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Nous nous bornerons à donner le tableau comparatif des rentes viagères constituées en 1894 et en 1895 pour chaque compagnie.

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Les réserves pour risques en cours cnt quelque peu augmenté; elles étaient au 31 décembre 1894 de 1.595.995.979 francs; elles figurent en 1895 pour un chiffre de 1.684.575.928 francs. Celles afférentes aux assurances de tous genres sont comprises dans ce total pour 1.033.292.711 francs, ce qui donne pour ces réserves un taux moyen de 29,72 p. 100. Ce taux était l'année précédente de 27,57 p. 100. En 1893, il était de 27,12 p. 100. Il y a eu progression constante depuis quelques années, car nous trouvons ce taux à 24,15 p. 100 seulement en 1889, et même à 22, 58 P. 100 en 1888.

Les réserves des rentes se montent à 651.283.217 francs. Quant aux frais généraux, ils sont inscrits pour un chiffre de 9.710.062 fr. 46, supérieur de 128.062 fr. 46 à celui de 1894. Les commissions figurent dans le relevé total pour un montant de 9,331.681 fr. 69, inférieur à celui de 1891, qui était de 10.585.000 francs environ. La diminution est donc de 1.253.318 fr. 31. Mais il ne faut pas perdre de vue que le règlement des commissions

s'étendant désormais, en vertu du nouveau régime, sur une durée de cinq années, il y a lieu de tenir compte des sommes qui restent à débourser au courant de cette période.

En revanche, l'actif des compagnies ne cesse pas de s'élever, de mème que les sommes attribuées aux actionnaires (au moins pour les plus importantes). A cet égard, nous constatons tous les ans une progression nouvelle, et nous pourrions en déduire que, puisque la situation des compagnies ne laisse pas grand'chose à désirer de ce côté, il conviendait peut-être de songer à alléger les assurés d'une partie de leurs charges; mais alors, ce serait tout le système qu'il faudrait remanier, et les compagnies préfèrent s'hypnotiser devant le magnifique accroissement de leurs capitaux placés, plutôt que de tenter le moindre effort pour rendre l'accès de l'assurance facile aux travailleurs économes, que l'élévation des primes a détournés jusqu'ici de l'opération. Car il faut être riche pour s'assurer, et ce sont précisément ceux qui auraient le plus besoin de recourir à cette forme de la prévoyance qui doivent laisser à d'autres le bénéfice qu'on en peut retirer.

Cette réserve faite, disons que le total général de l'actif, compris dans les bilans des compagnies au 31 décembre 1895, est de 2.000.421.920. L'augmentation est de 86.231.214 francs sur celui de 1894, qui n'était que de 1.914.190.706 francs.

Toutes les compagnies ont vu s'élever le montant de leur actif, au cours du dernier exercice. On peut se rendre compte de l'augmentation constatée chez chacune d'elles en jetant un coup d'œil sur le relevé suivant :

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Voici, d'autre part, quel a été le mouvement des principales

valeurs composant l'actif des compagnies.

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Comme on le voit, abstraction faite des opérations d'immeubles, nos compagnies semblent partager leur choix entre la rente et les obligations des compagnies de chemins de fer. L'augmentation, sur ce dernier chapitre, a été de plus de 27 millions. Et cependant, ces obligations ne rapportent pas même 3p. 100. Il est vrai que si le taux de capitalisation de nos établissements d'assurances est aujourd'hui de 3 1/2 p. 100, les plus-values acquises sur d'autres titres leur permettent une capitalisation supérieure. Les compagnies ont aussi acheté, jadis, de la rente à très bas cours, et cela, joint aux autres profits réalisés, leur donne la possibilité d'arriver à un parfait équilibre opératoire. Au surplus, comme elles se rejettent en grande partie sur les affaires d'immeubles, les revenus qu'elles en tirent sont encore supérieurs à ceux des valeurs mobilières.

On aura pu remarquer, de même, que les prêts hypothécaires ont augmenté de 8 millions 157.000 francs. Il y aurait là pour nos compagnies, si elles voulaient se décider à rompre avec d'anciens errements, un large terrain d'opérations; mais elles ne semblent s'y aventurer qu'avec une prudente réserve. Malgré cela, les prêts hypothécaires suivent une marche ascendante. L'exemple donné par l'Urbaine, notamment, a déterminé quelques compaguies à se montrer moins timides, et le mouvement que nous venons de signaler n'est que le résultat de ces dispositions meilleures.

Quant aux achats de nues-propriétés et d'usufruits, c'est à peine si quatre ou cinq compagnies, jadis, se livraient à cette opération.

