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WATEAU.

dyck dont le ton de couleur l'avoit enchanté, étoient fes véritables modéles. Par le peu de ANTOINE tems que Wateau a vécu & le grand nompar bre de fes ouvrages, on peut juger de fa vie laborieufe, & de l'amour qu'il avoit pour fon art. Ses tableaux, il eft vrai, ne font pas du premier ordre, ils ont cependant un mérite particulier, & dans leur genre rien n'eft plus aimable: il n'y a même aucun cabinet où ils ne puiffent entrer. Wateau que le travail avoit rendu mélancolique, ne s'eft point peint tel dans les tableaux : on y trouve partout de la gaieté, un efprit vif & pénétrant un jugement naturel, une correction de deffein, une vérité de couleur, avec un pinceau coulant & une touche des plus fines & des plus légères: rien n'est au-deffus de fes caractères de têtes, la nature s'y montre telle qu'elle eft; il joignoit à tous ces agrémens un excellent payfage, & des fonds admirables pour l'intelligence des couleurs; on peut dire qu'il a non-feulement excellé dans les compofitions galantes & champêtres, mais encore dans les marches & les haltes des foldats.

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C'eft peut-être une perte pour le public que Wateau entraîné par l'efprit extraordinaire de Gillot fon maître, ait imité fa maniere, & n'ait pas traité l'histoire dont il paroiffoit fort capable. Une Vierge qu'il a peinte & quelques autres fujets d'hiftoire, font préfumer qu'il auroit pu réutfir dans ce genre. Le goût qu'il a fuivi eft proprement celui des bambochades, & ne convient point au férieux; tous les habillemens en font comiques, propres au bal, & les fcénes font ou théâtrales ou champêtres fa fervante qui étoit belle, lui fervoit de

JEAN-BAP

modéle; il l'a peint en danfeufe avec un fond de payfage tres-frais.

Ses difciples font Jean-Baptifte Pater peintre Flamand, & Nicolas Lancret, dont il fera parlé dans la fuite.

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Jean-Baptiste Pater originaire de Valenciennes, TISTE PATER, né en 1695, vint très-jeune à Paris, & étudia fous Wateau avec un très bon goût de couleur, il négligea la partie du deffein, ainfi que le naturel, travaillant plus par intérêt, que pour la gloire. Il fuivoit en cela le précepte (a) d'Horace. I eft mort à Paris en 1736, âgé de quarante-un ans. On a fait ces vers fur Wateau.

ANTOINE
WATEAU.

Parée à la Françoise, un jour dame Nature
Eut le défir coquet de voir fa portraiture.
Que fit la bonne mere? Elle enfanta Wateau :
Pour elle ce cher fils plein de reconnoiffance,
Non content de tracer partout fa reffemblance,
Fit tant & fit fi bien, qu'il la peignit en beau.

Les deffeins de Wateau font eftimés des curieux : le crayon rouge étoit celui dont il fe fervoit le plus fouvent fur du papier blanc, afin d'avoir des contre épreuves, ce qui lui rendoit fon fujet des deux côtés il a rarement relevé fes deffeins de blanc, le fond du papier faifoit cet effet: on en voit beau

(a) Quarenda pecunia primum eft,

Virtus poft nummos.

Epift. Lib. 1.

coup aux deux crayons de pierre noire & de fan- ANTOINE guine, ou de mine de plomb & de fanguine qu'il WATEAU. employoit dans les têtes, les mains & les chairs, quelquefois les trois crayons étoient mis en ufage; fouvent il fe fervoit de pastel, de couleurs à l'huile, à gouache, enfin tout lui étoit bon, excepté la plume, pourvû que cela fît l'effet qu'il fouhaitoit les hachures de fes deffeins étoient pretque perpendiculaires, quelquefois un peu couchées de droite à gauche, d'autres eftompées avec quelque lavis léger & des coups reffentis la liberté de la main, la légèreté de la touche, une fineffe dans les profils de fes têtes, fon goût de les coëffer, le caractère des figures, des compofitions, l'efprit qui y régne, indiquent aux curieux le nom de Wateau.

