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ple à Babylone, l'Eglise, aussi captive, n'a eu ni autels ni temple; bien plus, elle a suspendu ses instruments de musique, c'est pourquoi le cinquième dimanche n'a point d'office propre. Le septième figure l'extrême vieillesse de l'Eglise, c'est-à-dire l'état de la foi des siècles, puisque le Fils de Dieu est venu et a délivré le genre humain de la servitude du diable. Or, pour ne pas paraître oublier les bienfaits qu'elle a reçus et montrer de l'ingratitude, elle se félicite et dit: Oculi mei semper ad Dominum, « Je tiens toujours mes yeux tournés vers le Seigneur. » Ce septième et dernier dimanche signifie le sabbat ou repos du monde, dans lequel se reposent les ames des saints. C'est alors que se réjouit cette Jérusalem céleste, qui est libre et qui est notre mère: aussi ce dimanche est-il appelé le dimanche de la joie, car c'est le septième ou la septième Septuagésime depuis la Septuagésime; et le nombre septenaire désigne le septième âge, qui est l'âge de ceux qui sont dans le repos. Car ce dimanche représente la liberté accordée aux enfants de Jérusalem de revenir de Babylone dans leur patrie, dans la soixantième année de leur captivité, qui ne fut consommée qu'en la soixante-dixième année; c'est pourquoi tout l'office de ce jour appartient à la joie, pour désigner l'allégresse des Juifs et aussi la nôtre : car à la fin des six âges nous nous trouverons dans le septième, où nous serons délivrés de l'exil de ce monde lorsque nous entrerons dans le paradis céleste, notre patrie.

VI. On chante donc aujourd'hui l'introït Lætare, Jerusalem, etc., « Réjouis-toi, Jérusalem, » pour montrer que, de même que les Juifs avec une grande joie revinrent de Babylone à Jérusalem, de même nous aussi nous nous rendrons en nous réjouissant de ce monde dans la céleste Jérusalem. Car Babylone, par interprétation, signifie confusion, c'est-à-dire le monde ou l'enfer, parce que dans le monde règne la confusion des vices, et dans l'enfer la confusion des supplices. Ce dimanche est encore appelé dimanche de Réfection, parce qu'en

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ce jour le Seigneur a restauré et rassasié cinq mille personnes, ou parce qu'en ce dimanche on nous montre la céleste Jérusalem qui renferme toute réfection; et, comme l'Eglise se réjouit de cette réfection, c'est pourquoi on chante Lætare, Jerusalem, « Réjouis-toi, Jérusalem, » c'est-à-dire l'Eglise, car c'est dans cette céleste Jérusalem qu'on nous promet le repos éternel. Dans l'office de nuit, on chante le répons: Audi, Israel, præcepta Domini, etc., « Ecoute, Israël, les préceptes du Seigneur, et grave-les dans ton cœur et sur un livre, et je te donnerai une terre où couleront le lait et le miel. » Suivent ces mots dans l'introït: Ab uberibus consolationis ejus, « Vous serez rassasiés des consolations qui découlent de son sein. » Ces paroles représentent les deux alliances, qui renferment et d'où nous tirons les douces promesses source de notre consolation. Cet introït renferme trois expressions de joie, c'est-àdire lætare, gaudete et exultate; la raison en est expliquée dans le chapitre de la Septuagésime, au commencement. Cet introït est extrait du dernier chapitre d'Isaïe, mais d'une ancienne traduction, parce que dans le texte d'Isaïe les expressions ne sont pas groupées de la même manière. Le verset du psaume qui parle de la Jérusalem céleste, c'est-à-dire Lætatus sum, etc., est du cinquième ton, à cause des cinq mille hommes rassasiés par le Christ; ou bien parce que ceux qui retiennent, répriment et règlent bien les cinq sens du corps posséderont la réfection et la consolation dont il est question dans l'introït, et que l'on demande dans la collecte Concede, quæsumus, Domine, etc., «Fais, s'il te plaît, Dieu tout-puissant, qu'étant affligés de tant de maux que nous avons attirés sur nous par nos péchés, nous respirions par la consolation de ta grâce. » Cependant quelques écrivains ont prétendu que l'on chante Lætare, Jerusalem, parce que le pape Albéric, qu'on ne trouve pas cependant dans la chronique, officia en ce jour à Rome, dans une église appelée Jérusalem. Et remarque que, dans certaines églises, en ce jour et à la fête de l'Annonciation du Seigneur

