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fes favorites; il y mettoit tout d'un coup le feu & PARROCEL la liberté de main dont il étoit capable. Avouons le cependant, quoique fes tableaux foient piquans de lumières, leur ton de couleur grise est bien diffé rent de celui de fon pere: il n'a jamais pu prendre le coloris de la nature.

Le caractère doux & aimable de Parrocel lui attiroit des amis. Il a vécu dans le célibat. Tous les foirs, il faifoit un deflein bien arrêté; ordinairement le trait étoit à la plume, & ombré avec du biftre ou de l'encre de la Chine. Il difoit que l'imagination d'un peintre fe remplissoit d'idées, qu'elle prenoit feu, qu'elle s'enflammoit, & que c'étoit-la l'enthousiasme qui produit les belles chofes.

Parrocel eut une attaque de paralyfie en reve nant de Flandre, en 1749, & une autre environ en 1751, qui l'obligea d'aller aux eaux de Bourbon; enfin, deux années après, il est mort aux Gobelins d'une hydropifie de poitrine, en 1752, âgé de foixante-quatre ans.

Le meilleur élève qu'il ait laiffé, eft le fieur de la Rue, agrégé à l'Académie; le fieur Lenfant de l'Académie, eft encore un de fes élèves, ainfi que MM. Egret & Caufet fon filleul, qui loge aux Gobelins.

Ses de feins font pleins de feu & d'intelligence; ordinairement arrêtés par un trait de plume, avec un lavis léger à l'encre de la Chine ou au biftre: on en voit de tout faits à la fanguine, extrêmement pochés, mais d'une grande maniere.

Parrocel a peint pour le Roi, un tableau repréfentant une alte de la maifon de Sa Majesté, c'eft un de fes meilleurs morceaux, bien fini, & de bonne couleur: il eft préfentement à Fontaine

bleau.

bleau ; il y a encore une chaffe à l'éléphant & une
autre au taureau, toutes deux dans les petits appar-
temens de Versailles : ainfi que deux deffus de
de la chambre de Monfeigneur le Dauphin, repré
fentant des fujets de guerre.

porte

Il avoit deffiné en Flandre les dix fujets concers nant les conquêtes du Roi, dont on a vû les defleins au falon; ces tableaux devoient être exécutés d'après ces deffeins pour Choify. Le feul qu'il ait terminé eft celui de la bataille de Fontenoy, qui eft dans la galerie de Choify: le Roi y paroît à cheval, parlant à M. d'Argenfon le Miniftre, & il eft entouré de plufieurs Officiers Généraux, dont les têtes font affez reffemblantės. Parrocel avoit com> mencé la bataille de Lawfeld étant paralytique, & il ne la put terminer.

Ses autres ouvrages font, un portrait du Roi à cheval, pour le Prince Charles de Lorraine; celui de M. le Duc d'Orléans dernier morr, auffi à chèval, dont la tête eft de Coypel; & celui de M. le Duc d'Orléans d'aujourd'hui. Il a fait plufieurs ta bleaux de batailles, entr'autres, une rencontre de cavalerie, gravée par le fieur Preicler, pour le Roi de Danemarc dernier mort', ainsi que fon portrait à cheval; celui du Roi à cheval, gravé par Lar meffin, & un autre par Thomaffin; plus une bataille de cavalerie; deux campemens de Gardes Suiffes & Françoifes; une bataille de Cuiraffiers; un coup de tonnerre; un repos; une marche d'infanterie; une attaque; un espion qu'on amene au Général; un morceau pour le buffet de la falle à manger du Roi, à Fontainebleau. Il fit, pendant la prévôté du Président Turgot, un deflein de TOME IV Ee

PARROCEL

PARROCEL.

cent-dix pieds de longueur, repréfentant la publication de la paix, faite en 1748: il a laiffé par teftament ce magnifique deffein à l'Académie ; il devoit l'exécuter en peinture.

