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seigneurs le soleil et la lune, et de jurer par | eux; de croire le destin, la fortune, la naissance heureuse ou malheureuse, et quelques autres superstitions semblables. Il est à croire qu'elles régnoient principalement chez les peuples nouvellement convertis de la Belgique.

monastère un privilége que l'on y conserve encore en original, écrit sur du papier d'Egypte, et dont l'écriture, lestyle et l'orthographe mar quent la barbarie du siècle (1). Le roi dit, qu'à sa prière, Landry, évêque de Paris a accordé un privilége à ce monastère, afin que les moiSaint Eloi avoit fait grand nombre de mira- nes puissent y prier plus en repos. C'est pourcles de son vivant, et il n'en fit pas moins de- quoi il defend qu'aucun évêque ni autre ne puis sa mort (1). Incontinent après, il apparut puissent rien diminuer des terres ou des serfs la nuit à un homme de la cour, et lui ordonna de ce monastère, même à titre d'échange, sans d'aller aussitôt dire à la reine Bathilde qu'elle le consentement de la communauté et la perquittat pour l'amour de Jésus-Christ, les orne- mission du roi, ni enlever les calices, les croix, ments d'or et de pierreries qu'elle portoit en- les ornements d'autel, les livres et les autres core. Celui-ci n'ayant tenu compte de cette vi- meubles et les emporter à la ville. A la charge sion, saint Eloi lui apparut jusqu'à trois fois; que la psalmodie perpétuelle jour et nuit y sera et enfin il fut saisi d'une grosse fièvre. La reine célébrée comme elle a été instituée du temps du qui visitoit les malades le vint voir, et lui de- roi Dagobert, et comme elle se fait à Saintmanda la cause de sa maladie. Il lui raconta ce Maurice d'Agaune (2). Ce privilége est souscrit qui s'étoit passé et aussitôt il fut guéri. La reine par le roi, par son référendaire ou chanceobéit sans différer et ne garda que des brace- lier, Beroalde, et par vingt-quatre évoques lets d'or. Elle donna tout aux pauvres, à la dont les plus connus sont : Aunemond de Lyon, réserve de ce qui étoit plus curieux, dont elle Chaoalde de Vienne, Rauracus de Nevers, fit une croix pour mettre à la tête de saint Eloi; Etherius d'Embrun, saint Eloi de Noyon, Rielle fit faire aussi d'or et d'argent cette espèce gobert de Tours, saint Landry de Paris, Vul de dais qu'ils nommoient Répa, pour mettre folend de Bourges, Pallade d'Auxerre, Clair au-dessus de son tombeau, disant qu'il étoit de Grenoble, Armentarius de Seus. Ensuite juste d'orner la sépulture de celui qui avoit sont les souscriptions de plusieurs seigneurs et orné celles de tant de saints. Les grands, à son grands officiers, entre lesquels est Ebrouin, exemple, y offrirent grande quantité d'or et depuis maire du palais. La date est de Clichy, de pierreries. Comme cet ornement avoit un le douzième des calendes de juillet, la sixième grand éclat, on le couvroit pendant le carême année du règne de Clovis ; c'est-à-dire le vingtd'un linge brodé de soie; mais quelques jours deuxième de juin six cent cinquante-trois. Et après on s'aperçut que ce linge dégouttoit l'on voit par ces souscriptions qu'il y eut en d'une certaine liqueur (2). On le pressa dans ce lieu une grande assemblée d'évêques et de un vase; et cette liqueur servit à guérir plu- seigneurs de tout le royaume. Aussi la comp sieurs malades. On voit ici la coutume de cou-te-t-on entre les conciles (5). vrir, pendant les jours de pénitence, ce qu'il y avoit de brillant dans les églises.

