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peu surpris tout le monde, et particulièrement ceux qui l'avoient connu à Rome. J'en connois de si zélés pour lui, qu'ils veulent croire que tout ce qui se fait contre lui est l'effet de quelque secrète cabale, et qu'il en sortira à son honneur: mais ce que nous voyons n'a pas cet air.

Pour l'affaire d'Angleterre, outre la difficulté des premiers évêques auteurs du schisme, il y en a encore une grande du temps de Cromwel, où l'on prétend que la succession de l'ordination a été interrompue. Les Anglais soutiennent que non; et pour la succession dans le commencement du schisme, ils soutiennent qu'il n'y a aucune difficulté; et il semble qu'ils aient raison en cela. Cela dépend du fait; et le saint Siége ne manquera pas d'agir en cette occasion avec sa circonspection ordinaire.

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A ce propos, il me vient dans l'esprit qu'il y auroit une chose qui pourroit beaucoup, selon toutes les nouvelles que nous recevons, faciliter le retour de l'Angleterre et de l'Allemagne : ce seroit le rétablissement de la coupe. Elle fut rendue par Pie IV dans l'Autriche et dans la Bavière mais le remède n'eut pas grand effet; parce que les esprits étoient spirituelle, qu'il publia en espagnol. Il fut en conséquence arrêté, et mis dans les prisons de l'Inquisition de Rome, au mois de juillet 1685. Les informations qu'on fit sur sa vie manifestèrent la plus grande corruption dans ses mœurs; et les abominations dont il fut convaincu firent encore mieux sentir la perversité de ses maximes, et à quels désordres elles pouvoient mener ceux qui les réduiroient en pratique. La congrégation de l'Inquisition rendit, le 28 août, un décret qui condamnoit soixante-huit de ses propositions comme hérétiques, scandaleuses et blasphématoires. Après avoir fait abjuration publique de ses erreurs, il fut renfermé, pour le reste de ses jours, dans une étroite prison, où il mourut le 29 décembre 1696.

encore trop échauffés. La même chose accordée dans un temps plus favorable, comme celui ci où tout paroît ébranlé, réussiroit mieux. Ne pourriezvous pas en jeter quelques paroles, et sonder un peu les sentimens là-dessus? Je crois, pour moi, que par cette condescendance, où il n'y a nul inconvénient qu'on ne puisse espérer de vaincre après un usage de treize cents ans, on verroit la ruine entière de l'hérésie. Déjà la plupart de nos Huguenots s'en expliquent hautement.

Pour nos Articles (1), c'est une matière plus délicate, et je crois que sur cela nous devons nous contenter de la liberté. Je salue Dom Michel de tout mon cœur; et suis avec une parfaite cordialité, etc.

A Germigny, ce 12 août 1685.

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LETTRE CXVIII.

DE DOM MABILLON.

Sur le rétablissement de la coupe, et quelques faits historiques.

J'ai reçu la lettre que votre Grandeur m'a fait l'honneur de m'écrire, dont je vous remercie trèshumblement. J'ai parlé à quelques personnes de nos amis du rétablissement de la coupe en faveur des hérétiques. Monseigneur Slusio, qui est un prélat des plus éclairés et des mieux intentionnés de cette Cour, m'a dit qu'il n'étoit pas temps de faire cette proposition; qu'il n'y avoit pas assez de lumière (1) Il s'agit des quatre Articles du clergé de France.

dans le conseil pour entrer dans cette condescendance, et que de la proposer de la part de la France dans l'état où sont à présent les choses, ce seroit assez pour la gâter; que le meilleur moyen pour y réussir, seroit de faire demander la chose par le roi d'Angleterre, par le moyen du cardinal Ouvart, ou en tout cas, ce que j'ajoute de moi-même, par le nouveau prince Palatin. Comme monseigneur Slusio sait parfaitement la situation des choses de cette Cour, je n'ai point parlé de cette affaire à d'autre qu'à lui, si ce n'est que j'en ai dit un mot à son Eminence d'Estrées.

La congrégation des cardinaux, commis par le Pape pour examiner l'affaire de monseigneur d'Héliopolis contre les Pères Jésuites de la Cochinchine et de Siam, etc., a donné un décret extrêmement fort en faveur de ce prélat, par lequel décret on révoque de ce pays-là les Pères Jésuites, qui n'ont pas voulu se soumettre à lui, sous peine d'excommunication, ipso facto, et de ne recevoir aucun novice. Mais comme le Pape n'a pas voulu confirmer ce décret, on ne sait s'il aura assez de force pour être exécuté, quoique le Père général ait écrit à ses religieux missionnaires conformément à ce décret.

