ou du Nilométre, coudée hachémiqué des Arabes & des Mahométans. C'est la coudée facrée des Egyptiens & des Hébreux; c'est l'amtá des Syriens l'olene des Grecs, & le brachium des Latins. Elle avoit pour mesure la longueur du bras entier depuis l'aiffelle jufqu'à l'extrêmité de la main, les doigts non compris. Elle étoit confacrée à Jérufalem dans le Temple de Dieu, où je penfe que peut- être elle étoit appellée Middáh refchonáh, principale mesure, mesure premiere ou étalon, à moins que cette dénomination ne convienne plutôt au pied géométrique qui en étoit la moitié. En Egypte, elle étoit confacrée au Dieu Sérapis; elle étoit confignée dans fon temple, & fervoit à mesurer les débordemens du Nil, dont les crues avoient été foumises par la fuperftition à la puiffance & au gouvernement de ce Dieu. Elle fert encore au même ufage aujourd'hui & dans le même état où elle étoit autrefois. Les Septante dans la Bible définiffent la coudée facrée, en difant qu'elle étoit d'un pygon & d'un palme, ce qu'il faut entendre d'un pygon & d'une fpithame ou d'un zéreth. Nous avons vu la définition de Héron; elle contenoit de coudées lithiques 1, de pied Philétériens, de pygons, de pieds Grecs 21, de 1259 pygmes 1, de pieds Romains 1, de pieds géométriques 2, de pieds pythiques 2, de fpithanies 2, d'orthodôrons 21, de lichas 3, de paleftes 8, de condyles 16, de dactyles 32, & de pouces du pied de Roi 20.54.

Les Rabbins, les Arabes & les autres Orientaux évaluent la coudée facrée à 144 grains d'orge mis de plat à côté les uns des autres, ou à 168 grains de froment placés de la même maniere. J'ai trouvé, d'après des expériences réitérées, que le pied de Roi contenoit 86 grains d'orge ou 96 grains de bled placés latéralement; d'où il fuit que la coudée facrée telle que je l'ai déduite de la mesure de la terre, contiendroit 147.3 largeurs de grains d'orge ou 164.3 largeurs de grains de bled: ce n'eft pas que je n'aie auffi trouvé qu'en choififfant les plus beaux grains de bled, le pied n'en contenoit que 92, & qu'en prenant les petits, le pied en contenoit 100. J'observe encore au fujet de cette coudée, que les Docteurs Juifs dans le Talmud & ailleurs, fixent à trois coudées la taille ou la ftature moyenne & commune de l'homme en effet trois coudées facrées font fix pieds géométriques, & la valeur précise de l'orgyie ou braffe dont nous avons déja parlé & dont nous parlerons encore.

Par tout ce que nous avons rapporté jufqu'ici, nous avons prouvé fuffifamment que les Egyptiens, les Juifs, les Phéniciens, &c. avoient des mesures de même grandeur, & foumises aux mêmes divifions; les Savans l'avoient foupçonné, mais ne l'avoient pas démontré. « C'est l'opinion des plus habiles Commentateurs, dit » M. Fréret, que la coudée des Hébreux & celle des Egyptiens » étoient égales, & cette opinion n'a rien que de très-conforme à l'Ecriture. Nous y voyons que les Hébreux entrerent dans » l'Egypte en très-petit nombre au fortir du pays de Chanaan » où ils avoient mené jufqu'alors une vie errante à la maniere des » Arabes Bédouins. Ils avoient négligé l'agriculture, se nourriffant » du lait & de la chair de leurs troupeaux; ils fabriquoient eux» mêmes les étoffes groffieres de leurs pavillons & même celles » dont ils se vêtiffoient : ils ignoroient les douceurs de la vie fé>> dentaire ; & les arts que le luxe a fait inventer aux habitans des » Villes, leur étoient inconnus. Ils n'apprirent ces arts que dans » l'Egypte & pendant leur captivité, lorfqu'après la défaite des >> Rois pafteurs qui les avoient reçus, Aménophis & Séfoftris les » réduifirent en esclavage, & les occuperent à la construction des » magnifiques bâtimens entrepris pour la fûreté, la commodité & >> l'embellissement du pays. Les Hébreux travaillant fous la direc» tion des Architectes & des ouvriers Egyptiens, furent alors for» cés de s'accoutumer aux mesures du pays. Ce fut dans ces cir» conftances que Moife réunit les Hébreux difperfés par toute >> l'Egypte, où depuis plufieurs fiecles ils ne faifoient plus un peu»ple, les tira de ce pays, & les conduifit dans l'Arabie, en leur » ouvrant par l'ordre de Dieu un paffage miraculeux au milieu de » la mer rouge. A peine furent-ils dans les déferts de ce pays, » que Moife les employa à la conftruction du Tabernacle, de l'Ar» che, & de toutes les chofes deftinées à rendre plus majestueux » le culte dont Dieu lui avoit prefcrit les cérémonies.

