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accuse d'infidélité l'ouvrage de Nostradamus, et prouve assez bien qu'il est en contradiction avec les manuscrits du temps, déchiffrés par Sainte-Palaye. (Voyez surtout tome rer, p. 17, 390, 410; et tome 3, p. 90 et 274.) Au surplus, l'abbé Millot n'était pas plus exempt d'erreur que Jean Nostradamus, car on trouve dans son ouvrage, tome 1er, p. 12, «< des assem«< blées nombreuses excitaient la verve de nos poëtes, et l'on << distribuait des prix à ceux qu'on en jugeait les plus dignes : <«< cet usage conduisit probablement à l'institution des cours d'amour, qui proposèrent de pareilles questions, et qui en «< devinrent les juges. Aucun troubadour n'a parlé de ces <«< tribunaux de galanterie, quoique leurs pièces soient pleines « d'allusions aux usages de leurs temps. Ainsi les jeux mipartis ne supposent point l'existence des cours d'amour. » Et cependant, dans le tome 2 de son Histoire, à l'article de Savary de Mauléon, l'abbé Millot rapporte un tenson entre ce troubadour et un autre poëte, nommé le Prevost, et ajoute, page 105, ce qui suit : « le Prevost prend pour juges les « dames Guillemette de Benenguès, Marie de Ventadour et <«< la dame de Montferrand. Savary répond que les trois dames suffisent, qu'elles sont si savantes en amour, qu'il se sou<< met à tout ce qu'elles diront. » Au surplus, l'auteur de la Description des arcs de triomphe d'Aix, dont je vais parler, ne fait aucune difficulté d'attribuer aux troubadours et à leurs vers l'établissement des cours d'amour.

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NOTE XXV.

Depuis quand, en France, les arrêts se rendent-ils en langue vulgaire ? Cet usage est-il le même dans toute l'Allemagne, et depuis quand?

En rapportant l'ordonnance de Villers-Cotterets, le président Hénault, sous l'année 1539, observe « qu'on avait

« attendu bien long-temps à faire une si sage ordonnance..., << et que l'empereur Rodolphe, dès l'an 1281, avait ordonné, << dans l'assemblée de Nuremberg, qu'on cesserait d'écrire << les actes en latin, et qu'ils seraient désormais dressés en << langue allemande. » Ce règlement n'a cependant pas été adopté par tous les princes d'Allemagne; car la Gazette de France, du 14 avril 1786 (no 30), nous apprend que l'électeur de Cologne a rendu le 17 février 1786, un décret par lequel ce prince a ordonné «< qu'à l'avenir tous les mande«< mens, monitoires, assignations et jugemens donnés jusqu'à présent en langue latine, seront rédigés en langue << allemande.

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NOTE XXVI.

De Martial d'Auvergne et de ses ouvrages.

Martial d'Auvergne était procureur au parlement, et notaire au Châtelet de Paris. Il est mort en 1508. Ses arrêts d'amour sont curieux en ce qu'ils attestent la forme alors usitée dans les jugemens et les anciens habillemens des magistrats, ainsi que des officiers et suppôts de la justice. Cet auteur, indépendamment du recueil des arrêts d'amour, et de l'ouvrage dont je donne le titre, note XXX, a composé <«<les Vigiles de la mort de Charles VII à neuf pseaumes et neuf leçons. C'est un poëme d'une forme très-singulière, puisque « c'est celle de l'office des morts. Au lieu des psaumes, on <«< trouve ici des récits des principales actions glorieuses et « des malheurs du monarque à la mémoire duquel cet ou<< vrage est consacré. Au lieu de leçons, ce sont des complaintes de différens Etats du royaume sur la mort d'un roi << sage et justement regretté. Si l'on veut bien oublier, pour «< un moment, la forme ridicule de ce poëme, forme qui « doit être attribuée à l'ignorance et au mauvais goût du siè«<cle où il a été produit, on conviendra qu'il n'y a peut-être

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« aucun livre plus curieux ni plus intéressant. La partie his

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torique est écrite en vers simples, et assez exacte; il y a « peu d'esprit, mais beaucoup de netteté et de vérité. » ( Mélanges tirés d'une grande Bibliothèque, t. 4, p. 252 et 253.)

NOTE XXVII.

Notice du commentaire de Benoît de Court sur les Arrêts d'amour de Martial d'Auvergne.

Martial d'Auvergne, dans ses Arrêts, commence par donner l'extrait du plaidoyer des contendans : cet extrait est suivi des décisions de la cour d'amour; le tout en français.

