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XXXVIII.

même conci

le par un au

teur du

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temps.

>> voient pas les qualités que saint Paul prescrit, » ne sont ni prêtres, ni évêques ». On ne put jamais les obliger, quoi qu'on pût dire, à approuver le mariage ni le baptême des petits enfans; et le refus obstiné de reconnoître des vérités si constantes fut pris pour un aveu de leur erreur. On les condamna aussi par l'Ecriture, comme gens qui refusoient de confesser leur foi; et sur tous les points proposés ils sont vivement pressés par Ponce, archevêque de Narbonne, par Arnaud, évêque de Nîmes, par les abbés, et surtout par Gaucelin, évêque de Lodève, que Gérauld, évêque d'Albi, qui étoit présent et l'ordinaire du lieu, avoit revêtu de son autorité. Je ne crois pas qu'on puisse voir en aucun concile ni la procédure plus régulière, ni l'Ecriture mieux employée, ni une dispute plus précise et plus convaincante. Qu'on nous dise encore après cela que ce qu'on dit des Albigeois sont des calom

nies.

Un historien du temps récite au long ce conHistoire du cile (1), et donne un fidèle abrégé des actes plus amples qu'on a recouvrés depuis. Voici comme il commence son récit. « Il y avoit dans la province » de Toulouse des hérétiques qui se faisoient >> appeler les bons hommes, maintenus par les » soldats de Lombez. Ceux-là disoient qu'ils ne >> recevoient ni la loi de Moïse, ni les prophètes, »> ni les psaumes, ni l'ancien Testament, ni les » docteurs du nouveau; à la réserve des Evan>> giles, des Epîtres de saint Paul, des sept Epîtres (1) Roger. Hoved. in Annal. Angl.

.

>> canoniques,

» canoniques, des actes et de l'Apocalypse ». C'en est assez, sans parler davantage du reste, pour faire rougir nos Protestans des erreurs de leurs ancêtres.

XXXIX. Pourquoi ces héréti

Mais pour faire soupçonner quelque calomnie dans la procédure qu'on tint contre eux, ils remarquent qu'on les appela non point Mani- ques sont apchéens, mais Ariens; que cependant les Mani- pelés Ariens. chéens n'ont jamais été accusés d'arianisme, et que Baronius lui-même a reconnu cette équivoque (1). Quelle chicane! de verbaliser sur le titre qu'on donne à une hérésie, quand on la voit désignée, pour ne point parler des autres marques, par celle de rejeter l'ancien Testament! Mais il faut encore montrer à ces esprits contentieux quelle raison on avoit d'accuser les Manichéens d'arianisme. C'est que Pierre de Sicile dit ouvertement, « qu'ils professoient la Trinité en » parole, qu'ils la nioient dans leur cœur, et qu'ils en tournoient le mystère en allégories >> impertinentes (2) ».

C'est aussi ce que saint Augustin nous apprend à fond. Fauste, évêque des Manichéens avoit écrit : « Nous reconnoissons sous trois noms une » seule et même divinité de Dieu le Père tout puissant, de Jésus-Christ son Fils, et du SaintEsprit (5) ». Mais il ajoute ensuite «< Que le » Père habitoit la souveraine et principale lu» mière, que saint Paul appeloit inaccessible':

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(1) La Roq. ibid. Bar. t. x11. an. 1176. p. 674. (2) Petr. Sic. (3) Faust. ap. Aug. lib. xx. cont. Faust. cap. 2, t. vIII,

ibid.

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col. 333.

BOSSUET. XX.

8

XL. Sentiment des Manichéens sur la Trinité, par saint Augus

tin.

» pour le Fils, qu'il résidoit dans la seconde » lumière, qui est la visible; et qu'étant double » selon l'apôtre qui nous parle de la vertu et de » la sagesse de Jésus-Christ, sa vertu résidoit » dans le soleil, et sa sagesse dans la lune; et » enfin pour le Saint-Esprit, que sa demeure » étoit dans l'air qui nous environne ». Voilà ce que disoit Fauste; par où saint Augustin le convainc de séparer le Fils d'avec le Père, même par des lieux corporels ; de le séparer encore d'avec lui-même, et de séparer le Saint - Esprit de l'un et de l'autre (1): les situer aussi, comme faisoit Fauste, dans des lieux si inégaux, c'étoit mettre entre les personnes divines une trop manifeste inégalité. Telles étoient ces allégories pleines d'ignorance, par lesquelles Pierre de Sicile convainquoit les Manichéens de nier la Trinité. Ce n'étoit pas la confesser que de l'expliquer de cette sorte; mais, comme dit saint Augustin, c'étoit coudre la foi de la Trinité à ses inventions. Un auteur du douzième siècle contemporain de saint Bernard, nous apprend que ces hérétiques ne disoient point, Gloria Patri (2); et Renier dit expressément que les Cathares ou Albigeois ne croyoient pas «< que la » Trinité fût un seul Dieu; mais qu'ils croyoient » que le Père étoit plus grand que le Fils et le » Saint-Esprit (3) ». Il ne faut donc pas s'étonner que les Catholiques aient rangé quelquefois les

