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une communion faite suivant les vrais principes de la morale chrétienne exigeait préalablement, de votre part, des réparations éclatantes et capables d'effacer les impressions prises sur votre compte, et que jusques-là aucun ministre instruit de son devoir, n'a pu et ne pourra vous absoudre, ni vous permettre de vous présenter à la Table sainte, etc. »

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M. d'Annecy n'en exigeait pas trop. Une grande ame qui revient sincèrement à Dieu, n'a pas besoin d'exhortation pour donner à la plénitude de son retour, toutes les qualités que le repentir doit inspirer par lui-même. Saint-Augustin, aussi grand génie pour son tems, que M. de Voltaire se porta de lui-même à déplorer ses erreurs et ses fautes. Il ne se borna pas à un simple sermon sur le vol.

Après avoir appris à M. de Voltaire ce qu'il devoit faire, M. l'évêque d'Annecy réfute le prétendu droit qu'ont

les seigneurs de prêcher. Le reste de sa lettre est rempli de leçons très-sages et très-propres à faire connaître la différence qui subsiste entre une ame élevée par le véritable esprit de la religion, et une ame conduite par la vaine gloire de la philosophie.

M. de Voltaire répondit encore à cette lettre par une autre du 29 avril. Celle-ci ne contient que des plaintes d'avoir été calomnié dans l'esprit du prélat; qu'une tournure adroite pour faire valoir les services qu'il a rendus, et finit comme la précédente, par un anéantissement devant la Providence divine, où il renferme son néant et son repentir.

Dans sa réponse du 2 mai de la même année, M. l'évêque d'Annecy justifie les personnes que M. de Voltaire soupçonne de l'avoir calomnié; il lui remontre que toute l'Europe étant imbue de ses écrits, il ne doit pas s'attacher à des particuliers pour leur imputer

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aucune délation auprès de son pasteur. Il lui fait connaître que c'est à luimême qu'il doit s'en prendre de s'être mis dans la nécessité d'avoir besoin d'une réparation éclatante; il l'exhorte à désavouer les ouvrages qu'on lui attribue, et à les rétracter s'il en est l'auteur, comme le moyen le plus sûr de rétablir sa réputation, selon lui, injustement attaquée. Il termine sa lettre en abandonnant M. de Voltaire à ses réflexions, et lui déclare qu'il ne doit pas s'attendre à de nouvelles réponses, « jusqu'à ce qu'un retour de votre part, lui dit-il, me mette à même de vous convaincre de la droiture de mes instructions, et de la sincérité du desir de votre salut, qui sera toujours inséparable du respect avec lequel j'ai l'honneur d'être. »

Nos philosophes du jour ont-ils ce langage lorsqu'on diffère d'opinion avec eux? Hélas! non; ces messieurs semblent vouloir vous persuader à

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force d'injures. Mais revenons à leur idole. M. de Voltaire fit apparemment des réflexions sur les avertissemens de son évêque. Sans lui écrire, il prit le parti de se conformer à son devoir. L'a-t-il fait sincèrement? Nous nous garderons bien d'assurer le contraire. Nous mettrons les pièces sous les yeux du lecteur; il décidera lui-même ce qu'il en doit penser.

Acte signifié à M. le curé de Ferney.

<< François-Marie de Voltaire, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, seigneur de Ferney, Tournay, etc. etc., âgé de soixante-quinze ans passés, étant d'une constitution très-faible, s'étant traîné à l'église le saint jour du dimanche des Rameaux, malgré ses maladies, et ayant depuis ce jour essuyé plusieurs accès d'une fièvre violente, dont le sieur Burgos, chirurgien, a averti M. le curé de Ferney,

selon les lois du royaume ; et ledit ma. lade se trouvant dans l'incapacité totale d'aller se confesser et communier à l'église pour l'édification de ses vassaux, comme il le doit et le désire, et pour celle des protestans dont ce pays est entouré, prie M. le curé de Ferney de faire, en cette occasion, tout ce que les ordonnances du roi, et les arrêts des parlemens commandent conjointement avec les canons de l'Eglise catholique professée dans le royaume ; religion dans laquelle ledit malade est né, a vécu et veut mourir, et dont il veut remplir tous les devoirs, ainsi que ceux de sujet du roi; offrant de faire toutes les déclarations nécessaires, toutes protestations requises, soit publiques, soit particulières; se soumettant pleinement à ce qui est de règle; ne voulant omettre aucun de ses devoirs, quel qu'il puisse être ; invitant M. le curé de Ferney à remplir les siens avec la plus grande exactitude, l'édification des catholiques

tant pour

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