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SCENE XII.

DORIMENE, LY CASTE, SGANARELLE retiré dans un coin du théatre fans être vû.

Q

LYCASTE.

Uoi! Belle Doriméne, c'eft fans raillerie que vous parlez?

DORIMENE.

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Et vous pouvez, cruelle que vous étes, oublier de la forte l'amour que j'ai pour vous & les obligeantes paroles que vous m'aviez données?

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DORIMENE.

Moi? Point du tout. Je vous confidére toujours de même; & ce mariage ne doit point vous inquiéter. C'eft un homme que je n'époufe point par amour, & fa feule richeffe me fait réfoudre à l'accepter. Je n'ai point de bien, vous n'en avez point aussi, & vous favez que fans cela on paffe mal le temps au monde; &, qu'à quelque prix que ce foit, il faut tâcher d'en avoir. J'ai embraffé cette occafion-ci de me mettre à

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mon aife; & je l'ai fait fur l'efpérance de me voir bien-tôt délivrée du barbon que je prens. C'est un homme qui mourra avant qu'il foit peu, & qui n'a, tout au plus, que fix mois dans le ventre. Je vous le garantis défunt dans le temps que je dis; & je n'aurai pas longuement à demander pour moi au ciel l'heureux état de veuve.

(à Sganarelle qu'elle aperçoit.)

Ah! Nous parlions de vous, & nous en difions tout le bien qu'on en fauroit dire.

LYCASTE.

Eft-ce là Monfieur...

DORIMENE.

Oui, c'eft Monfieur qui me prend pour femme.
LYCASTE.

Agréez, Monfieur, que je vous félicite de votre ma-
riage, & vous présente en même temps mes très-hum-
bles fervices. Je vous affure que vous époufez-là une
très-honnête perfonne; & vous, Mademoiselle, je me
réjouis, avec vous auffi, de l'heureux choix que vous
avez fait. Vous ne pouviez pas mieux trouver
Monfieur a toute la mine d'être un fort bon mari. Oui,
Monfieur, je veux faire amitié avec vous,
& lier en-
femble un petit commerce de vifites & de divertiffe-

mens.

DORIMENE.

&

C'est trop d'honneur que vous nous faites à tous deux. Mais allons, le temps me preffe, & nous aurons tout le loifir de nous entretenir ensemble.

M

SCENE XIII.

S GANARELLE feul.

E voilà tout-à-fait dégoûté de mon mariage; & je crois que je ne ferai pas mal de m'aller dégager de ma parole. Il m'en a coûté quelque argent; mais il vaut mieux encore perdre cela, que de m'expofer à quelque chofe de pis. Tâchons adroitement de nous débarraffer de cette affaire. Holà.

(Il frappe à la porte de la maison d'Alcantor.)

SCENE

XI V.

ALCANTOR, SGANARELLE,

A

ALCANTOR.

H! Mon gendre, foyez le bien venu,
SGANARELLE.

Monfieur, votre ferviteur.

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ALCANTOR.

J'ai donné ordre à toutes les chofes néceffaires pour cette fête.

SGANARELLE.

Il n'eft pas queftion de cela.

ALCANTOR.

Les violons font retenus, le feftin eft commandé, & ma fille eft parée pour vous recevoir.

SGANARELLE.

Ce n'eft pas ce qui m'améne.

ALCANTOR.

Enfin, vous allez être fatisfait; & rien ne peut retarder votre contentement.

SGANARELLE.

Mon Dieu! C'eft autre chose.

ALCANTOR.

Allons. Entrez donc, mon gendre.

SGANARELLE.

J'ai un petit mot à vous dire.

ALCANTOR.

Ah, mon Dieu! Ne faifons point de cérémonie. Entrez vîte, s'il vous plaît.

SGANARELLE.

Non, vous dis-je. Je veux vous parler auparavant.
ALCANTOR.
Vous voulez me dire quelque chose?

Oui.

SGANARELLE.

ALCANTOR.

Et quoi?

SGANARELLE.

Seigneur Alcantor, j'ai demandé votre fille en mariage, il eft vrai, & vous me l'avez accordée; mais je me trouve un peu avancé en âge pour elle, & je. confidére que je ne fuis point du tout fon fait.

Tome III.

X

ALCANTOR.

Pardonnez-moi. Ma fille vous trouve bien comme vòlis étes; & je suis fûr qu'elle vivra fort contente avec

vous.

SGANARELLE.

Point. J'ai par fois des bizarreries épouvantables, & elle auroit trop à fouffrir de ma mauvaise humeur. ALCANTOR.

Ma file a de la complaifance, & vous verrez qu'elle s'accommodera entiérement avec vous.

SGANARELLE.

J'ai quelques infirmités fur mon corps, qui pourroient la degouter.

ALCANTOR. Cela n'eft rien. Une honnête femme ne fe dégoûte jamais de fon mari.

SGANARELLE.

Ea, voulez-vous que je vous dise? Je ne vous conrelle point de me la donner.

ALCANTOR.

Vous moquez-vous? J'aimerois mieux mourir, que
Cavoir manqué à ma parole.

SGANARELLE.

Mon Dieu! Je vous en difpenfe, & je...

ALCANTOR.

Prim du rout. Je vous l'ai promise; & vous l'aurez, en dep it de tous ceux qui y prétendent. SGANARELLE à part.

Cable!

ALCANTOR.

Vevez-vous? J'ai une eftime, & une amitié pour vous soure part iculiere ; & je refuserois ma fille à un prince, pour vous la donner.

SGANARELLE.

Seigneur Alcantor, je vous fuis obligé de l'honnest

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