Me veut mortifier en cette occasion. De quelque grand forfait qu'on me puisse reprendre, Ah! traître, oses-tu bien, par cette fausseté, DAMIS. Quoi! la feinte douceur de cette âme hypocrite ORGON. Tais-toi, peste maudite! TARTUFE. Ah! laissez-le parler; vous l'accusez à tort, (s'adressant à Damis.) Oui, mon cher fils, parlez; traitez-moi de perfide, Mon frère, c'en est trop. Ton cœur ne se rend point, DAMIS. Quoi! ses discours vous séduiront au point... ORGON. (relevant Tartufe.) Teis-toi, pendard! Mon frère, hé! levez-vous, de grâce'! (à son fits Infâme! Si tu dis un seul mot, je te romprai les bras. TARTUFE. Mon frère, au nom de Dieu, ne vous emportez pas! Ingrat! ORGON à son fils. TARTUFE. Laissez-le en paix. S'il faut, à deux genoux, Vous demander sa grâce... ORGON se jetant aussi à genoux, et embrassant Tartufe. (à son fils.) Coquin! vois sa bonté ! Hélas! vous moquez-vous? DAMIS. ORGON. Paix ! DAMIS. Quoi! je.... ORGON. T Paix, dis-je: Je sais bien quel motif à l'attaquer t'oblige. DAMIS. A recevoir sa main on pense l'obliger? ORGON. Oui, traître, et dès ce soir, pour vous faire enrager. Allons, qu'on se rétracte, et qu'à l'instant, fripon, DAMIS. Qui? moi! de ce coquin, qui par ses impostures... ORGON. Ah! tu résistes, gueux, et lui dis des injures! (à Tartufe.) Un bâton! un bâton! Ne me retenez pas. (à son fils.) -Sus! que de ma maison on sorte de ce pas, Et que d'y revenir on n'ait jamais l'audace. DAMIS. Oui, je sortirai; mais... ORGON. Vite, quittons la place. Je te prive, pendard, de ma succession, SCÈNE VII. ORGON, TARTUFE. ORGON. Offenser de la sorte une sainte personne! TARTUFE. O ciel! pardonne lui la douleur qu'il me donne! (à Orgon.) -Si vous pouviez savoir avec quel déplaisir Je vois qu'envers mon frère on tâche à me noircir... ORGON. Hélas! TARTUFE. Le seul penser de cette ingratitude Fait souffrir à mon âme un supplice si rude... ORGON, courant tout en larmes à la porte par où il a chassé son fils. (à Tartufe.) Remettez-vous, mon frère, et ne vous fâchez pas. TARTUFE. Rompons, rompons le cours de ces fâcheux débats. Je regarde céans quels grands troubles j'apporte ORGON, Comment! vous moquez-vous? TARTUFE. On m'y hait, et je voi Qu'on cherche à vous donner des soupçons de ma foi. ORGON. Qu'importe? Voyez-vous que mon cœur les écoute? TARTUFE. On ne manquera pas de poursuivre, sans doute : Non, vous demeurerez; il y va de ma vie. TARTUFE. Eh bien! il faudra donc que je me mortifie. ORGON. Soit: n'en parlons plus Mais je sais comme il faut en user là-dessus. L'honneur est délicat, et l'amitié m'engage A prévenir les bruits et les sujets d'ombrage. Je fuirai votre épouse, et vous ne me verrez..... ORGON. Non, en dépit de tous vous la fréquenterez. Un bon et franc ami, que pour gendre je prends, M'est bien plus cher que fils, que femme, et que parents. N'accepterez-vous pas ce que je vous propose? TARTUFE. La volonté du ciel soit faite en toute chose! ORGON. Le pauvre homme ! Allons vite en dresser un écrit ; ACTE IV. SCÈNE PREMIÈRE. CLEANTE, TARTUFE. CLÉANTE. Oui, tout le monde en parle, et vous m'en pouvez croire. Je vous le dis encore, et parle avec franchise, Et remettez le fils en grâce avec le père. TARTUFE. Hélas! je le voudrais, quant à moi, de bon cœur. |