La reine Bathilde gouvernoit alors le royaume; car le roi Clovis II. son époux, étoit mort l'an six cent cinquante-six, après avoir régné dix-huit ans et en avoir vécu seulement vingt et un (5). Depuis lui, les rois de France de cette première race ne firent presque plus rien par eux-mêmes, laissant toute l'autorité aux maires de leur palais; ce qui les a fait nommer rois fainéants. Clovis avoit réuni à sa couronne le royaume d'Austrasie, après la mort de son frère, Sigebert III, mort en six cent cinquantequatre le premier jour de février. Il fut enterré à Metz, et sa pieté l'a fait honorer comme saint. Il se servit entre autres des conseils de saint Cunibert, évêque de Cologne, qui gouverna cette église pendant quarante ans et mourut en six cent soixante-quatre, le douzième de novembre. Quant à Clovis, il fut enterré à Saint-Denis en France (4).

XXVII. Privilége pour saint Denis.
Trois ans auparavant, il avoit accordé à ce

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XXVIII. Formules de Marculfe.

La conformité de ce privilége avec celui que rapporte Marculfe confirme l'opinion commune qu'il vivoit en ce même temps et que l'évêque Landry, à qui il adresse son livre, est celui de Paris (4). Marculfe étoit un moine, agé de plus de soixante et dix ans, qui, par l'ordre de cet évêque, fit un recueil de formules des actes les plus ordinaires, suivant la coutume du lieu où il demeuroit, et le divisa en deux livres, dont le premier contient principalement les chartes royales, c'est-à-dire les actes qui venoient du palais, et le second contient les actes qui se passoient entre particuliers en chaque pays, connus alors sous le nom de charte pagenses. On peut beaucoup apprendre dans ce recueil pour les antiquites ecclesias tiques.

La première formule est d'un privilege accordé à un monastère par l'évêque diocésain, à l'exemple des priviléges de Lérins, d'Agaune, de Luxeu et de tant d'autres établis dans tout

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le

royaume des François. L'évêque promet de donner les ordres à celui que l'abbé et la communauté lui présenteront, pour en exercer les fonctions dans le monastère. D'y bénir un autel, et envoyer aux moines tous les ans le saintchrême, s'ils le demandent. De leur donner pour abbé 'celui qu'ils auront choisi, le tout gratuitement. L'évêque ni les archidiacres, ou les autres administrateurs de l'église, n'auront aucun autre pouvoir sur le monastère et les biens qui lui appartiennent, meubles ou immeubles, ni sur les offrandes de l'autel. L'évêque n'entrera dans le monastère, qu'à la prière de l'abbé et des moines, pour l'oraison, et, après les saints mystères, il se contentera d'une simple benediction, c'est-à-dire d'un repas modeste et se retirera pour ne point troubler leur repos. Les moines seront corriges par l'abbé, suivant la règle, s'il le peut, sinon l'évèque y tiendra la main. Ce privilege porte pour peine trois ans d'excommunication et devoit être souscrit par plusieurs évèques. I tend plutôt à garantir les moines des entreprises injustes des mauvais évêques, qu'à les soustraire à la juridiction des bons; et c'est toutefois l'origine de leurs exemptions (1).

J'ai marqué celle du monastère de Lérins à l'occasion du troisième concile d'Arles où elle fut confirmée (2). Le privilége d'Agaune que l'on rapporte ne paroît pas sûr, et l'on ne trouve plus celui de Luxeu. Saint Bertulfe, troisième abbé de Bobio, obtint du pape Honorius un privilége pour son monastère, afin, dit Jonas, qu'aucun évêque n entreprît d'y exercer aucune domination. En suite du privilége de l'évêque, Marculfe met la confirmation du roi, qui tend principalement à défendre l'usurpation des biens du monastère, comme nous venons de voir, dans la charte de Clovis II, pour Saint-Denis. La troisième formule est l'immunité accordée par le roi à une église (5). Elle porte défense à tous les juges d'entrer dans aucun lieu de sa dépendance pour y tenir leur audience ou exiger des amendes, d'y prendre aucun droit de gite ou repas, ni de rien lever sur les habitants de ses terres, libres ou serfs. Le roi fait don de tous ces droits à l'église.