(1) Faust. ap. Aug. lib. xx. cont. Faust. cap. 7, t. vIII, col. 336. (2) Herib. mon. ep. Anal. 111. — (3) Ren. cont. Vald. c. 6, t1v. Bibl. PP. p. 759.

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Manichéens avec ceux qui nioient la Trinité sainte, et que par cette considération ils aient pu leur donner le nom d'Ariens.

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XLI. Manichéens

à Soissons.

Pour revenir au manichéisme de ces hérétiques, Guide Nogent, célèbre auteur du douzième siècle, et plus ancien que saint Bernard, nous fait voir Témoignage autour de Soissons des hérétiques, qui « faisoient de Gui de Nogent.

» un fantôme de l'Incarnation; qui rejetoient le

>>

baptême des petits enfans; qui avoient en hor» reur le mystère qu'on fait à l'autel; qui pre» noient pourtant les sacremens avec nous; qui >> rejetoient toutes les viandes et tout ce qui sort » de l'union des deux sexes (1) ». Ils faisoient, à l'exemple de ces hérétiques que nous avons vus à Orléans, une Eucharistie et un sacrifice qu'on n'ose décrire; et pour se montrer tout-à-fait semblables aux autres Manichéens, ils se cachoient comme eux et se couloient en secret parmi nous, avouant et jurant tout ce qu'on vouloit, pour se sauver du supplice.

XLII.

Ajoutons à ces témoins Radulphus Ardens, auteur célèbre du onzième siècle, dans la peinture Témoignage de Radulqu'il nous fait des hérétiques d'Agénois, qui « se phus Ardens » vantent de mener la vie des apôtres; qui disent sur les héré>> qu'ils ne mentent point; qu'ils ne jurent point; tiques d'Agé» qui condamnent l'usage des viandes et du ma

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riage; qui rejettent l'ancien Testament et ne

>> reçoivent qu'une partie du nouveau; et, ce » qui est de plus terrible, admettent deux Créa» teurs; qui disent que le sacrement de l'autel » n'est que du pain tout pur; qui méprisent le (1) De vita sud, lib. 111. c. 16.

nois.

XLIII.

» Baptême et la résurrection des corps (1) ». Sont-ce là des Manichéens bien marqués? Or on n'y voit point d'autres caractères que dans ces Toulousains et ces Albigeois, dont nous avons vu que la secte s'étoit répandue en Gascogne et dans les provinces voisines. Agen avoit eu aussi ses docteurs particuliers; mais quoi qu'il en soit, on voit partout le même esprit, et tout y est de même sorte.

Trente de ces hérétiques de Gascogne se réfugièrent en Angleterre en l'an 1160. On les en Angleter- appeloit Poplicains ou Publicains. Mais voyons

Les mêmes hérétiques

re.

quelle étoit leur doctrine par Guillaume de Neudbrige, historien voisin de ce temps, dont Spelman, auteur protestant, a inséré le témoignage dans le second tome de ses Conciles d'Angleterre : «< On fit, dit-il (2), entrer ces hérétiques » dans le concile assemblé à Oxford. Girard, qui » étoit le seul qui sût quelque chose, répondit >> bien sur la substance du Médecin céleste: mais

quand on vint aux remèdes qu'il nous a lais»sés, ils en parlèrent très-mal, ayant en horreur » le Baptême, l'Eucharistie et le Mariage, et » méprisant l'unité catholique ». Les Protestans rangent parmi leurs ancêtres ces hérétiques venus de Gascogne (3), à cause qu'ils parlent mal du sacrement de l'Eucharistie, selon les Anglais de ce temps qui étoient persuadés de la pré

(1) Radulp. Ard. serm. in Dom, vÙ. post. Trin. t. 11. — (2) Guil. Neudb. Rer. Angl. lib. 11. c. 13. Conc. Ox. tom. 11. Conc. Ang. Conc. Labb. tom. x, an. 1160. col. 1405. — (3) La Roq. hist. de l'Euc. c. 18. p. 460.

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