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lent mémoire s'est proposé un but d'utilité pratique qu'il nous paraît avoir complétement atteint. Il établit par les faits la possibilité de régénérer cette contrée, une des plus malsaines et des moins peuplées de la France, au moyen de la suppression des 18,000 hectares d'étangs qui subsistent encore dans l'ancienne Dombes. Le recommandable travail de M. Guigue est un exemple de ce que peut l'étude intelligente de l'histoire pour la solution de certaines questions économiques.

Histoire religieuse de la Flandre maritime, et en particulier de la ville de Dunkerque, études, par Victor Derode. Dunkerque, imprimerie de B. Kien, Paris, librairie de Didron, 1857, in-8° de 1x-356 pages. -M. V. Derode, connu comme érudit par plusieurs travaux recommandables, parmi lesquels on doit citer une histoire de Lille et une histoire de Dunkerque, a recueilli, dans la nouvelle étude que nous annonçons, les faits les plus importants qui constituent les annales religieuses de la Flandre maritime. Dans ses premiers chapitres, l'auteur, remontant jusqu'aux temps des Gaulois et des Francs, recherche les traces que le druidisme d'abord, et plus tard la religion scandinave, ont laissées dans la contrée. Il nous montre ensuite le christianisme se propageant dans l'ancienne Morinie et y reconstituant l'ordre social sous l'influence d'apôtres zélés, dont le plus célèbre est saint Éloi. Dans la partie de l'ouvrage qui traite du moyen âge, on remarque la touchante légende de sainte Godelieve, le récit des querelles qui éclatèrent en Flandre, à la suite des croisades, entre les Blavoetins et les Ingrekins, c'est-à-dire entre les hommes du parti populaire et la noblesse; on y trouvera aussi des considérations intéressantes sur l'origine de quelques chants populaires flamands. Les chapitres consacrés à l'histoire de la réforme et au récit des événements de la révolution dans la Flandre maritime sont particulièrement développés, et abondent en faits curieux dont M. Derode fait très-bien ressortir l'intérêt et ia signification morale. Dunkerque et ses établissements religieux occupent naturellement une grande place dans cet ouvrage. Dunkerque n'est cité dans aucun document historique antérieur à l'an 1067. M. Derode démontre, à l'aide des titres déposés aux archives locales, que, sur l'emplacement de cette ville, se trouvait auparavant un bourg nommé Saint-Gilles, qui a laissé son nom à l'une des rues de la cité moderne.

La villa Brennacum, étude historique, par Stanislas Prioux, correspondant du comité de la langue, de l'histoire et des arts de la France près le ministère de l'instruction publique et des cultes. Imprimerie de Beau, à Saint-Germain; librairie de Morel, à Soissons; 1857, in-12 de 105 pages. -Par une suite de rapprochements et de citations historiques d'un grand poids, M. Prioux établit, conformément à l'opinion de la plupart des historiens, mais contrairement à celle de l'abbé Lebeuf, que la ville de Braine sur la Vesle correspond exactement au Brennacum de Grégoire de Tours et d'Aimoin, lequel ne diffère pas du Braina de Frodoard. On trouve, à la fin du volume, un relevé de tous les textes sur lesquels l'auteur appuie sa démonstration.

Archives, bibliothèque et inscriptions de Malte, par M. L. de Mas Latrie. Paris, Imprimerie impériale, 1857, in-8° de 240 pages. Les documents historiques conservés dans les dépôts publics de Malte intéressent la France à tant de titres, qu'on peut s'étonner qu'ils aient été si rarement jusqu'ici l'objet des recherches de nos érudits. M. de Mas Latrie, dans les voyages qu'il a faits pour recueillir les matériaux de son grand travail sur l'île de Chypre, a eu l'occasion de mettre à profit ces documents, et il est un des premiers savants français qui en aient signalé l'importance. Personne plus que lui n'était en état de faire connaître tout ce que les archives, la bibliothèque et l'église cathédrale de Malte renferment de curieux,