Il y a trois actes touchant l'ordination des évêques. Premièrement, l'ordre ou précepte, car on le nommoit ainsi, par lequel le roi déclare au métropolitain, qu'ayant appris la mort d'un tel évêque, il a résolu, de l'avis des évêques et des grands, de lui donner un tel pour successeur. C'est pourquoi, ajoute-t-il, nous vous ordonnons, qu'avec les autres évêques qui auront reçu nos lettres, vous ayez à le consacrer selon les règles. Ensuite est une autre lettre qui semble être pour un des évêques de la province (4). Enfin, l'on voit la re

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quête des citoyens de la ville épiscopale, par laquelle ils demandent au roi de leur donner pour évêque un tel, dont ils connoissent le mérite. Ce dernier acte fait voir que l'on attendoit le choix, ou du moins le consentement du peuple; et les deux autres peuvent exprimer le consentement du roi, si l'on veut les accorder avec le concile de Paris sous saint Germain, et avec tant d'autres qui maintiennent la liberté des élections. Ou bien il faudroit dire que ces formules marquent moins le droit que le fait, et ce qui se pratiquoit effectivement contre les règles (1).

On voit dans Marculfe la permission du roi, nécessaire à un homme libre, pour entrer dans le clergé, comme il est marqué dans le premier concile d'Orléans. Il faut non-seulement que l'homme soit libre, mais qu'il ne soit point inscrit dans le poulier, ou registre, public des hommes sujets au cens, et, en ce cas, on lui permet de se faire couper les cheveux pour servir à une telle église ou à un tel monastère. Un évêque étant accusé de retenir le bien d'autrui, le roi lui ordonne de le restituer ou de venir dire ses raisons en sa présence, soit en personne, soit par un député (2). La même plainte étant portée contre un abbé ou clerc, le roi ordonne à l'évêque de l'obliger à venir se défendre à sa cour.

Un mari et une femme ayant donné une terre à l'église, l'évêque leur en accorde l'usufruit, ou au survivant d'eux deux. Cette demandé s'appeloit præcaria et la concession de l'évêque præstaria, et elle devoit régulièrement être renouvelée de cinq ans en cinq ans. Les donations faites aux églises devoient être insinuées comme les autres, et l'on voit ici la forme de l'insinuation suivant la loi romaine (5). Les évêques, aux principales fètes, comme à Pâques et à Noël, envoyoient des eulogies aux autres évêques, aux rois ou à leurs amis; et ces eulogies étoient du pain qu'ils avoient béni, ou quelque autre petit présent. Marculfe rapportela formule des lettres qui les accompagnoient. Enfin, il rapporte les lettres de recommandation que les évêques donnoient à ceux qu'ils envoyoient loin, ou qui alloient en pèlerinage à Rome, ou ailleurs, et une recommandation à l'abbé pour celui qui vouloit s'engager dans son monastère. C'est ce qui m'a paru de plus remarquable dans les formules de Marculfe. Son exemple fait voir qu'il y avoit dehors des moines employés pour les affaires temporelles, du moins pour en écrire les actes; car, la plupart de ses formules sont de ce genre. C'étoit l'effet de l'ignorance des laïques, barbares ou serfs pour la plupart. Depuis ce temps, c'est-à-dire environ l'an six cent soixante, l'église de France tomba dans un grand relâchement. Pendant plus de quatre vingts ans, il ne se tint presque

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point de conciles, et les archevêques exercè- 1 le diocèse d'Amiens, étoit aussi une maison du
rent peu
d'autorité pour maintenir et renou- domaine du roi ; et on croit qu'il fut fondé vers
veler la discipline (1).

XXIX. Sainte Bathilde.

Le roi Clovis Il laissa trois fils, Clotaire,
Childeric et Theodoric, tous en bas âge. Les
François reconnurent pour roi l'aine, Clo-
taire Ill; et la reine Bathilde, sa mère, gou-
verna le royaume, avec le conseil d'Erchinoald,
maire du palais, et de quelques évêques, entre
autres, saint Eloi, saint Ouen, saint Léger
d'Autun, et Crodebert de Paris (2). Bathilde,
ou, comme on la nommoit alors, Baldéchilde,
avoit été vendue en France comme esclave,
bien qu'elle fùt née de race royale, chez les
Anglois Saxons; elle plut tellement à son maî-
tre Erchinoald, qu'il la fit servir à sa chambre
pour lui donner à boire, et, sa femme étant
morte, il voulut même l'épouser. Mais elle se
cacha si bien, qu'elle l'évita. Le roi l'épousa,
et étant devenue reine, elle n'usa de son pou-
voir que pour faire du bien. Elle chérissoit les
évêques, les moines, les pauvres; et, pour lui
aider dans la distribution de ses aumônes, le
roi lui donna Gènes, alors abbé, et depuis ar-
chevê que de Lyon, Après la mort du roi, son
époux, elle s'appliqua, par le conseil des saints
evèques, à bannir la simonie, qui faisoit tou-
jours de grands progrès, et à ôter des exac-
tions qui réduisoient les particuliers à faire pé-
rir leurs enfants.

