Images de page
PDF
ePub

Il est inutile de rappeler ici les dispositions de ce décret, dont vous avez tous, Messieurs, reçu un exemplaire.

Il ressort des dispositions et prescriptions du décret que ces établissements ont pour but de former de bons-maîtresvalets, des métayers et fermiers intelligents; que, non-seulement aucune rétribution ne sera exigée des élèves, mais même qu'une petite somme sera mise en réserve pour chacun d'eux à l'époque de leur sortie de l'établissement.

Il est vivement à regretter, qu'avant de prendre une mesure aussi importante pour l'agriculture que la création de fermes-écoles, le gouvernement n'ait pas cru devoir consul ter les Conseils-Généraux.

Nul doute que s'il l'eût fait, il eût apparu pour lui, des divers avis qu'il aurait reçus des départements, qu'il fallait bien se garder de prescrire un mode uniforme d'enseignement agricole pour toute la France, et il eût ainsi évité de faire rendre un décret dont les dispositions ne répondent pas aux besoins d'un grand nombre de départements, pour lesquels les résultats que l'on en obtiendrait seraient négatifs, dangereux même.

En effet, en n'examinant que notre département et ses besoins d'enseignement agricole, l'on reconnaît de suite que les apprentis-valets se feront seuls admettre dans la fermeécole, et que les fils d'agriculteurs feront complétement défaut à cet établissement.

Que résultera-t-il d'un tel état de choses?

Les élèves qui sortiront de la ferme-école pour entrer, comme valets, dans les exploitations dirigées par des praticiens expérimentés, seront et surtout se croiront plus instruits que leurs maîtres. De là insubordination.

Nourris en commun dans la ferme-école, conséquemment

ils

d'une manière plus économique et par suite meilleure, s'accoutumeront difficilement à la nourriture que l'on trouve habituellement dans nos exploitations rurales, l'économie étant rigoureusement nécessaire, et nos cultivateurs se trouvant forcés, par suite des faibles profits que donne l'agriculture, à être sobres dans leur nourriture et dans celle des agents de leur exploitation.

Enfin, ces jeunes gens seront mécontents de leur position, car l'agriculteur ne pourra leur donner des gages plus élevés que ceux qu'il accorde aujourd'hui à ses agents, et, de là, déception et mécontentement.

Tous ces motifs conduiront bientôt à l'expulsion de nos fermes de tous ces jeunes gens sortis des fermes-écoles, et l'on ne sera parvenu qu'à augmenter le nombre des prétendues capacités qui se disent incomprises, et sont un perpétuel danger pour la société.

Mais le mal en restera-t-il là? C'est ce dont il est permis de douter.

En effet, le Gouvernement qui aura formé ces jeunes gens dans ses écoles, voyant qu'ils ne peuvent être employés comme valets de ferme, ne voudra-t-il pas en faire des cultivateurs, et leur faire, dans ce but, des avances de sommes nécessaires pour leur établissement sur une exploitation, avances qui bien souvent se convertiraient en pertes totales pour le Trésor.

Nous ne faisons qu'indiquer ce danger, mais il nous paraît possible?

Nous comprenons les fermes-écoles, créées par le décret du 3 octobre deruier, dans les pays de métayage, mais, nous le répétons, une ferme de ce genre créée dans notre département serait inutile, funeste même peut-être à l'agricul

ture.

Ce serait faire entrer l'enseignement par en bas, et nous avons indiqué quelles en seraient les conséquences..

Sans doute, l'agriculture de notre département a besoin d'un enseignement pratique, et chaque année les Sociétés et les Comices agricoles le réclament avec instance.

Cette absence d'enseignement agricole est l'une des causes principales de cette funeste tendance des fils de nos agriculteurs les plus distingués à abandonner les campagnes pour venir dans nos villes se livrer au commerce et aux professions libérales.

C'est cette funeste émigration qu'il faut éviter à tout prix, car elle a pour conséquence l'appauvrissement de notre agriculture, tant sous le rapport des intelligences que sous le rapport des capitaux.

Ce qu'il nous faut, c'est un établissement agricole où les fils des cultivateurs reçoivent un enseignement qui remplace, pour eux, celui qu'ils sont obligés de venir chercher daus la pension de la ville où ils perdent le goût de la vie des champs, et que, dans cet établissement, ils reçoivent en même temps un enseignement agricole assez étendu

Une chose nous paraît devoir être évitée dans la création de l'établissement qui conviendrait à notre département, c'est la gratuité de la pension.