soit pour l'histoire de l'ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem, qui fut comme une institution française par sa composition, sa législation et la succession de ses grands maîtres, soit pour l'histoire générale, la géographie et l'archéologie du moyen âge. Tel est, en effet, le sujet du livre intéressant dont nous annonçons la publication. La première partie de l'ouvrage traite des archives de Malte, dépôt organisé rẻcemment (1851) et confié à la direction de M. le docteur Louis Vella. La mise en ordre de ces archives n'étant pas achevée, M. de Mas Latrie a été obligé d'établir lui-même un ordre méthodique pour classer les renseignements qu'il y a recueillis. Il divise en quinze séries ou catégories principales les registres, portefeuilles, rouleaux, liasses et titres divers que renferme aujourd'hui ce dépôt, et donne avec soin, pour chacune de ces séries, un aperçu de ce qu'on y trouve de plus digne d'attention. Nous avons remarqué surtout dans cette énumération une collection de bulles de papes de l'an 1163 au xvII° siècle, des diplômes originaux des rois, des princes et des prélats de Terre sainte, de Chypre et d'Europe, en faveur de l'ordre de Saint-Jean, de l'an 1107 à l'an 1259, des bulles originales des grands maîtres, du XII au XVII° siècle, les registres de délibération des chapitres généraux de l'ordre depuis l'an 1333, un rouleau écrit vers 1357, et renfermant la traduction latine des statuts et règlements de l'ordre, rédigés anciennement en français, pièce à laquelle se rattache, suivant la remarque de l'auteur, un intérêt particulier, parce qu'elle est un indice du temps d'arrêt qu'il y a eu, dès la première moitié du xiv° siècle, dans la propagation de la langue française. Le même rouleau se termine par une chronologie des grands maîtres de l'hôpital depuis Gérard, considéré comme le premier grand maître, mort en 1120, jusqu'à Dieudonné de Gozon, élu en 1346. Cette chronologie, reproduite en entier à la suite de la notice, fournit à M. de Mas Latrie l'occasion de signaler une erreur singulière à laquelle a donné lieu le nom de ce premier grand maître, appelé Gérard Tunc par plusieurs historiens, par suite d'une lecture inattentive de quelque ancien texte commençant par les mots : Gerardus tunc. La seconde partie du volume contient, outre une notice sur la bibliothèque de Malte, dont la fondation originaire est due à Louis Guérin de Tencin, bailli de l'ordre, la liste détaillée des 390 manuscrits de cette bibliothèque. Dans la troisième et dernière partie de son travail, qui est aussi la plus étendue, M. de Mas Latrie publie une nouvelle collection, revue, corrigée et complétée, de toutes les épitaphes et inscriptions de l'église cathédrale de Malte, qui est, par la richesse de son ornementation, une œuvre d'art si remarquable, et par le nombre de ses tombeaux, un véritable monument de l'histoire de l'ordre de Saint-Jean-deJérusalem. La plus grande partie de ces inscriptions se trouvait déjà dans un ouvrage publié à Malte et intitulé: Collezione di monumenti e tapidi sepolcrali dei militi Gerosolimitani nella chiesa di San Giovanni in Malta, disegnati in contorno litografico da Rafaele Caruana (1838-1840, 3 vol. in-fol.); mais plusieurs textes n'y avaient été que partiellement reproduits, et d'autres, plus particulièrement les inscriptions commémoratives et non funéraires, y manquaient entièrement. Dans la nouvelle édition, les textes de Caruana ont été collationnés sur chaque monument, et quelquefois corrigés ou complétés; toutes les épitaphes historiques manquant à son recueil, au nombre d'environ cinquante, ont été entièrement transcrites. Cet important travail, qui remet en honneur tant de noms et de souvenirs glorieux de l'ancienne France, a été exécuté avec le plus grand soin, sous la direction de M. de Mas Latrie, par MM. Auguste Paradis, archiviste paléographe, et Athanase Rendu, élève de l'École des chartes.

PAYS-BAS.

Al. Zamakhscharii lexicon geographicum... Dictionnaire géographique de Za-
makhschari, texte arabe copié par M. Mathias Salverda de Grave, et publié par les
soins de M. le professeur Juynboll. Leyde, 1856, in-8°. — Zamakhschari, écrivain
arabe, originaire du Kharizm, au nord de l'Oxus, florissait au commencement
du x siècle de l'ère chrétienne. Il est surtout célèbre par un commentaire fort
étendu sur le Coran, ouvrage qui s'imprime en ce moment à Calcutta. Ce diction-
naire, dont les exemplaires sont fort rares, car on ne connaissait jusqu'à présent
que celui de la bibliothèque de Leyde, d'après lequel a été donnée l'édition que
nous annonçons, traite des lieux dont les noms sont cités dans les anciennes poésies
arabes, composées, en général, avant Mahomet; aussi l'auteur ne s'occupe-t-il
guère que des lieux appartenant à la presqu'île de l'Arabie. Ce n'est pas le seul
livre de ce genre que nous présente la littérature des Arabes. On sait que de tout
temps, chez ce peuple, les monuments primitifs de la poésie ont servi de base aux
études littéraires. Pour l'interprétation de ces anciens poetes arabes, un dictionnaire
géographique est particulièrement utile, car un nom de lieu mal compris suffit par-
fois pour cacher le sens d'un passage entier. Souvent Zamakhshari joint au nom
de lieu la citation du vers ou des vers où le lieu a été mentionné. Ajoutons que
cet écrivain, ayant résidé longtemps en Arabie, où il composa son commentaire
du Coran, a pu profiter de son séjour dans le pays pour recueillir des notions qui
auraient échappé à d'autres. M. Juynboll ne s'est pas contenté de revoir la copie
du texte, il l'a fait précéder d'une préface contenant des indications fort instructives
sur l'auteur et sur le manuscrit qui a servi à l'édition. A la fin du texte sont plu-
sieurs index, destinés à faciliter l'usage du livre. Le titre particulier du traité est
celui-ci : Livre des montagnes, des lieux et des eaux. Par eaux, il faut entendre les
sources, les puits et les citernes, qu'il est si important, pour un étranger, de con-
naître, dans une région où l'on est exposé à marcher pendant plusieurs jours sans
rencontrer une seule goutte d'eau.

