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fi fortement à la dévote Dame Proba: Et fi nous faifons notre ame à traiter ainfi familiérement avec Dieu, elle prendra toutes les impreffions de fes divines perfections. Mais remarquez bien que cét exercice n'eft ni difficile ni incompatible avec vos оссираtions: Car il n'y faut que des moments d'attention; & même bien-loin

qu'il détourne ou diminue l'application de l'efprit aux affaires, il la rend & plus efficace & plus douce. Le voya geur qui prend un peu de vin pour fe rafraîchir la bouche, & pour fe réjouir le cœur, ne perd pas fon temps; parce qu'il prend de nouvelles forces, & qu'il ne s'arrefte que pour marcher plus viste, & faire plus de chemin.

L'on a fait pour cet ufage plufieurs recueils d'oraifons jaculatoires, & je les croy tous fort utiles; cependant je ne vous confeille pas de vous y affujettir: Contentez-vous de dire du cœur ou de la bouche, ce que l'amour vous infpirera fur le champ ; & il vous fuggérera tout ce que vous pourrez fou haiter. Il eft vray qu'il y a de certaines paroles pour lesquelles le cœur a un attrait tout particulier, comme celles des

Pleaumes, qui ont tant de feu; ou bien les diverfes invocations du nom de Jefus; ou bien ces traits enflammez de l'amour divin, que nous avons dans le Cantique des Cantiques : J'avoue même que les Cantiques fpirituels peuvent encore fervir à cette intention; pourveû qu'on les chante avec une attention sérieufe.

Appliquez icy l'exemple des perfonnes qui s'aiment d'un amour humain & naturel; tout en eux eft occupé de cet amour, l'efprit, la mémoire, le cœur, & la langue; que de penfées, que de fouvenirs, que de réflexions, que de tranfports, que de louanges, que de proteftations , que d'entretiens & de lettres L'on veut toûjours y penfer, & toûjours en parler, ou en écrire quelque chofe, même fur l'écorce des ar bres que l'on trouve. C'est ainsi que ceux qui font bien pénétrez de l'amour de Dieu ne refpirent que pour luy, & n'afpirent qu'au plaifir de l'aimer; ne fe laff nt jamais de penfer à luy, & d'en parler; & voudroient, s'ils étoient les maîtres des cœurs de tous les hommes, y graver le faint & facré nom de Jefus. Auffi n'y a t-il rien hors d'eux

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qui ne leur fourniffe quelque attrait du divin amour; & qui ne leur annonce les loüanges du leur bien-aimé. Ouy, dit faint Auguftin aprés faint Antoine, tout ce qui eft dans le monde leur en parle à la vérite d'un langage müet, mais fort intelligible à leur efprit; & leur cœur forme de ces paroles, & de ces pensées, les afpirations amoureuses & les douces faillies, qui les élevent en Dieu : En voicy quelques exemples. Saint Grégoire Evêque de Nazianze promenant un jour fur le rivage de la mer, comme il le raconta à fon peuple, confidéra fort à loifir toutes fortes de coquillages, que fes vagues y laiffoient, & que d'autres flots remmenoient avec eux alternativement:Et en même temps il admira aux environs la ftabilité des rochers, contre lefquels la mer venoit battre impétueufement. A cette vûë ik penfa, que c'étoit-là juftement le caratére des ames foibles & fuperficielles qui fe laiffent emporter tantoft à la joye, & tantoft à la trifteffe, cédant indifférem ment aux mouvemens des évenemens di vers de la vie; & le caractère des ames généreuses & conftantes, que rien n'eft capable d'ébranler: Et puis fon cœur profitant de cette pensée,s'éleva à Dieu,

& luy fit dire comme au Prophéte Royal: O Seigneur, fauvez-moy, car les eaux ont pénétré jufques à mon ame: O Seigneur délivrez-moy de cet abyfme; la tempête m'a précipité au fond de la mer. Mais remarquez que cette réflexion & ce fentiment convenoient bien à la fituation de fon ame: Parce qu'il fouffroit avec douleur l'ufurpation que Maxime vouloit faire de fon Evefché.

Saint Fulgence Evêque de Rufpe s'étant trouvé dans Rome à un triomphe de Théodoric Roy des Goths, qui préfida luy-même à une affemblée gé

nérale de toute la nobleffe Romaine fut charmé d'un fpectacle fi magnifique, & s'écria en s'élevant à Dieu: Helas! SiRome toute terreftre qu'elle eft, paroift fi riche & fi brillante, que la Férufalem céleste doit être belle ! Et fi le Maître des biens a laiffé tant de gloire aux amateurs de la vanité, que n'a t-il pas réservé aux contemplateurs éternels de la Vérité !

On dit que faint Anfelme, dont la naiffance a beaucoup honoré nos montagnes, & qui fut Archevêque de Cantorberi, fçavoit admirablement bien cet art de fpiritualiser les pensées les plus communes. Etant en voyage, un

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Liévre pourfuivi par des chaffeurs, vint fe réfugier fous fon cheval; & les chiens faifant un grand bruit tout au tour, n'oférent jamais violer l'immunité de l'azyle: Un fpectacle fi nouveau pour les chaffeurs les fit bien rire; mais le faint Prélat, touché intérieurement de l'Esprit de Dieu, leur dit en gémiffant & en pleurant: Ab vous riez! Mais la pauvre bête n'a pas envie de rire. Penfez bien quel malheur c'est que celuy d'une ame, que les démons ont conduite de dé tours en détours, & de péchez en péchez, jufqu'à l'heure de la mort! Alors terri blement effrayée, elle cherche un azyle; &fi elle n'en trouve pas, fes ennemis luy infultent, & elle devient leur proye étera nelle.

Saint Antoine ayant reçû une lettre fort honorable de Constantin le Grand, & les Religieux qui étoient au-tour de luy, en ayant paru furpris; Quoy, leur dit-il, vous vous étonnez qu'un Roy ècri ve à un homme? Admirez donc l'infinie bonté de Dieu éternel pour des hommes mortels, d'avoir bien voulu leur écrire luy-même fa loy, & leur parler encore par la bouche de fon propre fils.

Saint François ayant appercu une Brébi, toute feule dans un troupeau

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