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chargé de le présenter en temps utile aux cortès. »

Cet acte d'abdication de la reine Christine était daté du 12 octobre 1840. Deux jours après, la veuve de Ferdinand VII quittait Valence et prenait la route de Paris.

LIVRE QUATORZIÈME

I. Translation des restes de Napoléon Ier. Cérémonie funèbre. Session de 1841. Inondations dans les départements. 11. Les Anglais en Chine. III. Lettres attribuées à Louis-Philippe. Le recensement. Troubles sérieux à Toulouse. Envoi d'un commissaire extraordinaire. La municipalité est dissoute. Procès et acquittement. IV. Baptême du comte de Paris. Élection de M. Ledru-Rollin dans la Sarthe. Attentat Quénisset. Convention des détroits. Le traité du droit de visite. Session de 1842. Mort de M. Humann. Le général Bugeaud gouverneur de l'Algérie. Affaires d'Afrique. Espartero régent. Influence anglaise en Espagne. Conjuration à Madrid. — V. L'amiral du Petit-Thouars aux iles Marquises. Élections générales en France. Mort de M. le duc d'Orléans. Réunion des Chambres. La loi de régence. Débat parlementaire. La loi est votée. VI. Complications en Espagne. Chute d'Espartero. Majorité de la reine Isabelle. Les Anglais dans l'Inde. O'Connell et les rébeccaïtes. Prise de la Smala d'Abd-el-Kader. Le duc de Nemours au Mans. Voyage en France de la reine d'Angleterre.

I

Une des scènes les plus grandes, les plus poétiques de cette époque, un de ces tableaux dont les moindres détails se gravent dans la mémoire d'un peuple, ce fut assurément l'entrée solennelle à Paris des cendres de l'empereur Napoléon I". Qui ne se rappelle encore cette foule émue, frémissante venue de tous les points de

la France pour saluer la dépouille mortelle du grand homme que le rocher de Sainte-Hélène rendait enfin à la patrie, à ces rivages de la Seine entrevus au bord de la tombe par le moderne César, et auxquels il avait aspiré dans les derniers élans de sa douloureuse pensée?

Le prince de Joinville chargé par son père d'aller recueillir ces glorieux restes et commandant la frégate la Belle-Poule qu'accompagnait la corvette la Favorite, parut le 8 octobre 1840 devant JamesTown, capitale de l'île Sainte-Hélène. Les généraux Bertrand et Gourgaud, MM. de Las-Cases et Marchand avaient été désignés par Louis-Philippe pour constater l'identité de l'Empereur. M. de Chabot devait, en qualité de commissaire du gouvernement français, recevoir officiellement le cercueil que la Belle-Poule allait transporter au delà des mers. L'accueil fait au prince et à sa suite par les autorités anglaises fut plein de convenance et de cordialité. On avait d'avance assemblé et préparé à James-Town tous les objets matériellement nécessaires tant à l'exhumation projetée qu'à la translation du cercueil jusqu'au lieu de l'embarquement. On choisit la date du 15 octobre pour procéder à cette cérémonie. Vingt-cinq ans auparavant l'empereur Napoléon avait ce même jour abordé le rivage inhospitalier de Sainte-Hélène.

Les travaux commencèrent à minuit et demi

dans la vallée du tombeau dont les issues étaient gardées par des soldats anglais. Les personnages désignés et M. l'abbé Coquereau, aumônier de la Belle-Poule, assistaient à cette scène nocturne. A neuf heures et demie du matin, la dalle qui recouvrait le tombeau fut enlevée, et l'on put procéder à l'ouverture des quatre cercueils emboîtés l'un dans l'autre qui renfermaient la dépouille du grand homme. Le premier seul, en bois de chêne, avait subi quelques atteintes du temps. Lorsqu'on en fut à soulever la dernière enveloppe qui recouvrait les restes de Napoléon, il se fit parmi les assistants un solennel et religieux silence. La tombe allait-elle rendre intact le glorieux dépôt qui lui avait été confié? La mort avait-elle, au contraire, détruit dans son silencieux travail jusqu'à l'effigie de l'Empereur? On écarta avec de grandes précautions les lambeaux du satin blanc qui garnissait jadis le dernier cercueil et s'était détaché des parois pour retomber sur le corps luimême. Napoléon apparut tout entier à ces vieux serviteurs dont plusieurs l'avaient assisté dans ses derniers instants. Il apparut tel qu'ils l'avaient quitté, et une main légèrement soulevée attestait encore le suprême hommage que l'un d'entre eux avait rendu à ce glorieux maître. Napoléon avait été enseveli revêtu de l'uniforme vert des chasseurs de la garde qu'il portait habituellement et

sur lequel brillaient encore les insignes des ordres qu'il avait fondés. La nature paraissait avoir voulu faciliter, par une conservation peu ordinaire, l'identité que l'on venait constater de si loin; il semble que ce soit le privilége de certains hommes de résister ainsi au néant, de combattre la destruction. Henri IV, lui aussi, fut trouvé intact dans son tombeau de Saint-Denis; mais, moins heureux que Napoléon, ses restes furent jetés au vent. Après la réception officielle par le commissaire du gouvernement, le cercueil fut placé sur un char funèbre qui, accompagné des autorités anglaises et des délégués français, prit le chemin de JamesTown où le prince de Joinville attendait son arrivée à l'extrémité du quai près duquel se tenait la chaloupe disposée pour transporter le corps à bord de la Belle- Poule. Dès que le char fut en vue, le prince, laissant son état-major en arrière, s'avança la tête découverte, remercia le général Middlemore, gouverneur de l'île, et reçut au nom du gouvernement français le précieux dépôt qu'il avait mission de ramener sur les bords de la Seine. Au moment où la chaloupe, s'éloignant du quai, se dirigeait vers la frégate, les trois bâtiments français saluèrent d'une décharge de tous leurs canons la bienvenue sur le sol de la patrie du grand capitaine dont l'exil n'avait pas duré moins de vingt-cinq ans.

Le 18 octobre, l'escadrille s'éloignait de l'île de

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