Elle fonda deux monastères considérables,
Chelles et Corbie. Sainte Clothilde avoit donné
les commencements à celui de Chelles, situé
près de la Marne, dans le diocèse de Paris (3).
C'étoit originairement une maison royale; et
sainte Bathilde augmenta considérablement ce
monastère, pour s'y retirer quand le roi Clo-
taire pourroit gouverner par lui-même. Ayant
tout preparé, elle demanda à sainte Théchilde,
abbesse de Jouarre, des filles pour gouverner
la nouvelle maison avec Berthile, dont elle con-
noissoit la vertu. C'étoit une fille noble du
Soissonnois, qui, s'étant donnée à Dieu, par
le conseil de saint Ouen, étoit entrée dans le
monastère de Jouarre et soulageoit l'abbesse
dans ses fonctions. Elle fut donc la première
abbesse de Chelles, et elle gouverna pendant
quarante-six ans cette maison, dont on rap-
porte la fondation à l'an six cent cinquante-six.
La réputation de sainte Bathilde y attira des re-
ligieuses, non-seulement du voisinage, mais
d'outre-mer, c'est-à-dire d'Angleterre. Ce mo-
nastère étoit double; et, outre la communauté
de filles, qui étoit la principale, il y en avoit
une de moines.

Le monastère de Corbie, sur la Somme, dans

92. Vita S. Balt. t. 2. Act.
B. p. 775.

(1) C. 42, 43, 44, 45, 46,
47, 49, 50, 51, 48. Epist.
Bonif. ad Zachar. c. 2. t. 6, (3 Sup. liv. XXXVIII. n. 27.
Conc. p. 1495.
Vita S. Bertil. 6. 4. to. 5,
(2) Fredeg. Cont. 1, n. Act. B. p. 23.

l'an six cent cinquante-sept. Le premier abbé
fut Théodefrid, auparavant moine de Luxeu,
et depuis évêque. Le roi Clotaire et la reine,
sa mère, donnèrent à ce monastère, non-seule-
ment la terre de Corbie, mais plusieurs autres,
jusqu'au nombre de dix, et une partie de la
foret de Vigogne, avec l'immunité telle qu'elle
est marquée dans les formules de Marculfe (1).
Bertefrid, évêque d'Amiens, accorda ensuite
à ce monastère un privilege conforme aux
mêmes formules, daté de la septième année
de Clotaire, qui est l'an six cent soixante-deux,
et souscrit par seize évêques.

Sainte Bathilde fit accorder de semblables pri-
viléges à plusieurs autres monastères, pour
y conserver la régularité; particulièrement à
Saint-Denis, Saint-Germain, Saint-Médard,
Saint-Pierre, Saint-Aignan et Saint-Martin (2).
Elle avoit grande compassion des captifs, et
défendit par toute la France d'en envoyer au-
dehors. Elle en racheta grand nombre, dont
elle fit entrer plusieurs dans des monastères,
principalement de sa nation. Elle envoya sou-
vent des aumônes jusqu'à Rome pour les églises
de Saint-Pierre et de Saint-Paul, et pour les
pauvres Romains. Childeric, son second fils,
fut déclaré roi d'Austrasie par les Francs, en
six cent soixante; et Clotaire, roi de Neustrie
et de Bourgogne, se trouva peu après en age
de gouverner. Alors Bathilde exécuta la retraite
qu'elle méditoit depuis longtemps, et à laquelle
les seigneurs françois s'étoient toujours oppo
sés (5). Enfin ils y consentirent, à l'occasion de
Sigobrand, évêque de Paris, comme l'on croit,
qui s'étoit attiré leur haine par sa hauteur, et
qu'ils firent mourir malgré la haine. Ainsi,
craignant son ressentiment, ils céderent tout
d'un coup au désir qu'elle avoit de se retirer.
Elle leur fit des reproches de leur ingratitude.
car elle en avoit élevé quelques-uns avec une
tendresse de mère; mais, par le conseil des
évêques, elle leur pardonna et se réconcilia
parfaitement avec eux. Elle entra donc dans le
monastère de Chelles, vers l'an six cent soixante-
quatre, et s'y rendit simple religieuse, sous
l'abbesse Berthile, servant à la cuisine et aux
exercices les plus bas, comme elle avoit deja
fait étant reine. En cet état, elle acheva sainte-
ment sa vie et mourut vers l'an six cent quatre
vingt, le trentième de janvier, jour auquel
l'église de Paris honore sa mémoire (4).

