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sentée à Genève le 2 mai 1546, sous ce titre: La Chrestiente malade (v. Galiffe, Nouvelles pages d'histoire exacte, p. 73). Un exemplaire de ce curieux opuscule, malheureusement incomplet (des ff. 27-30, 36-38, 42-43) se trouve à la Bibl. du prot. fr. à Paris. On n'en connaît qu'un exemplaire complet, Bibl. de la ville de Zurich, Gall. XXV, 1009, 5. Les Noelz nouveaulx, pet. in-8° de 22 ff. non ch. sortirent aussi des presses de Pierre de Vingle. Le recueil a vingt-quatre noëls. Malingreest certainement l'auteur de la plupart de ces petits poèmes, car son nom se trouve en acrostiche en plusieurs endroits, particulièrement dans le huitain du titre :

Musiciens amateurs de cantiques,

Au nom de Dieu, chantez Noelz nouveaulx,
Lesquelz sont faictz sur les vieulx et antiques :
Ie vous supply, delaissez les lubriques:
Ne chantez point brayant comme nos veaulx,
Glorieux chantre, ne vault point deux naueaux.
Recordez-vous que Dieu veult lhumble cœur
En foy contrict. Note cela chanteur.

Il faut aussi attribuer à Malingre une sottie de mille sept cents vers de huit syllabes, bien que son nom ne s'y trouve nulle part: La verite cachee, deuant cent ans faicte et composee à six personnages « nouuellement corrigee et augmentee avec les autoritez de la saincte escripture, Verite, Ministre, Peuple, Aucun, Auarice, Simonie, pet. in-8° de 40 ff. non ch. Sans lieu ni date, mais les caractères gothiques sont ceux de P. de Vingle, de Neuchâtel, et l'opuscule doit être de 1533 ou du commencement de 1534, car il en est question lors du procès, à Lyon, de Baudichon de la Maisonneuve, 29 avril 1534. Ce rarissime traité se trouve aussi à la Bibl. du prot. français à Paris, don de M. Valette. Malingre collabora, sous le pseudonyme de Mathieu Gramelin (anagramme de Malingre) à la Bible française d'Olivétan, qui parut à Neuchâtel en 1535. C'est à lui qu'on doit la seconde table dont le titre est : Indice des principales matières contenues en la Bible. La première table avait été rédigée par le célèbre Jean Bonaventure Despériers, qui depuis... Il est probable que l'année précédente Malingre avait composé la table « moult utile pour trouver certains lieux »> qui fut jointe à un N. T. in-folio en gros caractères (version de Le Fèvre d'Etaples) publié par le même imprimeur, P. de Vingle, en 1534. Cette table, l'année suivante fut augmentée et étendue à toute la Bible d'Olivétan. Malingre devint pasteur à Neuchâtel en 1535. Il passa de là à Yverdon au commencement de mars 1536, dès que la Réformation eut été acceptée et la messe abolie dans cette ville, pour achever l'œuvre qui venait d'y être inaugurée par l'influence des Bernois. Le 17 du même mois, il assista avec le ministre de Grandson, Jean Lacombe, à la dispute publique où les commissaires de la puissante république helvétique avaient convoqué tous les prêtres de la ville et des environs. Ceux-ci ayant refusé le combat, les deux «< prescheurs » furent seuls à parler, et le jour même on détruisit les images et les autels. Quelques mois plus tard, Malingre

assista à la fameuse Dispute de Lausanne qui se tint, sur la demande et sous les auspices de Berne, du 1er au 8 octobre 1536. On avait convoqué à cette dispute trois cent trente-sept prêtres, curés et vicaires du pays romand; il ne s'en présenta que cent soixante-quatorze environ; et quatre d'entre eux seulement prirent part à la discussion. Du côté des évangéliques on voyait quatre-vingts ministres; et parmi ceux de langue française qui étaient désignés comme les plus savants, une lettre d'un assistant nomme Calvin et Malingre. Après la victoire des évangéliques, quatorze pasteurs furent désignés pour évangéliser les nouvelles paroisses qui avaient adopté la réformation. Ce fut à Yverdon et en 1542, que Malingre composa un petit poème où se trouvent des détails intéressants sur plusieurs réfugiés français qui habitaient alors le pays romand: Epistre envoyée à Clément Marot, en laquelle est demandée la cause de son département de France, datée du 2 décembre 1542 (cette Epître a été réimprimée à Harlem, 1868). L'année suivante, il résigna ses fonctions, sans quitter Yverdon toutefois. Appelé à Aubonne, en 1546, il occupa ce poste pendant dix ans, et redevint, en 1556, pasteur à Yverdon. Il mourut en 1572, chez son fils, Daniel Malingre, pasteur à Vuarrens. Dans son dizain responsif, du 5 mai 1543, Marot dit à Malingre:

Et plus loin:

... Tu es l'excellence

Et le premier des jacobins de Bloys...

