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De n'avoir point parlé, pour ne m'engager pas.

ARISTE.

La raison est fort belle, et c'est faire un grand pas. Avez-vous su du moins lui proposer Clitandre?

CHRISALE.

Non; car, comme j'ai vu qu'on parloit d'autre gendre, J'ai cru qu'il était mieux de ne m'avancer point.

ARISTE.

Certes, votre prudence est rare au dernier point.
N'av ez-vous point de honte, avec votre mollesse,
Et se peut-il qu'un homme ait assez de foiblesse
Pour laisser à sa femme un pouvoir absolu,
Et n'oser attaquer ce qu'elle a résolu ?

CHRISALE.

Mon Dieu! vous en parlez, mon frère, bien à l'aise,
Et vous ne savez pas comme le bruit me pèse.
J'aime fort le repos, la paix et la douceur,
Et ma femme est terrible avecque son humeur.
Du nom de philosophe 9 elle fait grand mystère *,
Mais elle n'en est pas pour cela moins colère;
Et sa morale, faite à mépriser le bien,
Sur l'aigreur de sa bile opère comme rien.
Pour peu que l'on s'oppose à ce que veut sa tête,
On en a pour huit jours d'effroyable tempête.
Elle me fait trembler dès qu'elle prend son ton;
Je ne sais où me mettre, et c'est un vrai dragon,
Et cependant, avec toute sa diablerie,
Il faut que je l'appelle et mon cœur et ma mie.

ARISTE.

Allez, c'est se moquer. Votre femme, entre nous,
Est, par vos lâchetés, souveraine sur vous.

Son pouvoir n'est fondé que sur votre foiblesse ;
C'est de vous qu'elle prend le titre de maîtresse;
Vous-même à ses hauteurs vous vous abandonnez,
Et vous faites mener en
le nez.

bête par

Quoi! vous ne pouvez pas,voyant comme on vous nomm
Vous résoudre une fois à vouloir être un homme,
A faire condescendre une femme à vos vœux,

Et prendre assez de cœur pour dire un, je le veux:

Vous laisserez, sans honte, immoler votre fille
Aux folles visions qui tiennent la famille ;.
Et de tout votre bien revêtir un nigaud,

Pour six mots de latin qu'il leur fait sonner haut;
Un pédant qu'à tout coup votre femme apostrophe
Du nom de bel esprit et de grand philosophe,
D'homme qu'en vers galans jamais on n'égala,
Et qui n'est, comme on sait, rien moins que tout cela.
Allez, encore un coup, c'est une moquerie,
Et votre lâcheté mérite qu'on en rie.

CHRISALE.

Oui, vous avez raison, et je vois que j'ai tort.
Allons, il faut enfin montrer un cœur plus fort,

Mon frère.

ARISTE.

C'est bien dit..

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Et je lui veux faire aujourd'hui connoître Que ma fille est ma fille, et que j'en suis le maître, Pour lui prendre un mari qui soit selon mes vœux.

ARISTE.

Vous voilà raisonnable, et comme je vous veux.

Vous êtes

CHRISALE.

pour Clitandre, et savez sa demeure, Faites-le-moi venir, mon frère, tout-à-l'heure.

ARISTE.

J'y cours tout de ce pas.

CHRISALE.

C'est souffrir trop long-temps,

Et je m'en vais être homme à la barbe des gens

ΤΟ

FIN DU SECOND ACTE,

ACTE III.

.1

SCENE PREMIÈRE.

PHILAMINTE, ARMANDE, BELISE, TRISSOTIN, LEPINE.

PHILA MINTE.

Aa! mettons-nous ici pour écouter à l'aise
Ces vers que mot à mot il est besoin qu'on pèse.

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Ce sont charmes pour moi, que ce qui part de vous.

ARMANDE.

Ce m'est une douceur à nulle autre pareille.

BELIS E.

Ce sont repas friands qu'on donne à mon oreille.

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