Benoît de Court interrompt ces différens plaidoyers de ses remarques, qui, au lieu d'être mises en notes, font partie du texte, mais sont en latin, et viennent à l'appui des raisons alléguées par les parties. Ce qui est singulier, dans l'ouvrage de Benoît de Court, est la gravité de ses discussions, et l'érudition qu'il y prodigue. Son commentaire est rempli de citations du Code, du Digeste, du Décret de Gratien, des Décrétales; en un mot, de tous les auteurs connus sous le titre de corpus juris civilis et juris canonici. (Corps du droit civil et canonique.) On y cite aussi l'Ecriture sainte, les coutumes, les poëtes, les orateurs; enfin, ce commentaire est la preuve de la science profonde et des connaissances immenses de son auteur, ainsi que de son mauvais goût, ou plutôt de celui de son siècle.

Cette note serait plus longue que toute ma Dissertation, si je voulais réunir ici toutes les preuves bizarres, et souvent ridicules, que Benoît de Court emploie dans son commentaire : je me réduirai à cinq, qui donneront une idée de cet ouvrage singulier.

1o Dans le premier arrêt, où une dame se plaint que « son «< amant lui a offert plusieurs dons et bagues, qu'elle ne vou

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<«<lut prendre ne recevoir pour doute de simonie en amour, qui est défendue. » Benoît de Court appuie son excuse en citant la loi 3 du Digeste, titre de donatione inter virum et uxorem (des donations entre mari et femme), qui porte que l'amour est quelque chose de divin; et en conséquence, comme dans les Actes des apôtres il est établi que c'est une simonie que d'acheter une chose sainte, Benoît de Court en conclut que l'amour étant une chose sainte, c'est une simonie que d'offrir de l'argent ou des présens à une dame pour s'en faire aimer.

2o Dans le second arrêt, un écuyer accuse une dame de l'avoir blessé en le baisant trop rudement; la dame est condamnée par la cour d'amour à mouiller, au moins une fois par mois, de sa salive, la blessure de son ami, jusqu'à complète et entière guérison; afin, dit de Court, que le principe du mal en fût aussi le remède, suivant le titre des Décrétales, de reliquiis ac veneratione sanctorum (des reliques, et de la vénération due aux choses saintes.)

3o Dans le neuvième arrêt, où l'amant se plaint que sa dame cause avec ses rivaux, et en reçoit des bouquets, malgré le serment qu'elle a fait de n'aimer que lui, Benoît de Court prouve que ce serment est nul, parce que les dames ont reçu de la nature le droit inaliénable de causer avec les cavaliers, et d'en recevoir des bouquets, et qu'il est établi dans le Code, que le souverain même ne peut priver quelqu'un des droits qu'il a reçus de la nature; que d'ailleurs le décret de Gratien établit qu'un serment qui pourrait causer la mort de celui qui l'a fait est nul; qu'en conséquence, celui fait par la dame de ne point parler aux galans, pouvant lui causer la mort, est nul de plein droit.

4o Dans le dixième arrêt, l'amant se plaint qu'il y a usure dans ses conventions avec sa dame, et en demande la rési– liation, «< vu qu'il est obligé de faire à sa dame plusieurs dons, honneurs et services, le tout pour un baiser.

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Quoique l'arrêt déclare que le contrat n'était point usurier, Benoît de Court prouve, par les lois divines et humaines, le Code et le Digeste, que l'usure fait rescinder de droit un contrat.

5o Par le quatorzième arrêt, un demandeur conclut, par droit lignager, contre un étranger défendeur à qui un frère dudit demandeur avait cédé un baiser qu'il recevait toutes les semaines d'une certaine dame.

Benoît de Court cite, en faveur du demandeur, le Lévitique, chapitre 25, les lois romaines, et les articles de la coutume de Paris, qui veulent que les biens restent dans les familles, et conclut en conséquence à ce que le baiser soit adjugé au demandeur par droit de retrait lignager.

NOTE XXVIII.

Notice des ouvrages de Coquillart.

Indépendamment des Droits nouveaux d'amour, Coquillart a fait plusieurs autres ouvrages, au moins aussi singuliers: on en trouvera le détail dans le tome 4 des Mélanges tirés d'une grande bibliothèque, p. 330. Je n'en citerai que deux : le Purgatoire des mauvais maris, et l'Avocat des dames de Paris, qui vont chercher les pardons.

NOTE XXIX.

De la composition du parlement d'amour dans le Roman de la Rose.

L'auteur du Roman de la Rose appelle la cour du dieu d'amour un parlement, et le compose de barons. Voyez les vers 1105, 1111, t. 2, p. 7, édition de 1735, où l'auteur s'exprime ainsi :

Le dieu d'amour, sans terme mettre,
De lieu, de tems ni de lettre,

Toute sa baronnie mande,

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