Il n'en est plus ainsi aujourd'hui, et l'augmentation sur ce chapitre est d'un peu plus de 3 millions. Il fut un temps où le chiffre inscrit à l'actif n'était que de quelques centaines de mille francs. Les prêts sur polices, par exemple, se sont multipliés au-delà des proportions ordinaires. Cette constatation est fâcheuse à tous égards, car elle indique un état de gêne chez les assurés, et par suite une certaine difficulté à acquitter leurs primes, ce qui les force bientôt à renoncer à leurs contrats. On peut dire que c'est là le signe des résiliations prochaines. Or, en général, les résiliations laissent aux compagnies les assurés les plus avancés en àge, dont la mort prochaine augmente le nombre des sinistres et par conséquent le taux de mortalité. Le chiffre relevé nous impressionne d'autant plus qu'avec le nouveau règlement des commissions, il semblait que les embarras de ce genre devaient disparaître. C'était précisément pour empêcher les abus engendrés par l'escompte des commissions que les compagnies s'étaient résolues à modifier leur système de règlement. Et il se trouve que le chiffre des résiliations, au lieu de diminuer, reste plutôt stationnaire, ce qui paraît mettre en défaut un excès de vigilance que personne ne songerait à blamer.

Ainsi qu'on a été à même de le constater, si les réserves accumulées par nos compagnies et les autres garanties portées à leur actif sont considérables et leur permettent d'attendre des jours plus favorables, il n'en est pas moins vrai que la production actuelle est on ne peut plus réduite. Il est impossible que cette situation se prolonge sans porter atteinte au crédit et mème à la vitalité de l'institution. Les compagnies allèguent, pour justifier leur inertie, la difficulté des placements, les résiliations successives qu'elles ne peuvent empêcher, la nouveauté du régime introduit et qui n'a pas encore eu le temps de s'imposer à la masse des intéressés. Toutes ces raisons, plus ou moins valables, ne sauraient expliquer, cependant, cette diminution persistante de la production. Il y a un vice dans le système, et ce vice il faudrait le faire disparaitre: il réside dans la répartition des bénéfices. Ce qui frappera tout esprit impartial, c'est la part léonine prélevée par le capital; c'est l'exagération des avantages concédés aux souscripteurs d'actions, en présence de l'insignifiance de ceux attribués aux porteurs de polices; c'est l'absence aussi de combinaisons ingénieuses capables d'offrir aux assurés un dédommagement de leurs sacrifices. Le taux de la participation a pu diminuer, presque jamais le montant des dividendes. Il est singulier, en effet, que quelques actionnaires, représentant, comme

à la Générale, un capital de 3 millions, inutile à la garantie des contrats, se partagent près de 5 millions de dividendes (exactement 4.817.320 francs) et ne laissent à des milliers d'assurés qu'une somme de 3.179.995 fr. 80. Il est non moins singulier que ces quelques porteurs de titres, qui ont déjà vu leur capital remboursé 25 fois, président à la gestion de millions de réserves accumulées par ces mêmes assurés, propriétaires de ces fonds, en somme, puisqu'ils les ont versés à l'effet de garantir la parfaite exécution de leurs contrats.

Les compagnies auront beau arguer de l'impossibilité de renoncer à leur système; nous leur répondrons que, déjà, à l'étranger, nombre de sociétés ont modifié le leur et ne s'en sont pas plus mal trouvées. Nous espérons même que les actionnaires finiront par comprendre que leur véritable intérêt leur commande de sacrifier quelques-uns de leurs avantages actuels, pour ne pas voir s'évanouir en leur mains le gage de leurs espérances futures. Ce ne sont pas quelques centaines de mille francs qu'il faut abandonner aux assurés, c'est la presque totalité des surplus réalisés. Aux États-Unis, on a limité, dans la plupart des compagnies par actions, cette portion des bénéfices réservée aux actionnaires, et les souscripteurs de titres ne s'en sont pas plaints. Ils ont trouvé fort juste que leur part fût proportionnelle à leur participation dans les affaires sociales et que les assurés, qui par leurs versements assurent la prospérité de la compagnie, eussent un profit plus large.

D'ailleurs, il n'y a qu'à attendre chez nous les événements. Quelques années encore de vaches maigres, de cette distribution. parcimonieuse faite à la généralité des participants, et la sagesse viendra en aide à l'esprit de décision des intéressés. Certes, si, comme aux États-Unis et en Angleterre, de grandes mutualités s'étaient formées en France, il y a quelque soixante ans, et qu'elles fussent à même, aujourd'hui, de disputer à leurs concurrentes le terrain de la production, bien peu, parmi nos compagnies, se montreraient réfractaires aux idées de réforme et d'amélioration. Elles chercheraient certainement à faire plus et mieux que leurs émules. Alors, pourquoi laisser aux sociétés étrangères le soin de remplir ce rôle d'éducatrices et recevoir d'elles la leçon qu'un peu d'initiative et de jugement aurait pu leur épargner?

Une réflexion s'impose à notre esprit : nous n'entendons pas la prévoyance comme l'entendent les Américains. C'est une question. de race, ainsi que nous le disions plus haut, de milieu, d'atavisme nous ajouterions presque. Il ne faut pas perdre de vue que les pre

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