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ble coquette qui feint de nous aimer exclufivement; nature patit également dans le Poëte & dans la Coquette; franchement l'humilité n'eft pas plus faite pour l'un que la fidelité pour l'autre.

Revenons à nos Poëfies: pulle part on ne trouvera un fi grand amas de ces petits ouvrages. jolis qui plaifent par leurs penfées naturelles délicatement renduës, & qui s'infinuent dans l'efprit agréablement. Dépoüillant toute prévention je ne me fuis point arrêté au fentiment de ces cenfeurs chagrins & mifantropes. J'ai ofé rapporter des Rondeaux de Benferade que j'a vois ofé trouver gracieux.

J'ai fait des courfes dans l'hif. toire, j'en ai raporté des morceaux, des fragmens. Quand les Hiftoriens où j'ai puifé ont une narration pleine, bien

nourrie où l'art s'accorde avec

la nature, je n'y ai pas touché'; pas mais quand la narration m'a. paru languiffante, féche, maigre, & fans art, je l'ai refonduë, & tâché de lui donner ce qui lui manquoit.

Voilà ce que j'ai fait, furtout dans les Contes qui font entrez dans mon Livre, je les ai brodez, embellis, fouvent devinez; avec quoi, avec la naïveté ellemême, lorfqu'elle s'eft prefentée à moi avec des graces. Je foutiens que cette maniere de s'approprier un Conte ne peut m'être difputée, en dépit de l'Auteur des Poëfies Sacrées,qui au lieu d'imiter la douceur de Chapelain, fon grand modele en poësie, a mieux aimé en fe déchaînant contre moi, retra cer la fureur de Gacon fon digne concurrent mais je n'y penfe pas, je ne veux rien m'ap

que

proprier, je vous facrifie tout mon Lecteur, Dieu veuille ma generofité ne foit pas allée jufqu'à vous facrifier ima petite reputation d'Auteur; tout coup vaille. Mais voici ce que j'eftime encore plus que tout le refte. I,es plus belles images de l'Ecriture Sainte, ces traits fublimes pleins de feu qui élevent l'ef pric, & qui fe gravent bien avant dans notre imagination, j'en ai enrichi mon Ŏuvrage. Dès que j'ai fait quelques réfléxions ou morales, ou critiques, ou fur quelque autre fujet fingulier, intereffant, je les ai répanduës par tout dans cette Bibliotheque de Cour. Cette grande varieté de penfées fans ordre, fans fuite, fans liaison fans être coufuës par aucune tranfition, forment une confufion qui plaira, je me le fuis imaginé,par cela même que c'eft

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une confufion

où l'on voit

tant de chofes differentes qui brillent fi inégalement, & qui ne laiffent pas de s'entre-pfêter

l'un à l'autre leur éclat.

Un grand effet de la politeffe, c'eft de fçavoir difparoître dans une compagnie dans le moment qui précede celui où l'on doit ennuyer; fi je ne me trompe dans cette Préface, je touche cet inftant fatal. Je vous faluë, & je finis ce Prologue.

AU LECTEUR

DIFFICILE.

Tox qui prétens blâmer les livres en ana,

Τ

Croyant dire un bon mot nomme afiniana, Ces précieux recüeils où l'efprit brille, éclate, Cenfeur trop délicat au fourcil dédaigneux, Veux-tu te divertir! tu te crois trop beu

reux

Avec eux de pouvoir répanouir la rate.
Hé quoi des traits fans fel peuvent te réjoüir !
Selon toi le mauvais engendre ton plaifir?
Ton orgueil te fert mal; ton erreur eft extréme,
Ton injuste mépris retombe fur toi-même.

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