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DEUXIÈME PARTIE.

DES ARBRES ET PLANTATIONS DES CHEMINS VICINAUX.

CHAPITRE ler.

Exposition sommaire de l'ancienne Jurisprudence concernant les Chemins vicinaux et les Arbres de ces Chemins.

1. Nos rois ne s'étaient occupés, dans leurs ordonnances et réglemens (rapportés ci-devant, première partie, chap. 1), que des grands chemins, ou chemins royaux. Les chemins ordinaires, non entretenus aux dépens du trésor royal, étaient régis par les réglemens des Cours ou tribunaux, par les dispositions des coutumes écrites, par les usages reçus en chaque contrée.

Plusieurs Coutumes contenaient en effet plusieurs dispositions touchant ces sortes de chemins.

2. Ainsi, la Coutume de LILLE, titre 1, article 17, portait:

« Aux seigneurs justiciers ou vicomtiers, competent et appartiennent, s'il n'appert du contraire, tous les chemins, frocs, flégards, et les Ou PLANTATIONS croissans sur iceux; et s'ils abordent à deux diverses seigneuries, ils compètent à chacun seigneur, par moitié. »

ARBRES

3. La Coutume d'ARTOIS disait pareillement, article 5:

Lajustice du vicomte s'étend à frocs, flégards, chemins et voyeries, étant à l'encontre des ténemens de son fief; en façon que si les héritages d'un côté et d'autre sont à lui, ou de lui tenans, telles voies et chemins, et ce qui y croít, lui appar

tiennent. »

4. La Coutume d'AMIENS, article 184, celle de Montreuil-sur-Mer, article 19, et plusieurs autres, avaient des dispositions semblables ou équivalentes.

5. Cependant celle de BOULLENOIS, ou Boulonnois, disait, par exception, article 40:

« Les fruits de tous arbres estans ès voyes publiques, rues et places communes d'aucuns villages, appartiennent aux habitans, qui les peuvent recueillir, prendre et abattre, pour en user à leur plaisir. >>

6. La Coutume de DOUAY dit plus, article 6:
« Il est loisible à tous propriétaires, de planter

sur les flégards (1), à cinq pieds près, et à l'endroit de leurs héritages; pourvu, qu'en ce faisant, ne soit donné empeschement au préjudice du chemin; et prendre à leur proffit les dépouilles des arbres par eux ainsi plantés. »

7. Sur la largeur des chemins, les mêmes coutumes faisaient distinction entre leurs différentes sortes ou destinations.

Pour un chemin vicomtier, ou vicinal, c'est-àdire communiquant de bourg à bourg; la plupart prescrivaient 30 pieds (2) ; quelques-unes 24; d'autres, 20, 18 ou 16 seulement (3).

8. La Coutume de BRETAGNE se contentait de dire, art. 49: Que les seigneurs ayant juridiction en leur terre, doivent garder et borner les routes qui ne sont pas en la garde du Prince.

9. L'incohérence des diverses dispositions coutumières sur ce sujet, ne pouvait manquer de faire naître souvent des procès, entre les seigneurs, les riverains et les communautés d'habitans.

10. Entre un grand nombre d'ARRÊTS du Parlement de Paris, nous rappellerons seulement ceux ci-après :

er

Du 1. août 1750, Arrêt de la première chambre des Enquêtes, entre le seigneur haut-justicier, et

(1) Terrains en friches et pâtures, bordant les chemins de traverse.

(2) Valois, Boulenois, Saint-Omer, Senlis, etc. (3) Touraine, Lodunois, etc.

les habitans de Villers, près Saint-Quentin, en Picardie, qui, entre autres dispositions, autorise ledit seigneur à planter les chemins hors du village, autres que les chemins royaux, et sans préjudicier aux droits des propriétaires des terres voisines; savoir, deux rangées d'arbres sur les chemins ayant trente pieds de large, ou plus; en laissant 18 pieds de distance de l'un à l'autre, et 30 pieds entre les deux rangs parallèles; et sur ceux n'ayant que vingt pieds, une seule rangée, également à dixhuit pieds de l'autre, sur la même ligne; et encore, sous la condition que ledit seigneur fera ébrancher les arbres, à 15 pieds de hauteur de terre, et méme plus, s'il est besoin, pour donner de l'air aux che

mins et terres voisines.

Du 17 juin 1767, entre le comte d'Estourmel, seigneur du Frétoy, et le chapitre de Noyon, autre Arrêt par lequel ledit comte d'Estourmel, comme haut-justicier et voyer, est maintenu dans le droit et possession de planter sur le bord des chemins qui traversent sa seigneurie.

Il est ordonné : 1°. que les plantations par lui faites sur seize chemins, dont les uns avaient trente huit pieds de largeur, d'autres quarante-deux et quarante-quatre pieds, resteront dans leur état actuel, sans pouvoir en ajouter de nouvelles; 2°. qu'il ne pourra planter le chemin de Condor à Balny, qu'en laissant trente-trois pieds de distance entre les deux rangées d'arbres.

Il est ordonné au chapitre de Noyon d'arracher ceux par lui plantés sur les bords ou dans l'intérieur desdits chemins; sauf à lui de les transplanter dans ses propres terres, et à une distance d'au moins six pieds des plantations du comte d'Estourmel.

11. Du 11 juillet 1759, autre Arrêt qui, en confirmant une sentence interlocutoire de la chambre, appelée les Requétes du Palais, rendue entre la dame de Sénozan, propriétaire de la terre et seigneurie de Mitry, et un propriétaire de terres particulières dans cette seigneurie, relativement à des arbres que les prédécesseurs de celui-ci avaient fait planter sur le chemin vicinal de Mitry à Tremblay, décide implicitement que, dans la Coutume de Paris, les arbres plantés sur le sol même des chemins vicinaux, n'appartiennent point aux particuliers qui les ont plantés, mais au seigneur haut-justicier.

12. Pour la province de Normandie, le pays du Perche et de Chateauneuf en Thimerais, il existe un Arrêt du Conseil, du 28 avril 1671, dont les dispositions sont à remarquer.

Il est ordonné que tous les chemins publics et de traverse de ladite province, pays du Perche, de Cháteauneuf, et circonvoisins, seront incessamment réparés et entretenus, aux frais et dépens des propriétaires des terres adjacentes, avec des cailloux, graviers et fascines; lesquels chemins auront, savoir les chemins publics et vicinaux, seize pieds; et ceux de traverse, huit pieds de passage libre : laquelle largeur sera prise également des deux côtés; et sans que ladite largeur puisse être occupée par des hayes, fossés ou arbres; comme aussi, défenses sont faites à tous propriétaires riverains, de planter aucun arbre le long desdits chemins, si ce n'est à dix pieds de distance de chaque bord.

Le Parlement de Flandre, entre autres, avait rendu, en forme de réglemens, plusieurs arrêts, les 8 avril 1671, 4 mars 1778, et 14 août 1780, qui

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