» Les Livres de Moïfe nous en marquent exactement les pro» portions, en coudées, en palmes, en doigts; ils parlent de cette » coudée comme d'une chofe connue & familiere aux Hébreux; » d'où l'on doit conclurre que cette coudée étoit celle du com»merce ordinaire, celle à laquelle les Juifs étoient accoutumés » & par conféquent celle des Egyptiens. Si Moife en eût établi » une nouvelle, il en eût marqué le rapport avec l'ancienne, ou » du moins il les eût diftinguées, pour empêcher les Hébreux de

» s'y méprendre; & comme il ne l'a pas fait, on doit conclurre qu'il n'a rien changé à l'ancienne coudée, ou à celle dont les » Hébreux s'étoient fervis en Egypte.

» Salomon employa la même coudée dans la construction du » Temple; le Sanctuaire dans lequel il plaça l'Arche, & qui étoit » le véritable Temple, avoit les mêmes proportions que celui du » Tabernacle de Moïfe, c'eft-à-dire, vingt coudées en tout fens »,

Le Temple de Salomon avoit (III. Reg. VI. 2 & feq.) foixante coudées de longueur, vingt coudées de largeur, & trente coudées de hauteur. Le portique placé devant le Temple, avoit de longueur la largeur même du Temple, favoir vingt coudées, & dix coudées de largeur; par conféquent ce Temple avoit de longueur, fans le portique, 102 pieds 8 pouces de Roi, & avec le portique 119 pieds 9 pouces, de largeur 34 pieds 2 pouces, & de hauteur 51 pieds 4 pouces. Mais ce même Temple auroit eu cent vingt coudées de hauteur, fuivant le fecond Livre des Paralipomenes (III. 4.); peut-être s'agit-il là de cent vingt tophachs, ou bien il auroit eu 205 pieds 4 pouces de hauteur.

Béma aploun, pas fimple de voyageur je penfe que le páham des Hébreux exprime la même mefure. Il valoit de coudées facrées i, de coudées lithiques 1, de coudées médiocres 1, de pygons ou coudées communes 2, de pieds Grecs 2, de pygmes 2, de pieds Romains 2, de pieds géométriques 2, de pieds pythiques 2, de fpithames, 3, d'orthodôrons 3, de lichas 4, de paleftes 10, de condyles 20, de dactyles 40, & de pouces du pied de Roi 25.68.

Xylon. Il paroît par l'étymologie de ce mot, que cette mesure fervoit à eftimer le bois de chauffage; c'étoit peut-être ce que nous appellerions une corde de bois. Elle contenoit de pas fimples 1, de coudées facrées 24, de coudées lithiques 3, de pygmes 4, de fpithames 6, de lichas 7, de paleftes 18, de condyles 36, de dactyles 72, & de pouces du pied de Roi 46.22.

8

Bêma diploun ampelos, pas double ou géométrique, en hébreu peut-être Peschab, Pefiháh, Pefijá. Il valoit 1 xylon, 2 pas fimples, 2 coudées facrées, 3 coudées lithiques, 3 coudées médiocres, 4 coudées communes ou pygons, 4 pieds Grecs, 4 pygmes, 4 pieds Romains, 5 pieds géométriques, spieds. pythiques, 6 fpithames, 7, orthodôrons, 8 lichas, 20 paleftes, 40 condyles, 80 dactyles, & 51.36 pouces du pied de Roi,