Outre les deux monastères qu'elle fonda,
elle fit de grandes libéralités à plusieurs autres.
Elle donna à saint Filibert et à labbaye de
Jumiéges la forêt voisine; à l'abbé Legobere
et au monastère de Corbion, près de Chartres,
une terre, beaucoup d'or et d'argent (5), et

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jusqu'à sa ceinture. Elle fit des libéralités au monastère de Fontenelle, à celui de Luxeu et aux autres de Bourgogne; à Jouarre, à Faremoutier, mais particulièrement aux églises et aux monastères de Paris.

XXX. Monastère de France.

On continua d'en fonder plusieurs en France, pendant le règne de Clotaire III. Il avoit une confiance particulière en un seigneur, nommé Vaningue ou Varigon, à qui il avoit donné le gouvernement du pays de Caux, parce qu'il se plaisoit à chasser dans ses forets. Vaningue y fonda le monastère de Fécamp, du consentement du roi, qui y contribua de ses bienfaits. C'étoit une communauté de filles, et la première abbesse fut sainte Hildemarche, qui, après avoir gouverné quelque temps un monastère à Bordeaux, étoit venue à Rouen vivre sous la direction de Vandregisile. On lui donna, du consentement de saint Ouen, le gouvernement de ce nouveau monastère, où l'on assembla jusqu'à trois cent soixante-six religieuses qui celéBroient continuellement l'office divin. Après la mort d'Erchinoald, les François donnèrent à Ebroïn la dignité de maire du palais, sous le roi Clotaire. Ce seigneur, avec sa femme, Leutrude, et son fils, Bovon, fonda à Soissons le monastère de Notre-Dame, où, par les soins de l'evêque saint Drausin ou Drauscion, il y eut une grande communauté de filles; et la première abbesse fut Ethérie, tirée du monastère de Jouarre (1).

Sambre, le fameux monastère nommé alors Laubach, depuis Lobbes, qui fut achevé par saint Ursmar, son disciple. On rapporte cette fondation à l'an six cent cinquante-quatre ou environ. Saint Landelin fonda, dans le même pays, trois autres monasteres et mourut l'an six cent quatre-vingt-six, le quinzième de juin, jour auquel l'Eglise honore sa memoire (I).

Saint Guilain, disciple de saint Amand, fonda vers le même temps, et du consentement de saint Aubert, le monastère qui porte son nom, dont l'Eglise fut dédiée par ces deux prélats (2). Par leurs conseils, un seigneur, nommé Maldegar, et surnommé Vincent, quitta sa femme, Valdetrude, parente du roi, et se rendit moine sous la règle de saint Benoit, à Haumont, dont il fut le fondateur. Quelque temps après, Valdetrude quitta aussi le monde, par les exhortations de saint Guilain, et se retira sur une montagne, nommée alors Castri locus, le lieu du camp, parce que les Romains y avoient campé. Elle y fonda un monastère de femmes, dont on met l'établissement vers l'an six cent cinquantesix, et qui a donné le commencement de la ville de Mons, capitale du Hainaut. Sainte Aldegonde, sa sœur, fortifiée par ses conseils, garda la virginité et refusa plusieurs partis avantageux. Elle se retira dans les bois du lieu nomme Melbode, et ayant reçu le voile de saint Amand et de saint Aubert, elle y fonda un monastère double, pour des filles et pour des hommes; d'où est venue ensuite la ville de Maubeuge sur la Sambre. L'Eglise honore la mémoire de sainte Aldegonde le trentième de Janvier (5).

