Images de page
PDF
ePub

URANIE.

Mais auparavant fachons un peu les fentimens de Monfieur Lyfidas.

LYSIDA S,

[blocks in formation]

Je n'ai rien à dire là-deffus; & vous favez qu'entre nous autres auteurs nous devons parler des ouvra ges les uns des autres avec beaucoup de circonfpec

Lion.

[ocr errors]

DORANTE.

entre nous, que penfez-vous de cette

[merged small][ocr errors]

LYSIDA S.

[blocks in formation]

De bonne foi, dites-nous votre avis,

LYSIDA S.

Je la trouve fort belle.

DORANTE,

'Affurément ?

LYSIDA S.

'Affurément. Pourquoi non ? N'eft-elle pas en effet la plus belle du monde ?

DORANT E.

Hon, hon, vous étes un méchant diable, Monfieur
Lyfidas; vous ne dites pas ce que vous penfez.
LY SIDAS,

Pardonnez-moi,

DORANTE.

Mon Dieu ! Je vous connois. Ne diffimulons point. LYSIDA S.

Moi, Monfieur?

DORANTE.

que,

Je vois bien que le bien que vous dites de cette piéce n'est que par honnêteté, & dans le fond du cœur, vous êtes de l'avis de beaucoup de gens, qui la trouvent mauvaise.

Hai, hai, hai.

LY SIDAS.

DORANTE.

Avouez, ma foi, que c'est une méchante chofe que cette comédie.

LYSIDA S.

Il eft vrai qu'elle n'eft pas approuvée par les connoiffeurs.

LE MARQUIS.

Ma foi, Chevalier, tu en tiens, & te voilà payé de ta raillerie. Ah, ah, ah, ah, ah.

DORAN TE.

Pouffe, mon cher Marquis, pouffe.

LE MARQUIS.

Tu vois que nous avons les favans de notre côté. DORANTE.

Il eft vrai. Le jugement de Monfieur Lyfidas eft quelque chofe de confidérable. Mais Monfieur Lyfidas veut bien que je ne me rende pas pour cela ; & puifque j'ai bien l'audace de me défendre contre les fen(montrant Climéne. )

timens de Madame, il ne trouvera pas mauvais que je combatte les fiens.

ELISE.

Quoi ! Vous voyez contre vous, Madame, Monfieur le marquis, & Monfieur Lyfidas, & vous ofez réfifter encore? Fi, que cela eft de mauvaise grace.

CLIMEN E.

Voilà qui me confond, pour moi, que des perfonnes raifonnables fe puiffent mettre en tête de donner protection aux fottifes de cette piéce.

LE MARQUIS.

Dieu me damne, Madame, elle eft miférable depuis le commencement jusqu'à la fin.

DORANTE.

Cela eft bien-tôt dit, Marquis. Il n'eft rien plus aifé que de trancher ainfi, & je ne vois aucune chofe qui puiffe être à couvert de la fouveraineté de tes décifions.

LE MARQUIS.

Parbleu, tous les autres comédiens qui étoient là pour la voir, en ont dit tous les maux du monde. DORANTE.

que

Ah! Je ne dis plus mot, tu as raison, Marquis, Puifles autres comédiens en difent du mal, il faut les en croire affurément. Ce font tous gens éclairés, & qui parlent fans intérêt. Il n'y a plus rien à dire, je

me rens.

CLIMEN E.

Rendez-vous, ou ne vous rendez pas, je fais fort bien que vous ne me perfuaderez point de fouffrir les immodefties de cette pièce, non plus que les fatires défobligeantes qu'on y voit contre les femmes.

URANIE.

Pour moi, je me garderai bien de m'en offenfer, & de prendre rien fur mon compte de tout ce qui s'y dit, Ces fortes de fatires tombent directement fur les mœurs, & ne frappent les perfonnes que par réflexion. N'allons point nous appliquer à nous-mêmes les traits d'une cenfure générale, & profitons de la leçon, nous pouvons, fans faire femblant qu'on parle à nous. Toutes les peintures ridicules qu'on expofe fur les théatres, doivent être regardées fans chagrin de tout

fi

le monde. Ce font miroirs publics où il ne faut jamais témoigner qu'on fe voie ; & c'est se taxer hautemens d'un défaut, que fe fcandalifer qu'on le reprenne.

CLIMENE.

Pour moi, je ne parle pas de ces chofes par la part que j'y puiffe avoir, & je penfe que je vis d'un air dans le monde à ne pas craindre d'être cherchée dans les peintures qu'on fait là des femmes qui fe gouver→

nent mal.

ELISE.

Affurément, Madame, on ne vous y cherchera point. Votre conduite eft affez connue, & ce font de ces fortes de chofes qui ne font contestées de perfonne. URANIE à Climéne.

Auffi, Madame, n'ai-je rien dit qui aille à vous, & mes paroles, comme les fatires de la comédie, demeurent dans la thése générale.

CLIMENE.

Je n'en doute pas, Madame. Mais enfin paffons fur ce chapitre. Je ne fais pas de quelle façon vous recevez les injures qu'on dit à notre fexe dans un certain endroit de la piéce; & pour moi, je vous avoue que je fuis dans une colére épouvantable, de voir que cet auteur impertinent nous appelle des animaux.

URANIE.

Ne voyez-vous pas que c'est un ridicule qu'il fait parler?

DORANTE.

Et puis, Madame, ne favez-vous pas que les injures des amans n'offenfent jamais, qu'il eft des amours emportés auffi-bien que des doucereux, & qu'en de pareilles occafions les paroles les plus étranges, & quelque chofe de pis encore, fe prennent bien fouvent pour des marques d'affection, par celles mêmes qui les reçoivent?

ELISE.

Dites tout ce que vous voudrez, je ne faurois digérer cela, non plus que le potage & la tarte à la créme dont Madame a parlé tantôt.

LE MARQUIS.

[ocr errors]

'Ah! Ma foi, oui, tarte à la crême ! Voilà ce que j'avois remarqué tantôt; tarte à la créme. Que je vous fuis obligé, Madame, de m'avoir fait fouvenir de tarte à la crême. Y a-t-il affez de pommes en Normandie pour tarte à la crême ? Tarte à la crême ; morbleu, tarte à la crême !

DORANTE.

Hé bien, que veux-tu dire? Tarte à la crême!
LE MARQUIS.

Parbleu, tarte à la crême, Chevalier.

[blocks in formation]

Mais il faut expliquer fa pensée, ce me femble.
LE MARQUIS.

Tarte à la crême, Madame.

URANIE.

Que trouverez-vous là à redire ?

LE MARQUIS.

Moi, rien. Tarte à la crême.

URANIE.

Ah! Je le quitte:

ELISE.

Monfieur le marquis s'y prend bien, & vous bourre de la belle maniére. Maisje voudrois bien que Mon

« PrécédentContinuer »