:

Les premiers ouvrages de ce maître confiftent en petites figures qu'il a faites dans les plafonds de Claude Audran, & en plufieurs Chinois peints dans les lambris du château de la Muette; fes Ouvrages font tous tableaux de chevalet, celui qu'il a donné à l'Académie, eft un pélerinage à Cyrhère.

Son œuvre compose trois volumes, & contient cinq cens foixante-trois planches: le premier volume comprend cent trente fujets hiftoriés; les deux autres qui font des études renferment trois cens cinquante piéces de fujets de caprice parmi lefquels il y a feize paysages, trente figures Chi noifes & cinquante-trois ornemens, ou paravens dont plufieurs font gravés de fa main, & de M. Boucher. Les autres qui ont exécuté les fujets hiftoriés, font Audran, Thomaffin, Defplaces, Tardieu, Cochin, Simonneau, Joullain, Baron,

Larmessin, Aveline, Moyreau, Petit, le Bas,
Cars, Dupuis, Lépicié & autres.

OUDRY.

OUDR Y.

POPE difoit que les préceptes de l'art font ceux de la nature heureux les peintres qui ont fçu faire un fi bon mêlange! Jean Baptifte Oudry né à Paris en 1686, paroît avoir été de ce nombre. Il ne voyoit que des tableaux chez fon pere qui en faifoit commerce, & qui étoit de l'Académie de faint Luc. Le jeune homme devint fon élève; il paffa enfuite chez de Serre peintre des galeres du Roi à Marseille, qui le voulut mener dans cette ville. Son inclination naturelle lui fit demander d'entrer chez Largilliere qui étoit ami de fon pere, & qui l'avança confidérablement dans la partie du coloris. Ce maître qui fçavoit par luimême que le génie eft une force divine, une inspiration fecrete, une lumiere de l'ame qui rend celui qui cultive un art, très-fupérieur à ceux qui dénués de ce talent fuivent la même route. Ce maître, dis-je, qui reconnoifloit dans fon éléve cette excellente partie de la peinture, après lui avoir fait copier au Luxembourg des tableaux de Rubens, le mit à peindre dans tous les genres: ce fut alors qu'il dévoila tous fes talens. Il fe porta naturellement à peindre des animaux, des fruits & des fleurs; fes tableaux étoient accompagnés de fonds d'architecture & de paysages

très-agréables. Dans le tems qu'il peignoit le portrait, il fit celui du Czar Pierre premier, en pied; ce Prince en fut fi content, qu'il l'engagea à le fuivre en Mofcovie, mais fes amis l'en détournerent, & il fut obligé de fe cacher lorfque ce Prince partit. Un jour qu'il peignoit le portrait d'un chaffeur, il l'accompagna de fon chien, & le peignit fi parfaitement, que Largilliere lui dit en badinant: Tu ne feras jamais qu'un peintre de chiens pronoftique qui dans la fuite s'eft trouvé très véritable. Oudry refta cinq années chez Largilliere, à qui il fut aifé, vû les heureufes difpofitions de la nature, d'en faire un habile hom me. Il entra d'abord dans l'Académie de S. Luc, où on le nomma Profeffeur : il expofa dans une place publique, ainfi que plufieurs autres peintres, des tableaux qui lui firent beaucoup d'honneur; cela lui attira l'approbation des meilleurs maîtres de l'Académie Royale: on l'y reçut en 1717, en qualité de peintre d'hiftoire fur une adoration des mages qu'il avoit peinte pour le chapitre de faint Martin des Champs. Son tableau de réception eft l'Abondance.Oudry fut élû Professeur penfionnaire du Roi, avec un logement & un attelier dans le Palais des Tuilleries.

Ses travaux l'annoncerent partout, furtout chez les étrangers dont il recevoit des lettres très-flatteuses on lui fit même préfent de plufieurs médailles d'or; le Comte de Teffin qui l'avoit connu en France, lorsqu'il étoit envoyé extraordinaire de Suéde, parla de lui au Roi de Dannemarck pendant fon ambaffade en ce pays: ce Prince lui fit offrir les conditions les plus avantageufes pour venir en fa cour;& le Prince de Mekelbourg fit bâtir

OUDRY.

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