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CLXIX.

tatum, ou les

de Bâle.'

que sortirent les Frères en 1457, selon qu'ils le déclarent eux-mêmes dans la préface de leur Confession de foi de 1558, et encore dans celle de 1572 que nous avons tant de fois citées, où ils parlent en ces termes : « Ceux qui ont fondé >> nos Eglises se séparèrent alors des Calixtins par » une nouvelle séparation (1) »; c'est-à-dire, comme ils l'expliquent dans leur apologie de 1532, que de même que les Calixtins s'étoient séparés de Rome, ainsi les Frères se séparèrent des Calixtins (2): de sorte que ce fut un schisme et une division dans une autre division et dans un autre schisme. Mais quelles furent les causes de cette séparation? On ne les peut pas bien comprendre sans connoître et la croyance et l'état où se trouvèrent alors les Calixtins.

Leur doctrine consistoit d'abord en quatre arLe Compac- ticles. Le premier concernoit la coupe : les trois quatre arti- autres regardoient la correction des péchés pucles accordés blics et particuliers qu'ils portoient à certains par le concile excès; la libre prédication de la parole de Dieu, qu'ils ne vouloient pas qu'on pût défendre à personne; et les biens d'Eglise. Il y avoit là quelque mélange des erreurs des Vaudois. Ces quatre articles furent réglés dans le concile de Bâle d'une manière dont les Calixtins furent d'accord, et la coupe leur fut accordée à certaines conditions, dont ils convinrent. Cet accord s'appela Compactatum, nom célèbre dans l'histoire de Bohême. Mais une partie des Hussites, qui ne voulut pas

(1) De frat. narrat. p. 267. Præf. Boh. Conf. 1558. Synt. Gen. p. 164. — (2) Apol. frat. 1. 1. part. ap. Lyd. t. 11, p. 129.

se contenter de ces articles, commença, sous le nom des Taborites, ces sanglantes guerres dont nous venons de parler; et les Calixtins, l'autre partie des Hussites qui avoit accepté l'accord, ne s'y tint pas; puisqu'au lieu de déclarer, comme on en étoit convenu à Bâle, que la coupe n'étoit pas nécessaire, ni commandée de Jésus-Christ, ils en pressèrent la nécessité, même à l'égard des enfans nouvellement baptisés. A la réserve de ce point, on est d'accord que les Calixtins convenoient de tout le dogme avec l'Eglise romaine; et leurs disputes avec les Taborites le font voir. Lydius un ministre de Dordrect en a recueilli les actes (1); et ils ne sont pas révoqués en doute par les Protestans.

CLXX. Les Calix

tins disposés

à reconnoî

On y voit donc que les Calixtins ne conviennent pas seulement de la transsubstantiation, mais encore en tout et partout sur la matière de l'Eucharistie, de la doctrine et des pratiques reçues tre le Pape. dans l'Eglise romaine, à la réserve de la communion sous les deux espèces; et pourvu que le Pape l'accordât, ils étoient prêts à reconnoître son autorité (2).

On pourroit ici demander d'où vient donc qu'a- CLXXI. vec de tels sentimens ils conservoient tant de res

D'où vient pect pour Viclef, qu'ils appeloient aussi bien que respectoient donc qu'ils les Taborites le docteur évangélique par excel- tant la mélence (3)? C'est en un mot qu'on ne trouve rien de moire de Virégulier dans ces sectes séparées. Quoique Viclef

(1) Lyd. Valdens. t. 1. Rotero. 1616.—(2) Syn. Prag. an. 1431. ap. Lyd. p. 304, et an. 1434. Ibid. p. 332, 354. — (3) Disp. cum Rokys. Can. 15. Ant. lect. tom. 111, II. part.

clef.

CLXXII. L'ambition

L

eût parlé avec tout l'emportement possible contre la doctrine de l'Eglise romaine, et en particulier contre la transsubstantiation, les Calixtins l'excusoient, en répondant que ce qu'il avoit dit contre ce dogme, il ne l'avoit pas dit décisivement, mais scholastiquement (1), comme on parloit, c'est-à-dire par manière de dispute; et on peut juger par-là combien ils trouvoient de facilité à justifier, quoi qu'on leur pût dire, un auteur dont ils étoient entêtés.

Ils n'en étoient pas moins bien disposés à reconde Roquesa- noître le Pape; et les seuls intérêts de Roquesane ne et des Ca- empêchèrent leur réunion. Ce docteur avoit luilixtins empê- même ménagé l'accommodement, dans l'espénion avec l'E- rance qu'il avoit conçue, qu'après un si grand glise.

che leur réu

CLXXIII.