En quoy faisant à saint Paul resemblois
Cent mille fois plus qu'à saint Dominique.

Ses poésies acquirent une grande célébrité. Plusieurs d'entre elles ont été incorporées dans ces chansonniers protestants qui se réimprimèrent pendant tout le cours du seizième siècle et jusqu'à la fin du siècle suivant, à Genève, à Berne, à La Rochelle, à Montbéliard. — Voyez Théophile Dufour, notice dans le Catéchisme fr. de Calvin, Genève, 1878; Herminjard, Corr. des réformateurs, passim; Henri Bordier, Le Chansonnier huguenot, Paris, 1870; Bullet. du prot. fr. passim; Bibl. du prot. fr., place Vendôme, 16, Paris.

CHARLES DARDIER.

MALLET-DU-PAN (Jacques), publiciste genevois, descendant d'un réfugié français du seizième siècle, naquit à Genève en 1749 et mourut à Londres, en 1800. Il fut présenté jeune à Voltaire, et celui-ci le recommanda au landgrave de Hesse-Cassel, qui lui avait demandé un professeur d'histoire et de belles-lettres. Mallet accepta la place, mais son amour de l'indépendance et sa haine de toute contrainte ne lui permirent d'en remplir les fonctions que quelques mois. Il se rendit ensuite en Angleterre et offrit à Linguet sa collaboration aux Annales politiques. Linguet ayant été mis à la Bastille au mois de septermbre 1779, Mallet resta seul chargé de la publication du recueil, qu'il transporta à Genève et auquel il donna bientôt un nouveau titre Mémoires historiques, politiques et littéraires sur l'état présent de l'Europe (1779-1782). Quand Linguet fut remis en liberté (1782), des scrupules relatifs à la propriété du recueil empêchèrent Mallet de le

continuer, et s'étant aliéné tous les partis par un écrit sur la dernière révolution de Genève, il vint à Paris et y fonda, avec le libraire Panckouke, le Journal historique et politique de Genève, qui commença de paraître le premier janvier 1784. En 1788, Panckouke ayant acquis le privilège du Mercure de France, y joignit une partie politique dont il confia la rédaction à Mallet. Celui-ci, partisan de la monarchie constitutionnelle, aurait voulu établir en France le système du gouvernement anglais. Il soutint sa thèse avec talent et force injures à l'adresse de ceux qui ne partageaient pas ses sentiments; aussi se fit-il haïr du parti révolutionnaire. Quand la monarchie fut en danger, Mallet ne songea plus qu'à la sauver, attaqua violemment la révolution, se déchaîna contre les excès des démocrates, et fut chargé par le roi d'une mission de confiance en Allemagne (1792). Il devint dès lors l'agent le plus actif de la diplomatie étrangère contre la république française, et rédigea des mémoires fort importants, qu'il est indispensable de lire si l'on veut bien connaître l'émigration, la coalition, les guerres civiles du temps et les folies de Coblentz. Il fonda en 1798 le Mercure britannique, dans lequel il dit des vérités à tous, même aux incorrigibles émigrés, qui le traitaient de jacobin. Le climat de Londres abrégea les jours de Mallet; il mourut pauvre, estimé de tous ceux qui l'avaient connu. Voir Memoires et correspondance de Mallet-du-Pan, recueillis et mis en ordre par A. Sayous, Paris, 1851, 2 vol. in-8°; Revue des Deux-Mondes du 1er décembre 1851; Journal des Débats, du 22 septembre 1852; Haag, La France protestante, et Sainte-Beuve, Causeries du Lundi.

