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Oui, tu l'aimes.

IPHITA S.

LA PRINCESSE.

Je l'aime, dites-vous, & vous m'imputez cette lâcheté? O ciel ! Quelle est mon infortune! Puis-je bien, fans mourir, entendre ces paroles, & faut-il que je fois fi malheureuse, qu'on me soupçonne de l'aimer ? Ah! Si c'étoit un autre que vous, Seigneur, qui me tint ce difcours, je ne fais pas ce que je ne ferois point.

IPHITA S.

Hé bien, oui, tu ne l'aimes pas. Tu le hais, j'y confens, & je veux bien pour te contenter qu'il n'épouse pas la princeffe Aglante.

LA PRINCESSE.

Ah! Seigneur, vous me donnez la vie.

IPHITA S.

Mais, afin d'empêcher qu'il ne puiffe être jamais à elle, il faut que tu le prennes pour toi.

LA PRINCESSE.

Vous vous moquez, Seigneur, & ce n'est pas ce qu'il demande.

EURIAL E.

Pardonnez-moi, Madame, je fuis affez téméraire pour cela, & je prens à témoin le prince votre pere, fi ce n'eft pas vous que j'ai demandée. C'eft trop vous tenir dans l'erreur, il faut lever le mafque, & dûffiez-vous vous en prévaloir contre moi, découvrir à vos yeux les véritables fentimens de mon cœur. Je n'ai jamais aimé que vous, & jamais je & jamais je n'aimerai que vous. C'est vous, Madame, qui m'avez enlevé cette qualité d'infenfible que j'avois toujours affectée, & tout ce que j'ai pû vous dire, n'a été qu'une feinte qu'un mouvement fecret m'a infpirée, & que je n'ai fuivie qu'avec toutes les violences imaginables. Il falloit qu'elle ceffât bien-tôt, fans doute, & je m'é

tonne feulement qu'elle ait pû durer la moitié d'un jour; car enfin, je mourois, je brûlois dans l'ame quand je vous déguifois mes fentimens, & jamais cœur n'a fouffert une contrainte égale à la mienne. Que fi cette feinte, Madame, a quelque chofe qui vous offense, je fuis tout prêt de mourir pour vous en venger, vous n'avez qu'à parler, & ma main, fur le champ, fera gloire d'exécuter l'arrêt que vous pro

noncerez.

LA PRINCESSE.

Non, non, Prince, je ne vous fais pas mauvais gré de m'avoir abufée, &, tout ce que vous m'avez dit, je l'aime bien mieux une feinte, que non pas une vérité.

IPHITA S.

Si bien donc, ma fille, que tu veux bien accepter ce prince pour époux?

LA PRINCESSE. Seigneur, je ne fais pas encore ce que je veux. Donnez-moi le temps d'y fonger, je vous prie, & m'épargnez un peu la confufion où je fuis.

IPHITA S.

Vous jugez, Prince, ce que cela veut dire, & vous vous pouvez fonder là-deffus.

EURIALE.

Je l'attendrai tant qu'il vous plaira, Madame, cet arrêt de ma deftinée; &, s'il me condamne à la mort, je le suivrai fans murmure.

IPHITA S.

Vien, Moron. C'est ici un jour de paix, & je te remets en grace avec la princeffe.

MORON.

Seigneur, je ferai meilleur courtisan une autre fois, & je me garderai bien de dire ce que je penfe.

SCENE III.

'ARISTOMENE, THEOCLE, IPHITAS; LA PRINCESSE, AGLANTE, CINTHIE, MORON.

J

IPHITAS aux princes de Messéne & de Pyle.

E crains bien, Princes, que le choix de ma fille ne foit pas en votre faveur; mais voilà deux princeffes qui peuvent bien vous consoler de ce petit malheur.

ARISTOMENE.

Seigneur, nous favons prendre notre parti, & fi ces aimables princeffes n'ont point trop de mépris pour dos cœurs qu'on a rebutés, nous pouvons revenir par elles à l'honneur de votre alliance.

SCENE DERNIERE.

IPHITAS, LA PRINCESSE, AGLANTE, CINTHIE, PHILIS, EURIALE, ARISTOMENE, THEOCLE,

MORON.

PHILIS à Iphitas.

Eigneur, la déeffe Vénus vient d'annoncer par

Stout, le changement du cœur de la princelle. I pas

les pafteurs & toutes les bergéres en témoignent leur

joie par des danfes & des chanfons; &, fi ce n'est = point un fpectacle que vous méprifiez, vous allez voir l'allégreffe publique fe répandre jufque ici.

Fin du cinquiéme acte.

V. INTERMEDE.

BERGERS & BERGERES.

QUATRE BERGERS & DEUX BERGERES; alternativement avec le chœur.

U

Sez mieux, ô beautés fiéres,
Du pouvoir de tout charmer;
Aimez, aimables bergères,
Nos cœurs font faits pour aimer.
Quelque fort qu'on s'en défende,
Il y faut venir un jour;
Il n'eft rien qui ne se rende
Aux doux charmes de l'amour.

Songez de bonne heure à fuivre
Le plaifir de s'enflammer,
Un cœur ne commence à vivre,
Que du jour qu'il fait aimer.
Quelque fort qu'on s'en défende,
y faut venir un jour;

Il

Il n'eft rien qui ne fe rende

Aux doux charmes de l'amour.

ENTRÉE DE BALLET.

Q

Uatre bergers, & quatre bergeres dansent sur le chant du chœur.

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