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service le Pape se porteroit aisément à le pourvoir de l'archevêché de Prague, qui étoit l'objet de ses vœux (2). Mais le Pape, qui ne vouloit pas commettre les ames et le dépôt de la foi à un homme si factieux, donna cette prélature à Budovix, autant supérieur à Roquesane en mérite qu'en naissance. Tout manqua par cet endroit. La Bohême se vit replongée dans des guerres plus sanglantes que toutes les précédentes : Roquesane, malgré le pape, s'érigea en archevêque de Prague, ou plutôt en Pape dans la Bohême : et Pogiebrac qu'il éleva par ses intrigues à la royauté ne lui pouvoit rien refuser.

Durant ces troubles, des gens de métier qui Origine des commençoient à gronder dès le règne précédent,

Frères de Bo

(1) Disp. cum Rokys. Can. 15. Ant. lect. tom. 1, H. part. p. 472.-(2) Camer. hist. narr. Apol. frat. p. 115, etc.

se

1

se mirent plus que jamais à parler entre eux de la hême qui se réforme de l'Eglise. La messe, la transsubstan- séparent de Roquesane et tiation, la prière pour les morts, les honneurs des Calixtins. des saints, et surtout la puissance du Pape les cho→ quoit. Enfin ils se plaignoient que les Calixtins romanisoient en tout et partout, à la réserve de la coupe (1). Ils entreprirent de les corriger. Roquesane irrité contre le saint Siége leur parut un instrument propre à entreprendre cette affaire. Rebutés par ses superbes réponses qui ne respiroient que l'amour du monde, ils lui reprochèrent son ambition; qu'il n'étoit qu'un mondain, et qu'il les abandonneroit plutôt que ses honneurs (2). En même temps ils mirent à leur tête un Kelesiski, maître cordonnier, qui leur fit un corps de doctrine qu'on appela les formes de 'Kelesiski. Dans la suite ils se choisirent un pasteur nommé Matthias Convalde, homme laïque et ignorant; et en l'an 1467, ils se séparèrent publiquement des Calixtins, comme les Calixtins avoient fait de Rome. Telle a été la naissance des Frères de Bohême; et voilà ce que Camérarius, et eux-mêmes, tant dans leurs Annales que dans leurs Apologies et dans les préfaces de leurs Confessions de foi, nous racontent de leur origine ; si ce n'est qu'ils mettent leur séparation en 1457; et il me paroît plus net de la mettre dix ans après en 1467, dans le temps qu'ils marquent euxmêmes la création de leurs nouveaux pasteurs.

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(1) Apol. 1532, 1. part. (2) Camer. de Eccles. frat. p. 67, 84, etc. Apol. frat. 1532, 1, part.

BOSSUET. XX.

15

CLXXIV. Foibles com

Je trouve ici un peu de contradiction entre ce qu'ils racontent de leur histoire dans leur Apode cette sec- logie de 1532, et ce qu'ils en disent dans la pré

mencemens

te.

CLXXV.

suivoient pas

face de 1572 car ils disent dans cette préface qu'en 1457, dans le temps qu'ils se séparèrent d'avec les Calixtins, ils étoient un peuple ramassé de toute sorte de conditions (1): et dans leur Apologie de 1532 où ils étoient un peu moins fiers, ils reconnoissent franchement qu'ils étoient ramassés du menu peuple et de quelques prétres Bohémiens en petit nombre, tous ensemble un très-petit nombre de gens, petit reste, et méprisables ordures, ou, comme on voudra traduire, miserabiles quisquiliæ, laissées dans le monde par Jean Hus (2). C'est ainsi qu'ils se séparèrent des Calixtins, c'est-à-dire des seuls Hussites qui fussent alors. Voilà comme ils sont disciples de Jean Hus: morceau rompu d'un morceau; schisme séparé d'un schisme; Hussites divisés des Hussites, et qui n'en avoient presque retenu que la désobéissance et la rupture avec l'Eglise romaine.

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Si on demande comment ils pouvoient reconIls ne pre- noître Jean Hus, comme ils font partout, pour noient que le nom de Jean un docteur évangélique, pour un saint martyr, Hus, et n'en pour leur maître, et pour l'apôtre des Bohémiens la doctrine. et en même temps rejeter comme sacrilège la messe que leur apôtre avoit dite constamment jusqu'à la fin, la transsubstantiation et les autres dogmes qu'il avoit toujours retenus; c'est qu'ils (e) 1. part.

(1) De orig. Eccl. Boh. post hist. Camer. p. 267. Apol. Lyd. t. 11, 221 et 222, 232, etc.

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