O. DOUEN.

MALO (Saint). L'Eglise bretonne célèbre sous le nom des sept saints de Bretagne Samson, évêque de Dol et ses six chorévêques ou suffragants Paul de Léon, Tugdual de Tréguier, Corentin de Quimper, Paterne de Vannes, Brieuc et Malo. Saint Malo, honoré à Rouen sous le nom de saint Maclou, appelé aussi Mahout, cousin de Samson et de Magloire, fit sous la direction de saint Brendan en Irlande de fortes et sérieuses études. Il débarqua en 538 dans notre Bretagne près d'Aleth, dans la presqu'île qui porta d'abord le nom du solitaire Aaron, qui l'avait accueilli à son arrivée, et plus tard le sien. Après avoir subi quelques contrariétés de la part du duc Hoel, Malo se concilia la sympathie de tous; les riches rivalisèrent de générosité à son égard, mais aussi le peuple semble manifester dès ces temps reculés sa crainte de voir tous ses héritages passer entre les mains des moines. Exilé en Saintonge, Malo, revenu en 565, ne put résister à son amour de la retraite et, après avoir installé Gurival son successeur, se retira dans sa chère solitude de Saintes, où il mourut à la fin du siècle. L'évêché d'Aleth, qui semble avoir été plutôt un titre d'honneur donné à l'abbé du monastère, fut transféré en 1141 à Saint-Malo, quand Aleth fut tombé à l'humble condition de village. Rouen et Gembloux se sont partagé les reliques de ce saint si populaire, dans la robe duquel les petits oiseaux venaient faire leur nid.Sources: Gallia XIV, 995; Sigebert de Gembloux, Vita S. Macl. apud

Surium, VI, 378; Vie des Saints, Paris, 1715, au 15 novembre; Laborderie, Récits de l'hist. de Br., Nantes, 1864.

MALTE (Ordre de). Bien avant les croisades, la Palestine fut visitée par des pèlerins de tous pays attirés par une pieuse curiosité ou par l'espoir de racheter leurs péchés par un pèlerinage aux lieux saints. La charité chrétienne dut étendre de bonne heure sa sollicitude sur les besoins physiques et spirituels de ces multitudes souvent déshéritées, toujours exposées aux plus graves périls. C'est dans cet esprit que des négociants d'Amalfi bâtirent, dans le courant du onzième. siècle, un monastère à Jérusalem sous l'invocation de saint Jean-l'Aumônier et plus tard de saint Jean-Baptiste. Lors des croisades et après la prise de Jérusalem les moines hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem se transformèrent en un ordre de chevalerie militaire, divisé en trois catégories : les chevaliers, qui devaient prouver leur haute noblesse et qui avaient pour unique mission de porter les armes; les chapelains et servants d'armes qui appartenaient à des familles honorables, et les aspirants chevaliers. Les frères laïques étaient chargés de tous les soins matériels et restaient dans l'ombre, Gérhard Touque, premier grand maître de Saint-Jean, soumit les statuts de l'ordre à Pascal II qui les approuva et enrichit son ordre, grâce aux libéralités du premier roi de Jérusalem, Godefroy de Bouillon. Ce fut son successeur (observons que le titre de grand maître ne parut qu'un peu plus tard). Raymond du Puy, qui établit en 1118 la règle définitive, ajouta aux trois vœux monastiques accoutumés et à la règle de Saint-Augustin l'obligation de combattre sans relâche les infidèles, et partagea les chevaliers en trois classes. Alphonse Ier d'Aragon (1104-1134) accorda à l'ordre de nombreux privilèges et se vit imité dans ses libéralités par l'empereur Frédéric Ier Barberousse. Par sa bulle Christianæ fidei, le pape Anastase IV (1153-54) le plaça sous la protection directe de saint Pierre et reconnut le droit à la sépulture ecclésiastique à tout chevalier, même frappé de l'interdit. Les immenses richesses des hospitaliers amenèrent promptement la décadence et la corruption de leurs membres et de graves discussions intestines avec les autres ordres, en particulier avec celui des templiers. Alexandre III parvint en 1479 à les réconcilier, mais leurs rivalités déplorables n'en exercèrent pas moins une influence décisive sur les destinées éphémères du petit royaume de Jérusalem, Ce qui préserva l'ordre d'une ruine certaine et lui assura plusieurs siècles de gloire, ce fut précisément la perte de ses biens et la lutte pour l'existence, qui réveilla dans son sein l'héroïsme et le zèle pour la défense de la foi, que la prospérité avait manqué éteindre. L'ordre de SaintJean prit une part active à toutes les campagnes du royaume chrétien contre les infidèles; en 1167-1168 ses chevaliers les plus intrépides accompagnèrent, sous les ordres du grand maître, Auger de Balben, le roi Amauri en Egypte, décidèrent le gain de la bataille de Bocca et livrèrent Belbéis au pillage. Quand Saladin eut mis fin au royaume de Jérusalem, en 1188, après la bataille d'Ascalon, les hospitaliers, dont le grand maître avait sollicité vainement les secours