M. le cardinal Nerli a quitté l'archevêché de Florence, pour prendre le petit évêché d'Assise, qui n'a de revenu que neuf cents écus, sur lesquels il y en a sept cents de pension.

Nous partirons au premier jour pour Naples et pour le Mont-Cassin, d'où nous ne retournerons ici que sur la fin du mois de novembre; si bien que nous serons obligés de passer ici une partie de l'hiver.

En quelque endroit que nous soyons, je serai toujours, aussi bien que Dom Michel, avec un profond respect, etc.

F. JEAN MABILLON, moine bénédictin.

A Rome, ce 9 octobre 1685.

LETTRE CXIX.

A UN DE SES DIOCESAINS,

réfugié en hollande (1).

Il l'exhorte à revenir à l'Eglise, où il lui fait voir qu'on peut toujours se sauver, l'avertit de ne point se complaire dans ses souffrances, et lui montre les avantages dont il jouira dans le sein de l'Eglise catholique.

AUTANT que j'eus de joie quand M. le B. de la F*** votre parent, me vint dire de votre part que vous

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(1) Cette lettre, avec une autre écrite à la même personne, qui sera imprimée plus bas, a été publiée par les Protestans dans un petit ouvrage qui a pour titre : La Séduction éludée, ou Lettres de M. l'Evêque de Meaux à un de ses Diocésains qui s'est sauvé de la persécution, avec les Réponses qui y ont été faites. A Berne en Suisse, 1686.

Nous aurions pu donner ici ces Réponses: mais la première n'est point celle à laquelle Bossuet réplique dans sa seconde lettre; parce que ce prélat avoit cru devoir réfuter préférablement la lettre que ce réfugié écrivoit à sa femme, dont il le jugeoit plutôt autéur que de celle qu'il lui avoit écrite à lui-même. Et pour la Réponse à la seconde lettre du prélat, nous sommes dispensés de l'insérer dans notre collection, Bossuet n'ayant pas jugé à propos d'y répliquer, soit parce que les raisons qu'elle contient ont été mille fois détruites, soit parce qu'il trouvoit plus convenable de consacrer des momens si précieux aux controverses générales et publiques, que de les employer à une dispute particulière dont il

vouliez rentrer dans l'Eglise, autant fus-je surpris et affligé quand j'appris qu'au lieu d'exécuter ce pieux dessein, vous étiez sorti du royaume. Est-il possible que vous ayez cru qu'on ne peut se sauver dans une Eglise, où l'on est forcé d'avouer que vos pères se

voyoit qu'il ne pouvoit se promettre aucun fruit. Il s'étoit proposé de ramener par ses charitables exhortations un fils tendrement chéri mais dès qu'il vit que les ministres s'étoient tellement emparés de son esprit, qu'ils dictoient eux-mêmes toutes ses réponses, il cessa de lui écrire. Enfin il eût été assez inutile que le prélat entreprît de réfuter la grande lettre qui lui avoit été adressée en réponse à sa seconde lettre; puisque celui sous le nom duquel elle avoit été composée, n'avoit pas voulu l'adopter : c'est ce que déclare l'auteur même de cette Réponse, dans la lettre qu'il écrivit à Bossuet pour le presser de lui répliquer. « Je prends, dit-il, la liberté » de vous écrire ce mot au sujet de la réponse qui vous a été >> faite sur votre seconde lettre à M. de V. Elle paroissoit comme » venir de lui, quoiqu'elle fût écrite d'une autre main : mais ce» lui qui se mettoit en sa place, a enfin appris qu'il s'étoit dis»culpé auprès de vous sur cette dernière réponse, dont il n'a » pas jugé à propos de faire l'adoption, comme il avoit fait à » l'égard de la première ».

Quels que fussent les mécontentemens que les Protestans pouvoient avoir de la conduite d'un prélat qui ne se lassoit point de travailler à confondre leurs erreurs, et à ramener à l'Eglise ceux qu'ils avoient séduits; cependant ils étoient comme forcés de rendre dans toute occasion hommage aux éminentes qualités de ce grand évêque. On en a déjà vu des preuves, et on le remarque singulièrement dans ces deux réponses où ils parlent de Bossuet « comme d'un >> prélat ilustre, que Dieu, dont l'immense libéralité n'a non plus d'égards à l'apparence des religions qu'à celle des personnes, » a orné et enrichi d'une infinité de merveilleux dons, pour le» quel aussi ils avoient une vénération particulière, ayant tou» jours eu dans leur secte une grande considération pour son » mérite ». Tous ces témoignages si volontaires, et qu'un reste d'équité pouvoit seul produire, nous montrent quelle impression la supériorité des talens et des vertus de Bossuet faisoit sur l'esprit même de ceux qu'il ne cessoit de combattre.

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