Landelin, né d'une famille noble de François, dans le Cambrésis, fut d'abord recom- Dans le même temps, vivoient en France deux mande par ses parents à saint Aubert, son évé fameux solitaires, saint Josse et saint Fiacre(4). que et son parrain, pour l'instraire des lettres (2). Le premier étoit frère de Judicaël, roi de la PeQuand il fut en âge, le saint prelat voulut lui tite-Bretagne, soumis aux François, qui, redonner la tonsure clericale. Mais le jeune nonçant au monde, voulut lui laisser le royaume; homme en fut détourné par quelques-uns de mais il ne l'accepta pas. Judicaël ne laissa pas ses parents; il quitta le monastère et s'aban- de se retirer au monastère de Saint-Jean-dedonna à ses passions, jusqu'à commettre des Gaël, aujourd'hui de Saint-Meen, et y mourut meurtres et des brigandages. La mort subite saintement. Judoc ou Josse, ayant parcouru d'un de ses camarades l'ayant touché, il se con- plusieurs villes de France, fut retenu en Ponvertit, alla trouver saint Aubert, se jeta à ses thieu par un duc, nommé Haymon, qui le fit pieds, lui demandant la pénitence. Le saint éve- ordonner prêtre pour sa chapelle, où il servit que le mit dans un monastère où il demeura en sept ans. Puis il se retira en solitude et chanhabit séculier; et, après avoir travaillé long-gea plusieurs fois de demeure, dont la dernière temps à expier ses péchés, il résolut de quitter le siecle et demanda la tonsure, que saint Aubert lui accorda volontiers.

est devenue un fameux monastère qui porte

son nom. On met sa mort vers l'an six cent soixante-huit, et l'Eglise l'honore le treizième Il fit ensuite le voyage de Rome, au retour de décembre. Saint Fiacre, nomme Fevre par duquel le saint évêque l'ordonna diacre. Ce qui les anciens, étoit écossois, c'est-a-dire hibermontre que l'on n'observoit plus dès lors l'au-nois. Ayant passé en France, il s'arrêta dans le cienne discipline, d'exclure à jamais du clergé ceux qui avoient commis des crimes depuis leur baptême. Landelin fut même ordonné prétre et s'appliqua à la prédication; puis, avec la permission du saint évêque, il fonda, sur la

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diocèse de Meaux, où saint Faron, qui recevoit volontiers ceux de cette nation, lui donna dans le bois un lieu nomme Breuil pour se retirer. Saint Fiacre y bâtit un oratoire de la SainteVierge et une maison ou il exerçoit l'hospita

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lité. Il fit grand nombre de miracles; et, encore | à présent, le lieu de sa retraite est célèbre par les pèlerinages de ceux qui sont affligés d'ulcères (1). Il mourut vers l'an six cent soixante et dix: ses reliques sont gardées dans l'église cathédrale de Meaux, et il est honoré le trentième d'août.

XXXI. Mort de saint Maxime.

En orient, saint Maxime ayant été envoyé en exil au pays des Lazes, avec ses disciples, les deux Anastase, ils y arrivèrent le huitième jour de juin, indiction cinquième, en six cent soixante-deux, et furent aussitôt séparés (2). On leur ôta même le peu qu'ils avoient pour leurs besoins, jusqu'à du fil et une aiguille. Comme saint Maxime ne pouvoit se tenir à cheval ni souffrir les voitures ordinaires, il fallut faire un brancard d'osier pour le porter comme dans un lit, et on le conduisit à un chàteau, nommé Schémari, près le pays des Alains. Les deux Anastase furent enfermés en deux autres châteaux, d'où, peu de jours après, on les tira, et on mena le moine Anastase à Sumas; mais il étoit si foible des tourments qu'il avoit soufferts à Constantinople, des fatigues du voyage, qu'il mourut le vingt-quatrième de juillet de la même année six cent soixantedeux. Saint Maxime, étant arrivé à Schémari, prédit le jour de sa mort, qui fut le samedi treizième d'août, indiction cinquième, la même année six cent soixante-deux. L'Eglise honore sa mémoire le même jour (5).