du monde chrétien, se retirèrent à Acre, qui prit d'eux son nom moderne de Saint-Jean-d'Acre. Ils y demeurèrent de 1188 à 1291. Pendant cet intervalle d'un siècle, nous les voyons figurer, en 1212, à la fameuse bataille de Las Navas de Tolosa, en Espagne, frayer à l'armée d'André, roi de Hongrie, un sanglant passage à travers les défilés du mont Thabor et se joindre aux expéditions de saint Louis, après avoir refusé de soutenir, en 1228, l'empereur excommunié Frédéric II d'Allemagne. En 1230, ils prirent d'assaut Ascalon sur les Turcs, mais, défaits en 1247 par le sultan d'Egypte, ils perdirent définitivement Acre en 1291. Accueillis avec bienveillance par Guy de Lusignan, roi de Chypre, ils s'établirent en 1308 dans l'île de Rhodes, dont Foulques de Villaret s'était rendu maître, et s'y maintinrent jusqu'en 1522. En 1321, après une bataille navale en vue de Scio, ils débarquèrent dans cette île et y massacrèrent dix mille Turcs. Puis, en 1346, ils s'emparent de Smyrne (qu'ils reperdront en 1403); ils livrent au pillage Alexandrie et ont à subir, en 1445 et 1463 deux attaques formidables du sultan d'Egypte, qui a voulu venger son échec. En 1480 ils repoussent une nouvelle attaque des Turcs. Mais tous ces faits d'armes ont pâli devant l'admirable résistance de Villiers de l'Isle-Adam qui supporta, avec un héroïsme qui aurait mérité un Homère, un siège de trois années, repoussa victorieusement plusieurs assauts meurtriers et arracha au chevaleresque Soliman, plein d'admiration pour un si grand courage, qui lui avait coûté cent mille hommes, une capitulation honorable. Aujourd'hui encore Rhodes est tout rempli des souvenirs glorieux de cette chevalerie, l'un des grands honneurs de la France chrétienne. Après avoir erré pendant quelques années en Crète et en Italie, les chevaliers reçurent en 1530 l'île de Malte de la munificence de Charles V et changèrent une dernière fois de patrie et de nom. Dès 1557 Soliman attaqua vainement la place. Le 20 mai 1565 une flotte de cent voiles turques parut devant l'île. Dragut périt dès les premiers jours; au bout d'un mois les Turcs n'avaient pris que le fort Saint-Elme. Jean de La Valette répondit au héraut turc qui le sommait de se rendre : <«< Voilà les fossés; c'est là le seul terrain que je puis céder à ton maître. Qu'il le remplisse avec les cadavres de ses janissaires! » Le 11 septembre l'armée turque leva le siège. Jean de La Valette méritait bien, après Villiers de l'Isle-Adam, de répéter la fière devise que l'ordre s'était donnée à la suite de l'échec sanglant des Turcs, devant Rhodes en 1311; Fert, c'est-à-dire : Fortitudo ejus Rhodum Tenuit. Le siège de 1565 fut la dernière page héroïque de l'ordre. En 1798 son dernier grand maître, l'Allemand Hompesch, se laissa jouer par Bonaparte et ouvrit ses portes. En voyant ces fortifications formidables, Caffarelli s'écria: « Il est bien heureux que nous ayons trouvé un portier!» L'ordre nomma grand maître Paul Ier, mais ses destinées étaient finies et, depuis 1800, Malte appartient à l'Angleterre, qui a sur elle les mêmes droits que sur Gibraltar. Au temps de sa splendeur l'ordre possédait sept langues, à savoir celles de Provence, d'Auvergne, de France, de Castille, d'Italie, d'Aragon. La langue

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