TABLE.

Pages.

Tables de la lune, par P. A. Hansen. (1a article de M. Biot.). . . . .

601

Travels and Researches in Chaldæa and Susiana, etc. (2o article de M. Quatre-
mère.)..

614

Clef inédite du Grand Cyrus. (2o article de M. Cousin.)..... •

633

Nouvelles littéraires...

656

FIN DE LA TABLE.

DES SAVANTS.

NOVEMBRE 1857.

INSCRIPTIONS CHRÉTIENNES DE LA GAULE ANTÉRIEURES AU VIII SIÈCLE, réunies et annotées par Edmond Le Blant. Ouvrage couronné par l'Institut de France (Académie des inscriptions et belleslettres). Tome 1er. Provinces gallicanes. Paris, imprimé par ordre de l'Empereur à l'Imprimerie impériale; 1856, 498 pages in-4°, avec 42 planches.

PREMIER ARTICLE.

Pour peu qu'on considère avec des yeux attentifs les travaux philologiques de notre époque, on ne peut disconvenir de la faveur que les études épigraphiques latines ont obtenue, ou plutôt retrouvée, depuis une trentaine d'années. Vers la fin du siècle dernier et au commencement du nôtre, l'Italie seule semble avoir été jalouse d'ajouter de nouveaux et importants ouvrages, dans cette branche d'érudition, au riche et glorieux dépôt que lui avaient laissé les siècles précédents; les noms de Marini, de Morcelli, de Zaccaria, peuvent figurer sans trop de désavantage à côté de ceux de leurs successeurs MM. Cavedoni, Furlanetto, Garucci, Labus, Secchi, Vermiglioli, et même à côté du nom de M. Bartolomeo Borghesi. Mais, dans d'autres contrées de l'Europe, en France, en Angleterre, en Allemagne, les philologues éminents qui ont illustré la fin du xvir siècle s'occupèrent peu d'épigraphie latine. En littérature comme ailleurs, chaque chose a son temps. La direction que suivent les travaux d'érudition n'est jamais due à l'aveugle fortune,

au seul caprice du hasard. Les événements politiques, l'esprit qui domine dans les grands établissements littéraires, l'impulsion donnée par les maîtres de la science à leurs disciples, l'enchaînement des circonstances, disposent les esprits à tel genre de méditation et de recherches plutôt qu'à tel autre; et souvent ce sont des causes extérieures qui font reprendre avec ardeur des études négligées depuis des années, études d'autant plus fécondes en résultats, que des savants y consacrent des efforts plus nombreux et plus assidus.

C'est surtout depuis que les armes françaises ont ouvert l'Afrique à la civilisation de l'Europe que l'épigraphie latine, dans presque toutes les contrées de notre Occident, est redevenue l'objet de travaux importants. Des philologues d'un ordre supérieur, cherchant le passé partout, l'ont poursuivi dans tous ses débris, quelque épars, quelque dispersés qu'ils fussent; grâce à leurs investigations, les manuscrits palimpsestes ont fourni des textes que l'on croyait perdus, les marbres ont offert des faits nouveaux à expliquer, des conjectures à approfondir, des erreurs à redresser; à mesure que à mesure que les découvertes se multipliaient, on s'est aperçu que plus d'une fois les historiens anciens et modernes, ces derniers par nécessité, les autres par dédain pour les recherches pénibles et minutieuses, ont omis d'innombrables détails curieux et substitué même la fiction ou la vraisemblance à la vérité. Nous ne pouvons citer ici que quelques-uns de ces ouvrages, qui, de nos jours, ont agrandi le domaine de la science; nous ne signalerons que le grand recueil de M. Léon Renier comme l'acquisition la plus importante que l'épigraphie latine ait faite depuis le xvr° siècle, travail considérable, riche en renseignements précieux sur l'administration civile et militaire de l'Afrique romaine, sur les usages, la vie intime et les goûts littéraires de ses habitants, sur l'organisation de ses colonies et de ses municipes; à cet égard, ce seul recueil nous semble plus instructif que tous les auteurs

1

Inscriptions romaines de l'Algérie, recueillies et publiées sous les auspices de S. E. M. le ministre de l'instruction publique et des cultes, par M. Léon Renier, membre de l'Institut. Paris, Imprimerie impériale, 1855, in-folio. Cet important ouvrage est publié par livraisons, dont dix ont déjà paru; elles contiennent les inscriptions de la Numidie, au nombre de 3,265, et le commencement des inscriptions de la Mauritanie Sitifienne. Nous croyons que celles-ci seront au nombre d'environ 300, et celles de la Mauritanie Césarienne au nombre d'environ 500; ce qui fera pour le tout plus de 4,000 monuments. D'après le plan adopté, l'ouvrage, publié en vingt-cinq livraisons, formera deux volumes, le premier contenant le texte des inscriptions et les tables, le second le commentaire, dans lequel l'auteur développera avec fruit sa profonde critique. Les deux volumes seront terminés, nous l'espérons, à la fin de l'année 1858.

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