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J'en vois dans ce temple

Un bien doux pour nous :
Regardez Laujon,

L'honneur de notre sanctuaire;
Fils d'Anacreon,

Il boit et chante octogénaire; (1)

Toute sa carrière

Fut un long printemps:

Voilà la manière

De vivre cent ans.

DÉSAUGIERS.

(1) Laujon, membre de l'Académie Française et président du Caveau, mourut, âgé de quatre-vingt-quatre ans, le 13 juillet 1811. Jusques à la séance qui précéda sa mort, il fut le boutte en train de la société. La gaîté même de l'auteur de cette chanson pâlissait devant celle de cet Anacréon moderne.

La chanson de mattre Adam doit nécessairement commencer tous les recueils de chansons bachiques. La voici telle que l'auteur la publia en 1651. On remarquera que les deux derniers couplets ne sont pas de la même mesure que les trois précédens.

LE CULTE D'UN BUVEUR.

Que Phébus soit dedans l'onde

UE

Ou dans son oblique tour,

Je bois tousiours à la ronde ;
Le vin est tout mon amour;
Soldat du fils de Semelle,

Tout le tourment qui me poinct,
C'est quand mon ventre groumelle,
Faute de ne boire poinct.

Aussi-tost que la lumiere
Vient redorer les coteaux,
Poussé d'un désir de boire,
Je caresse les tonneaux ;
Ravy de revoir l'Aurore,
Le verre en main je luy dis:
Voit-on plus au rive more
Que sur mon nez de rubis?

Si quelque jour estant yvre
La Parque arreste mes pas,
Je ne veux point, pour revivre,
Quitter un si doux trépas;
Je m'en iray dans l'Averne
Faire enivrer Alecton,
Et planteray ma taverne
Dans la chambre de Pluton.

Le plus grand de la terre,
Quand je suis au repas,
S'il m'annonçoit la guerre,
Il n'y gagneroit pas.
Jamais je ne m'estonne,
Et je croy, quand je boy,
Que si Jupiter tonne,
C'est qu'il a peur de moi.

La nuit n'est poinct chassée
Par l'unique flambeau,
Qu'aussi-tost ma pensée
Est de voir un tonneau;
Et luy tirant la bonde,
Je demande au Soleil :
As-tu beu dedans l'onde
D'un élément pareil?

HAGUENIER dégagea cette chanson du style marotique, donna la même mesure à tous les couplets, supprima le premier, en ajouta trois autres; et la publia ainsi qu'on va la lire. Laujon nous a assuré que ce fut dans une séance de l'ancien Caveau que l'on supprima le premier couplet, et qu'on la chanta telle que nous la chantons aujourd'hui, en commençant par le second.

DE

LE VRAI BUVEUR.

( N. So ).

tous les dieux que la fable

A mis dans son Panthéon,

Il n'en est qu'un véritable

Qui soit digne de ce nom.
C'est Bacchus que je veux dire.
Pour les autres immortels,
Je crois qu'un buveur peut rire
Jusqu'aux pieds de leurs autels.

Aussitôt que la lumière

A redoré nos coteaux,
Je commence ma carrière
Par visiter mes tonneaux :
Ravi de revoir l'Aurore,
Le verre en main je lui dis:

Vois-tu sur la rive maure
Plus qu'à mon nez de rubis?

Le plus grand roi de la terre,
Quand je suis dans un repas,
S'il me déclarait la guerre,
Ne m'épouvanterait pas :
A table rien ne m'étonne,
Et je pense, quand je boi,
Si là-haut Jupiter tonne,
Que c'est qu'il a peur de moi.

Si quelque jour, étant ivre,
La Mort arrêtait mes pas,
Je ne voudrais pas revivre
Pour changer ce doux trépas:
Je m'en irais dans l'Averne
Faire enivrer Alecton,
Et bâtir une taverne

Dans le manoir de Pluton.

Par ce nectar délectable
Les démons étant vaincus,
Je ferais chanter au diable
Les louanges de Bacchus.
J'apaiserais de Tantale
La grande altération,

Et, passant l'onde infernale,
Je ferais boire Ixion...

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