ce qui peut charmer les yeux. On n'y voyait ni or, ni argent, ni marbre, ni colonnes, ni tableaux, ni statues : cette grotte était taillée dans le roc, en vôutes pleines de rocailles et de coquilles; elle était tapissée d'une jeune vigne, qui étendait ses branches souples également de tous les côtés. Les doux zéphyrs conservaient en ce lieu, malgré les ardeurs du soleil, une délicieuse fraîcheur : des fontaines, coulant avec un doux murmure sur des prés semés d'amarantes et de violettes, formaient en divers lieux des bains aussi purs et aussi clairs que le cristal : mille fleurs naissantes émaillaient les tapis verts dont la grotte était environnée. Là, on trouvait un bois de ces arbres touffus qui portent des pommes d'or, et dont la fleur, qui se renouvelle dans toutes les saisons, répand le plus doux de tous les parfums; ce bois semblait couronner ces belles prairies, et formait une nuit que les rayons du soleil ne pouvaient percer: là, on n'entendait jamais que le chant des oiseaux, ou le bruit d'un ruisseau qui, se précipitant du haut d'un rocher, tombait à gros bouillons, pleins d'écume, et s'enfuyait au travers de la prairie.

La grotte de la déesse était sur le penchant d'une colline : de là on découvrait la mer, quelquefois claire et unie comme une glace, quelquefois follement irritée contre les rochers, où elle se brisait en gémissant, et élevant ses vagues comme des montagnes d'un autre côté, on voyait une rivière où se formaient des îles bordées de tilleuls fleuris et de hauts peupliers qui portaient leur tête superbe jusque dans les nues. Les

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