Il reste de lui un grand nombre d'écrits, partie dogmatiques et théologiques, partie moraux et spirituels. Il y a des réponses sur plusieurs questions de l'écriture; mais il les retourne ordinairement en allégories, et, comme lui-même, en les relisant, voyoit bien qu'elles étoient obscures, il y fit des scholies ou commentaires, qu'il recommande, comme nécessaires pour entendre le texte. Ses traités de morale sont par articles, sans liaisons de discours. Il a traité les principales parties de la théologie. La trinité en cinq dialogues, autrefois atttribués à saint Athanase. L'incarnation, dans tous ses autres ouvrages dogmatiques et polémiques, particulièrement la question des deux volontés. Car il semble avoir été suscité de Dieu exprès pour défendre cet article de la foi catholique. On a vu, dans la dispute contre Pyrrhus, un exemple de sa maniere de raisonner, et une preuve de son savoir (4).

Il traite les mêmes matières en plusieurs lettres adressées à diverses personnes, entre autres à Marin, prêtre de Chypre; et dans une de celles-ci, il marque que les Byzantins reprochoient au pape saint Martin de dire, dans ses

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lettres synodiques (1), que le Saint-Esprit procédoit aussi du fils. Les Romains, dit saint Maxime, rapportent des passages des pères latins et de saint Cyrille d'Alexandrie, en son commentaire sur saint Jean, par lesquels ils montrent qu'ils ne font pas le fils principe du Saint-Esprit; car ils savent que le père est le seul principe de l'un et de l'autre du fils, par lalgénération; du Saint-Esprit, par la procession. Ils veulent seulement montrer que le Saint-Esprit vient aussi du fils, et par là établir l'union et l'inséparabilité de substance. Saint Maxime, a commenté les œuvres attribuées à saint Denis l'aréopagite, et ne paroît pas les avoir révoquées en doute. A l'exemple de la hiérarchie ecclésiastique de saint Denis, et suivant la même méthode, il a composé sa mystagogie, qui est une explication allégorique de la messe; mais elle est au moins très-utile pour s'assurer du fait et voir si la liturgie grecque étoit dès lors telle qu'elle est aujourd'hui (2).

XXXII. Ali et Moavia califes.

Cependant les musulmans faisoient toujours de grands progrès. Le calife Othman, s'étant rendu odieux parce qu'il favorisoit trop ses parents et abusoit du trésor public, il s'éleva un parti contre lui, il fut assiégé à Médine, dans sa maison; on la força, il fut massacré, et l'alcoran, qu'il portoit dans son sein, fut teint de son sang (5). C'étoit la trente-cinquième an née de l'hégire, six cent cinquante-cinq de J.-C., Othman, étoit âgé de quatre-vingtdeux ans, et en avoit regne douze. Aussi tôt ses ennemis reconnurent pour calife Ali, fils d'Aboutalib, cousin germain et gendre de Mahomet. Mais ceux qui n'approuvoient pas la mort d'Othman se déclarèrent contre Ali, excités principalement par Aïche, la plus chérie des femmes de Mahomet, que l'on nommoit la mère des musulmans. Il y eut une guerre cruelle entre eux, et plusieurs sanglants combats; le chef du parti contraire à Ali étoit Moavia, qui, depuis longtemps, commandoiten Syrie, y ayant été envoyé par Aboubeker, des l'an treizième de l'hégire, six cent trente-quatre de J.-C. Enfin, Ali et Moavia firent la paix en six cent soixante, la quarantième année de l'hégire, à condition que l'Irac, c'est-à-dire l' rabie et l'Orient, demeureroit à Ali, et la Syrie et l'Occident à Moavia.

Mais, la même année, Ali fut tué par un cava régien (4). Aussi, nomma-t-on certains musulmans schismatiques, qui se séparèrent de lui sitôt qu'il entra en traité avec Moavia, ne pou vant souffrir qu'il mit en compromis un point de leur religion aussi important que la succession legitime du prophète et la qualité d'i

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