on dit deux collectes, afin que nous paraissions comme célébrer deux fêtes; ceci ne se pratique point dans les autres principales festivités et même à la Nativité du Seigneur et autres semblables, parce que ces fêtes se prolongent pendant une octave comme celle-ci et ne se trouvent pas resserrées dans l'observance ou l'espace d'un seul jour. Suit l'épître Scriptum est quoniam, etc., « Il est écrit qu'Abraham eut deux fils, etc., etc., » (Galates, chap. iv), où suivent ces mots : Quæ sursum est, etc., « La Jérusalem d'en-haut est libre, et c'est elle qui est notre mère. » L'apôtre parle de la sorte, afin que nous servions le Seigneur avec amour, et non avec une crainte servile. Le répons a trait au même sujet : Lætatus sum in his quæ dicta sunt mihi, etc., « Je me suis réjoui lorsque l'on m'a dit, etc. » Il est du septième ton, à cause du septième âge, où nous serons dans le repos. Mais, comme nous sommes encore dans la peine et le travail, c'est pourquoi suit le trait, mais le trait le plus consolant et le plus doux : Qui confidunt in Domino sicut mons Sion, etc., où l'on montre que ceux qui n'espèrent que dans le Seigneur posséderont cette réfection. Suit l'évangile Abiit Jesus trans mare Galileæ, « Jésus s'en alla au-delà de la mer de Galilée, » de saint Jean (chap. vi). Or, les cinq pains dont le Seigneur nous a rassasiés, comme on lit dans l'Evangile, ce sont les cinq livres de Moïse. Les deux poissons représentent les psaumes et les prophéties, ou les livres de Josué ou des Juges, parce que c'est de ces sept livres que l'on tire les prières ou oraisons de ce dimanche ; c'est ainsi qu'il restaure tous les hommes. L'offertoire est Laudate; il est du second ton, pour montrer que nous devons louer Dieu pour la réfection corporelle et spirituelle ; la postcommunion, Jerusalem quæ ædificatur ut civitas, « Jérusalem est bâtie comme une ville, etc. » Il parle de cette Jérusalem qui est libre; il est du quatrième ton, à cause des quatre choses ou particularités dont il y est question.

VII. La première, c'est que tous les biens y sont communs,

car là Dieu est tout pour tous. La seconde, c'est que l'on participe éternellement aux biens qui s'y trouvent; c'est pourquoi il y est dit: cujus participatio ejus in idipsum, « dont toutes les parties sont dans une parfaite union entre elles. » La troisième, c'est qu'aucun des enfants du diable ne peut y monter; d'où il est dit: Illuc enim ascenderunt, « C'est là que s'assemblent les tribus, toutes les tribus de ton peuple, ô Seigneur ! » La quatrième particularité, c'est que dans cette Jérusalem on loue Dieu continuellement, d'où suivent ces mots : ad confitendum nomini tuo, Domine, « pour confesser ton nom, Seigneur ; » d'où ces paroles: Beati qui habitant in domo tua, Domine, « Bienheureux ceux qui habitent dans ta maison, Seigneur ; ils te loueront dans tous les siècles des siècles. »

VIII. En ce dimanche, le Pontife romain, en allant dire la messe et en revenant de l'église, porte dans sa main et à la vue du peuple une rose d'or. On peut en donner deux raisons, l'une dans le sens littéral, et l'autre dans le sens spirituel : 1° dans le sens littéral, de peur que le peuple fidèle ne vienne à défaillir et à succomber à la peine, à cause de l'austérité et de la continuité de l'observance du Carême ; 2° parce que ce qui manque du repos éternel ne peut durer: c'est pourquoi en ce jour, qui est le milieu du Carême, on procure au peuple quelque récréation et quelque soulagement, afin que les peines et les travaux de la pénitence deviennent plus faciles à supporter par cette distraction, d'après ces paroles :

Interpone tuis interdum gaudia curis;

«< Entremêle de temps en temps tes soucis de quelque joie,» ou bien : «< Prends quelques distractions au milieu de tes occupations. » Car l'office de ce jour est tout rempli de joie; à chaque mot, à chaque pause la joie déborde, l'allégresse retentit, la gaieté respire partout. Ainsi ce jour représente trois choses, c'est-à-dire : 1° la charité après la haine, d'où l'on dit: Lætare, Jerusalem, et conventum facite omnes, « Réjouis-toi,

Jérusalem; rassemblez-vous, vous tous qui l'aimez; » 2° la joie après la tristesse ; d'où ces mots : Gaudete in lætitia, etc., << Entrez dans des transports de joie, vous qui avez été dans la tristesse, » 3o la satiété après la faim, d'où ces paroles : ut satiemini, « afin que vous soyez comblés des délices et rassasiés des consolations qui découlent de son sein. >> Ces trois choses sont également figurées dans les trois propriétés de cette rose, c'est-à-dire la charité dans la couleur, la joie et la gaieté dans l'odeur, la satiété ou le rassasiement dans le goût ou la saveur ; car la rose, plus que toutes les autres fleurs, réjouit par sa couleur, récrée par son odeur, fortifie par sa saveur. Son aspect réjouit, son odeur recrée, sa saveur fortifie. nc la rose, dans la main du Pontife de Rome, désigne la

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du peuple israélite, quand, par la faveur du christ Cyrus, reçut la liberté de retourner à Jérusalem. Ensuite le Pontife donne cette rose au personnage le plus noble et le plus puissant qui se trouve alors à la cour, pour marquer la noblesse et l'excellence de ce peuple choisi de Dieu. Enfin, l'heureux élu, accompagné d'une nombreuse cavalcade, et au milieu d'une joie enthousiaste, parcourt la ville, la rose à la main, figurant par là la joie du peuple de retour à Jérusalem, ainsi que la communion de tout le peuple fidèle et la joie de l'Eglise, pour les raisons précitées.

IX. Dans le sens spirituel, cette fleur désigne cette autre fleur qui, dans le Cantique des cantiques, dit d'elle-même :

Je suis la fleur des champs et le lys des vallées, » et dont le Prophète parle ainsi : « Une tige sortira de la racine de Jessé, et une fleur croîtra de cette tige. » C'est là véritablement la fleur des fleurs, c'est-à-dire le Saint des saints, qui pardessus toutes les autres fleurs, c'est-à-dire plus que les autres saints, réjouit la vue par sa couleur; car c'est le plus beau des enfants des hommes, celui que les anges souhaitent ardemment de contempler, celui qui charme l'odorat par ses suaves senteurs; car, comme on le lit dans le cantique précité : « Tes

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