Images de page
PDF
ePub

En 1741 les bâtiments de la léproserie tombaient en ruines. Un arrêt du Conseil permit à la fabrique de réédifier l'église sur les terrains de la pépinière.

En 1766 un nouvel arrêt permit à la fabrique d'acheter aux monnayeurs différents bâtiments voisins de l'ancienne chapelle et c'est sur les terrains de l'ancienne maison du Roule que s'éleva bientôt sur les plans de l'architecte Chalgrin l'église que tous les Parisiens connaissent et qui consacre dans le quartier Saint-Honoré le souvenir de l'ancienne léproserie du Roule.

Henri CORBEL.

GUILLAUME II, A NEUILLY-SUR-SEINE. (Communication de M. Edmond Lelièvre, Conseiller municipal).

On s'est demandé pendant longtemps, et on se demande encore si le Kaiser est venu incognito à Paris.

Tout jeune, Guillaume visita Paris et les ruines de Cluny lui plurent par-dessus tout, parce que c'étaient des ruines.

Stéphany, ancien commissaire de police de Strasbourg, dans une de ses brochures, affirme que le Kaiser visita l'Exposition de 1900. Ce qui rend amusante cette révélation, c'est qu'elle nous apprend une chose merveilleuse et inattendue, que Guillaume, dans les ordres officiels, n'était pas désigné par un nom respectueux, mais par un nombre. Guillaume, était devenu le N° 100.

C'est sous ce numéro que le Kaiser serait venu à l'Exposition de 1900. On assure qu'un jour de l'été, un ancien attaché militaire français en Allemagne longeait le boulevard de Courcelles lorsque, non loin de la rue de Prony, il croisa un promeneur en qui il crut reconnaître Guillaume qu'il avait approché très souvent à Berlin. Sa stupéfaction fut grande. L'officier pour ne pas douter, repassa devant le personnage mystérieux. Il n'y avait pas d'erreur possible. Le bras gauche atrophié était habilement dissimulé. Notre compa triote salua et Guillaume, après une seconde d'hésitation, répondit à son salut. Intrigué, l'officier se rendit à l'Elysée et annonça l'extraordinaire nouvelle à M. Crozier, directeur du Protocole. La physionomie de M. Crozier marqua moins la surprise que l'inquiétude. M. Crozier pria l'ancien attaché d'être discret. L'ancien attaché ne fut que modérément bavard.

On a aussi raconté que plusieurs fois le numéro 100 est venu à Paris pour une cause qui n'avait rien de diplomatique. L'amour seul conduisait les pas de Guillaume vers un discret petit hôtel de Saint-James, à Neuilly. Là habitait une actrice de l'Odéon, jeune, magnifiquement blonde, belle comme un page. Aucune précision n'a été donnée sur cette affaire sentimentale. Des renseignements laisseraient croire qu'il s'agissait d'une actrice, aujourd'hui décédée, et ayant appartenu en dernier lieu à la Comédie Française.

Guillaume était donc amoureux, et cependant, après tous les ouvrages qui lui ont été consacrés, son caractère reste une énigme. Pour Karl Rosner, dans son livre « Le Roi » (der Konig), tout Guillaume tient dans la formule appliquée par Gathe à Hamlet dans Wilhem Meister: « Une grande action assignée à une âme incapable de l'accomplir. » La puissance de l'empire allemand donnait le change sur l'impuissance de l'empereur. Ces attitudes théâtrales qui lui étaient familières, sa faculté d'assimilation, un vernis brillant, mais tout en surface, avaient trompé le monde sur sa vraie nature. Du moment où éclata la guerre, où il ne s'agissait plus de parler, mais d'agir, de prendre des initiatives, d'assumer des responsabilités, Guillaume II se montra le pauvre sire qu'il était, se rendant compte d'ailleurs de son insuffisance dont il souffrait atrocement, impuissance qui l'apparente à Hamlet. Edmond LELièvre.

Ouvrage consulté:

Paul-Louis Hervier: Kaiseriana.

ENCORE LE GUERRIER TROUBADOUR

(Communication de M. Paul Marmottan.)

Dans la séance du 19 mai 1919, M. Leroux-Cesbron nous contait l'histoire du dramaturge ou vaudevilliste, Pierre Villiers, qui était jusque là entièrement inconnu.

Il habita longtemps Neuilly, il y mourut, s'y fit enterrer, et, en somme, y acquit droit de cité.

Nous prîmes plaisir à apprendre comment cet ancien capitaine de dragons (1), bifurqua vers la littérature.

A propos de cette dernière branche de sa carrière, je voudrais revenir en quelques lignes sur Villiers, pour vous citer trois de

1. Exactement au 3o dragons.

ses ouvrages qu'on peut considérer comme très rares, curieux, et qui ajoutent quelque chose à sa biographie.