Plufieurs deffeins de batailles & de fujets d'hiftoire, ainfi que des études de cavalerie, font répandus dans les cabinets de Paris. On voit encore quelques traits de l'hiftoire de Charles I, Roi d'Angleterre; des morceaux pour les livres de la Gueriniere, & les modéles des habits uniformes des troupes, fous le titre de Différens habits de cavalerie & d'infanterie, dont il a gravé quatre à cinq feuilles au trait. La chaffe du lion & celle du tigre peintes pour le Duc de Mortemart, font gravées par Defplaces; & le Bas a gravé trois piéces, une rencontre de cavalerie l'épée à la main, une halte de Gardes Françoifes, une des Gardes Suiffes; Cochin a fait un camp volant, & un retour de campagne. Il ya un deffein de cinq pieds de long, qui eft une efcarmouche de huffards, qu'on devoit graver. Cochin a fait encore plufieurs fujets de guerre, ainfi que Crefpy, Thomaffin, G.

Scotin.

Les quatre Heures du jour en hauteur, font de le Bas.

La défaite des Ligueurs par Henri IV.
Un combat de cavalerie gravé par Marcenay.

NICOLAS LANCRET.

Α

C'a été un grand avantage pour cet artifte, d'a- NICOLAS voir été précédé par un génie qui lui a frayé une LANCRET route dont il a fçu fi bien profiter. Nicolas Lancret né à Paris en 1690, fut d'abord destiné à être graveur en creux; fon génie, qui devoit lui mériter une place diftinguée dans les fastes de la peinture, le porta vers ce bel art, & on le fit étudier chez Pierre d'Ulin, profeffeur de l'Académie. Inftruit dans cette Ecole des principes généraux, il fe décida pour le genre de peinture de Wateau, qui étoit alors extrêmement à la mode. Les fources où avoit puifé ce gracieux maître, ne lui étoient pas inconnues; il alla les chercher comme lui chez Gillot heureusement Wateau, qui l'aimoit lui fit fentir que les maîtres ne font bons que juf qu'à un certain point, qu'on perd enfuite fon tems, qu'on court rifque même de n'être jamais qu'un copiste, fi l'on n'étudie d'après la nature fi fertile en beautés de tous les gentes. Lancret le crut; il ne confulta qu'elle. Il compofa deux tableaux dont Wateau parut fi fatisfait, qu'il ne put résister au plaifir de l'embrafler. Ces prémices d'un rare génie dans un âge fi tendre, étonnerent tous les amateurs, & il fut agréé à l'Académie fur ces deux tableaux.

Lancret, encouragé par ces premiers fuccès, fit des études fuivies, & des progrès fi furprenans

É e ij

que Wateau même en devint jaloux. Quelques ta

NICOLAS bleaux expofés dans une place publique, parurent LANCRET. à nombre de connoiffeurs, être de la main de ce maître autre redoublernent de jaloufie,qui rompit toute liaison entre ces deux peintres.

La réputation de Lancret s'accrut de jour en jour; on s'empreffa d'avoir de fes ouvrages; on leur donna place dans les meilleurs cabinets. Un amateur même en ayant commandé quatre, dont il fixa le prix, fut fi content des deux premiers, qu'il augmenta de moitié celui dont on étoit convenu. Nicolas Lancret fut reçu à l'Académie, en 1719, fous le titre de peintre de fêtes galantes, & en 1735 il fut fait confeiller. Deux aimables tableaux furent donnés pour fa réception, & l'on peut dire qu'ils fe diftinguent dans les falles de l'Académie,

Une fupériorité de talens, un grand amour pour fon art, une vie laborieufe, produifirent la quantité d'ouvrages que nous avons de fa main. Son caractère fincere & affable, la fimplicité de fes inœurs, lui attirerent l'eftime de tous les honnêtes gens. Un brocanteur, qui fentoit combien le pinceau de Lancret lui feroit néceffaire à retoucher finement des tableaux de prix, lui propofa de fe prêter à cette occupation, moyennant une groffe penfion. Il lui répondit: J'aime mieux courir le rifque de faire de mauvais tableaux, que d en gâier de bons. Comme il n'aimoit que l'excellent en peinture, il difoit de plufieurs anciens tableaux: Qu'on encenfoit des ideles. Juge impartial, il vifitoit fouvent les grandes collections des Princes avec le célébre le Moine, le feul de fes confreres qu'il fréquentoit. Tout y étoit examiné, difcuté, critiqué,

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