Les résultats de cette gratuité seraient les suivants :

La charge qui incomberait, par suite de cette mesure, au trésor public, empêchant de donner un enseignement agricole assez complet pour pouvoir en espérer des résultats importants, les fils de cultivateurs n'entreraient pas dans la ferme-école; par suite des mêmes motifs, cet établissement serait promptement envahi par les nécessiteux, qui ne pourraient à leur sortie fournir un seul agriculteur par suite de leur défaut de capitaux.

Nous croyons donc que si l'on devait créer un établissement de ce genre dans la Seine-Inférieure, il importerait de rendre l'enseignement qui y serait donné plus complet que celui indiqué dans le décret, et que, pour arriver à ce but, il conviendrait de demander une pension de 500 francs par an à chaque élève.

Mais pour conserver la bonne pensée qui a inspiré le Gouvernement, et qui n'a manqué son but, en ce qui concerné notre département, que par le motif qu'elle a été étendue à la généralité, au lieu d'être restreinte aux capacités prou vées par le concours " nous pensons qu'un certain nombre de bourses devraient être accordées dans cet établissement.

Par ces motifs, et vu la situation où nous sommes, tant qu'à présent, de ne pouvoir obtenir une ferme-école en dehors du modèle fixé par le décret du 3 octobre.

Votre Comité d'agriculture a l'honneur de vous proposer de refuser toute allocation pour cet objet, et d'émettre le vœu que le Gouvernement renonçant à l'uniformité admise par le décret, veuille bien consulter les Conseils Généraux sur les modifications qu'il importerait d'y apporter pour l'appliquer aux besoins de leurs départements.

De plus, en ce qui concerne l'offre de M. Martin de son exploitation pour la création d'une ferme-école, votre Comité vous propose de déclarer qu'en aucune circonstance cette exploitation ne pourrait convenir pour ferme-école du département, vu sa situation topographique à l'extrémité du département, et presqu'au bord de la mer. A ces considérations absolues de rejet, viennent se joindre la position et même la qualité des terres dont se compose la ferme dont il s'agit.

Le Conseil-Général, par les motifs exprimés au rapport, adopte les conclusions de son Comité d'Agriculture.

NOTE SUR UNE CULTURE DE MAIS,

FAITE AU BOIS-GUILLAUME,

Par M. Ph. Leroy,

Communiquée à la Société, dans la séance du 9 novembre 1843.

Ph. Leroy, employé de commerce chez madame veuve Leroy neveu, rue de la Chaine, à Rouen, à l'honneur d'informer Messieurs les membres de la Société d'agriculture qu'il a tenté, cette année, sur deux pièces de terre differentes, en plein champ, l'essai de la plantation du maïs.

Ces champs sont situés en la commune du Boisguillaume près Rouen. Le premier champ, cédé par M. Charles Gosse, cultivateur, a une étendue de 4 mètres de largeur sur une longueur de 70 mètres. Le second, cédé par M. Neveu, de la ferme du Colombier, a 5 mètres de largeur sur 50 mètres de longueur.

Dans les deux champs, le maïs est venu en parfaite maturité, malgré que la température ait été peu favorable à cette céréale ; l'année a presque toujours été froide et pluvieuse. Du reste, Messieurs, vous en pourrez juger par les échantillons de toute espèce, que j'ai l'honneur de vous soumettre, tant par les épis séparés, que par ceux que j'ai laissés tenant à la tige.

J'ai dù planter mon maïs dans les quatre premiers jours. de mai seulement, le mauvais temps m'ayant empêché de le faire plutôt, vu qu'une terre trop fraîche est extrêmement préjudiciable à la semence de ce grain, lorsqu'il vient d'ètre semé. Pour notre pays, il faudrait, je pense, que le maïs fut planté dans les quinze premiers jours d'avril. La terre que j'ai employée était, en outre, en mauvais état, le labour ayant été fait par un mauvais temps; j'ai dû m'en contenter, ne voulant pas déranger les personnes qui m'avaient cédé une portion de terrain. Il m'a fallu faire moi-même mes sillons avec une houe, car, pour cela, Messieurs, comme pour toute autre graine, il faut une terre fraîchement remuée, bien hersée; en un mot, une terre veule.

« PrécédentContinuer »