Je ne parlerai pas d'abord de sa collaboration au volume bien peu commun, paru en l'an XIII, intitulé : « Petites vérités au grand jour, sur les acteurs, les actrices, les peintres, les journalistes, l'Institut, etc... », par une société d'envieux, d'intrigants et de cabaleurs, critiques amusantes rédigées par Fayolle, Ducray-Dumesnil, le spirituel A. Martainville mort à Sablonville, notre troubadour et quelques autres plus obscurs, ouvrage qui n'a pas encore été mentionné à Neuilly. C'est que je veux m'en tenir aux trois déjà annoncés plus haut.

De ces trois, j'en possède un ; j'ai à vous signaler le deuxième ; enfin, le troisième, est chez un ami bibliophile qui l'a acheté, l'an dernier, à un libraire dépositaire de la riche bibliothèque napoléonienne du regretté amateur le prince d'Essling, duc de Rivoli.

Le petit-fils de Masséna, ancien député de Nice sous le second Empire, est, en effet, décédé peu d'années avant la grande guerre. Son fils, actuellement vivant, ancien officier, n'a pas crû devoir conserver la bibliothèque paternelle et, en 1919, a chargé de la vendre à l'amiable le libraire Emile Nourry, de la rue des Ecoles. C'est là où mon ami l'a trouvé.

Voyons donc leurs titres :

Le premier est le « Manuel du voyageur aux environs de Paris, petit in-12°, faisant pendant avec le « Manuel du Voyageur à Paris », in-12° aussi, de 358 pages, suivi (par le même auteur) de l'«Indicateur parisien », en même format, c'est-à-dire d'une nomenclature des barrières, mairies, boulevards, carrefours, places, prisons, quais, rues, etc..., ce dernier appendice_comprenant 44 pages, le tout édité chez Delaunay, libraire au Palais-Royal, galerie de bois, n° 243, en 1813. La première édition est de 1810, la seconde de 1813, la meilleure parce qu'un peu plus complète pour les changements survenus à l'époque. C'est cette dernière dont je remets un exemplaire, parce que je l'ai déjà, pour la biliothèque de la Commission en la priant de l'accepter.

Cet essai n'est pas sans mérite; il condense l'essentiel, à savoir sur le Paris ancien et celui de l'empire et l'on y cueille mainte information d'une note personnelle. Sans doute, l'auteur se sert de la consultation des ouvrages antérieurs, notamment, par endroits du Thiéry, mais sans abus. Son essai est d'une lecture commode, rapide et, à l'époque, eut du succès. Ce petit livre qui était voulu ainsi, et l'on sait que c'est aussi un art de faire court sur un sujet aussi vaste vient de la vente célèbre de feu l'abbé Bossuet, curé de l'église Saint-Louis en l'Ile, qui eut lieu par les soins de

[ocr errors]

l'expert Morgand, en avril 1888. Cette collection était toute relative à Paris.

Je trouve encore, dans le catalogue de ladite, mention du volume annoncé ci-dessus, au no 2089, sous ce titre : P. Villiers « Manuel du Voyageur aux environs », en deux parties, avec cartes, Paris 1802.

Quant au troisième volume à vous faire connaître, c'est celui intitulé « Les braves anciens et modernes », galerie comparée des maréchaux d'empire et grands capitaines des derniers siècles de la monarchie française, livre de 230 pages, in-12°, paru en 1806 et que signe P. Villiers, ancien capitaine. Ce livre est dédié à S. A. S. Joachim, prince et grand amiral de France. Au-dessus d'un portrait en buste et gravé de Murat, se trouvent les quatre vers que j'ai cités dans notre Bulletin de l'an 1910, page 106. J'ignorais alors leur auteur, n'ayant eu jusque là sous les yeux que la gravure sans le volume.

Dans ce dernier sont mêlés avec art dans une sorte de rang les fusionnant avec les généraux de Napoléon, les grands militaires des xviie et XVIIIe siècles. L'idée est assez ingénieuse et ce rapprochement patriotique méritait d'être fait, ne serait-ce qu'au point de vue de la vulgarisation. Villiers s'est chargé de ce soin.

En 1811, il écrivit dans un recueil de romances devenu assez rare et qui forme collection, intitulé : « La lyre d'Anacréon ». 1811,est sa huitième année. Ce recueil, petit in-120 paraissait chez Fabre, au Palais-Royal, galerie de bois no 263. Il est assez recherché et compte parmi ses collaborateurs les plus connus, Armand Gouffé, Creuzé de Lessert, de Chazet, Désaugiers, Etienne et le chevalier Pils. Les titres des poésies données cette année là par Villiers sont ceux-ci: Après deux années d'absence; Mon bras ne peut comme autrefois, Voyez dans cette humble chaumière, puis le Troubadour guerrier, qui n'est autre que lui-même, s'adressant à sa fiancée ou à sa femme. Le dernier couplet de cette dernière romance, laquelle fut mise en musique par P. Wacher, de l'académie impériale de Musique en 1810, est ainsi conçu :

Sur les ailes de la Victoire

Je viens te consacrer mes jours
Je viens au laurier de la gloire
Unir le myrte des amours;
Pourrais-tu refuser, Iselle,
Ton cœur au guerrier troubadour,
Qui, toujours discret et fidèle,
T'a donné le sien sans retour? (1)

1. Voyez ce volume, page 151.

« PrécédentContinuer »