Orgyie jufte, Hexapode tétrapêchy; Paffus en latin, & peut-être Olenè, Ulna, aune; Pifot iadaim en égyptien; peut-être Trahad en hébreu; Bava ou Kathouath en arabe: c'eft la braffe ou l'étendue totale des bras ouverts, comme le fignifient les deux mots orgyia & paffus, & cette étendue eft égale à la ftature ou à la taille de l'homme. L'orgyie contenoit de pas géométriques 1, de xylons, de pas fimples 2, de coudées facrées 3, 'de coudées lithiques 4, de coudées médiocres 4, de pygons ou coudées communes 4, de pieds Grecs 5, de pygmess, de pieds Romains, de pieds géométriques 6, de pieds naturels ou pythiques 6, de fpithames 8, d'orthodôrons 8, de lichas 9, de paleftes 24, de condyles 48, de dactyles 96, & de pouces du pied de Roi 61.63. On peut remarquer que je m'écarte ici des combinaisons de Héron, mon guide, pour revenir à un principe qu'il a établi lui-même, en difant que les mesures avoient été ajustées sur les proportions du corps humain, & en difant expreffément que l'orgyie étoit une des mefures foumises à cette Tymmétrie. L'orgyie, fuivant lui, eft de 4 coudées, de 6 pieds Philétériens, & de 7 pieds Romains. Elle feroit donc de 82.14 pouces du pied de Roi: quelle proportion y auroit-il de cette mefure avec les précédentes? Ce qui a trompé Héron, c'est qu'ayant d'abord évalué l'orgyie à 4 coudées lithiques, il a enfuite compris que c'étoient des coudées facrées, ce qui lui a fait conclurre 6 pieds Philétériens & 7 Romains. Hérodote définit l'orgyie en lappellant τετράπηχυς, qui fignifie quatre coudées, & εξαπόδης, qui fignifie fix pieds; ce qui ne leve pas la difficulté, le bon fens & la raifon fuffifent pour cela. Héron nous parle ailleurs de l'orgyie qui fert à mesurer les terres labourables; elle étoit indubitablement plus grande que l'opyvia Sinaia, l'orgyie jufte ou de mesure naturelle, d'Hérodote, & cependant il ne l'évalue qu'à 9fpithames; tandis que l'orgyie de mefure naturelle feroit, fuivant lui, de 10 fpithames. Le mille ou milliaire Egyptien n'a reçu cette dénomination que parce qu'il étoit de mille orgyies juftes, quoiHéron ne lui en donne que 750. Mais ce nombre d'orgyies eft précisément ce qui me fait appercevoir la fource où il a puifé fon erreur; c'est la définition même du ftade faite par les Ecrivains antérieurs à lui. Hérodote (lib. II.) le définit ainfi år de ἑκατὸν όργυιαι δίκαιαὶ εἰσι σάδιον ἐξάπλετρον, cent orgyies juftes font le ftade de fix pléthres: calculons, dit Héron en lifant cet endroit,

que

le

le mille eft compofé de fept ftades & demi; donc il contient 45 pléthres ou 750 orgyies: mais dans Hérodote il ne s'agiffoit pas du ftade Egyptien, dont les fept & demi faifoient le mille, mais du ftade nautique, dont les 10 faifoient le même mille, qui par conféquent étoit de 60 pléthres ou de mille orgyies. Ne nous arrêtons donc plus à la méprise de Héron qui eft manifefte en cet endroit, & qui s'étend delà sur le reste de ses calculs.

Selon M. Gréaves (Pyramidograph. 8°. Lond. 1646, p. 93.), le cercueil de marbre qui eft dans la chambre ménagée au centre de la grande pyramide en Egypte, mesuré par lui avec la derniere exactitude, a de longueur par dedans 5.488 pieds Anglois, qui valent 61.81 pouces du pied de Roi; c'est l'orgyie jufte qui eft de 61.632 pouces; & de largeur 2.218 pieds Anglois, qui font 24.98 pouces du pied de Roi; c'eft le pas fimple, Bêma aploun, qui néanmoins devroit être de 25.682 pouces du pied de Roi. La taille des hommes de moyenne ftature étoit donc, il y a près de quatre mille ans, 61.632 pouces, comme aujourd'hui. Il y a également plus de deux mille ans que la durée de la vie humaine n'a pas changé, puifque au temps de Cambyfes, la durée la plus longue de la vie des Perfes n'étoit que de quatre-vingts ans (Hérod. III, cap. XVII.), & celle des Ethiopiens, qui fe nourriffoient de laitage, de cent ans.

Je ne fais s'il ne faudroit pas rapporter à l'orgyie, la canne (Kanéh), dont il eft parlé dans ce verfet d'Ezéchiel que l'on verra dans l'article fuivant : comme le texte hébraïque porte Kanéh menfuræ fans autre définition, cela me paroît avoir une telle analogie avec orgyie de mefure juste, c'est-à-dire, de mesure naturelle, que j'ai peine à croire que ce ne foit pas la même chofe. Mais on peut encore rapporter cette mesure à la fuivante, comme on va le voir.

On pourroit rectifier d'après cet expofé des mefures anciennes, les proportions des membres du corps humain, que Vitruve (lib. III, cap. I.) établit comme la base de toute la fymmétrie dans la conftruction des édifices facrés ; cet Architecte habile & exact d'ailleurs, a mal compris ici les Anciens dont il allégue l'autorité. Décapode, Acène, Calame, Arundo; en hébreu Kanéh ; en fyrien Selil; en arabe Cafaba, Bab, Canne hachémique. Cette mesure servoit aux Architectes & aux Arpenteurs: elle contenoit d'orgyies doubles 2, de 1 }, de coupas de xylons 2, de pas fimples 42 T