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a trouvé un, a trouvé un thréfor ; la feûreté de la vie & l'immortalité y font at tachées; & on le trouve quand on a la crainte de Dieu. Il s'agit icy principalement de l'immortalité; en vue de laquelle il faut tâcher d'avoir ce fidelle ami, qui nous conduife dans toutes nos actions par fes confeils, & qui nous faffe marcher avec feûreté, à travers les piéges du malin efprit: Nous aurons en fuy un thréfor de fagefle pour éviter le mal, & pour faire le bien d'une maniére plus parfaite; de confolation pour nous foûlager dans nos afflictions; de force pour nous relever de nos chutes; & de tous les remédes les plus nécessaires à la parfaite guérifon de nos infirmitez fpirituelles.

Mais qui trouvera un tel ami? Le Sage répond,que ce fera celuy qui craint Dieu; c'eft à dire l'humble, qui defire ardemment fon avancement fpirituel. Puis qu'il eft donc fi important, Philothée, d'avoir un bon guide dans les voyes de la dévotion, priez Dieu avec ferveur qu'il vous en donne un, qui foit felon fon cœur: Et ne doutez pas que quand il devroit vous envoyer un Ange, comme au jeune Tobie il ne vous donne un fage & fidelle Conducteur.

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En effet ce doit eftre un Ange pour vous : C'est à dire que quand Dieu vous l'aura donné, vous ne devez plus le confidérer comme un fimple homme. Ne mettez vôtre confiance en luy, que par rapport à Dieu qui vous conduira, & vous inftruira par fon ministére luy mettant dans le cœur & dans la bouche, les fentimens & les paroles néceffaires à vôtre conduite. Ainfi vous le devez écouter comme un Ange defcendu du Ciel, pour vous y conduire. Ajoûtez à la confiance une fidelle fincérité, traitant avec luy à cœur ouvert, & luy découvrant fidellement le bien & le mal qui eft en vous: Le bien en fera plus feûr, & le mal plus court; vôtre ame en fera plus forte dans fes peines, & plus modérée dans fes confolations. Joignez un religieux refpect à la confiance; & dans un fi jufte tempéramment, que la vénération ne diminüe point la confiance, & que la confiance ne faffe rien perdre du refpect: Confiez-vous en luy avec le refpect d'une fille envers fon pere, & refpectez-le avec la confiance d'un fils envers fa mére.En un mot,cette amitié qui doit avoir de la force & de la douceur, doit eftre toute fpirituelle, toute fainte, toute facrée, & toute divine.

Choififfez-en un entre mille,dit Avila; & moy je dis entre dix mille: Car il s'en trouve bien moins qu'on ne penfe, qui foient capables de ce miniftére. Il Y faut de la charité, de la fcience, de la prudence ; & fil'une de ces trois qualitez manque, le choix que l'on fera ne fera pas fans danger. Je vous le dis encore: Demandez un Directeur à Dieu; & quand vous l'aurez trouvé, béniffezen fa divine majefté, tenez-vous à vôtre choix, fans en chercher un autre: Allez à Dieu en toute fimplicité, avec humilité & confiance; car indubitablement vous ferez un trés-heureux voyage.

CHAPITRE V.

Qu'il faut commencer par purifier

L

l'ame.

Es Fleurs, dit l'Epoux facré, commencent à paroître dans nôtre terre: Il est temps d'émonder les arbres, & de les tailler. Quelles font ces fleurs pour nous, ô Philothée, finon les bons défirs? Or dés qu'ils fe font fentir à nôtre. cœur, il faut s'appliquer promptement

àle purifier de toutes les œuvres mortes, & fuperflues. Dans la Loy de Moyfe, une fille étrangère qui vouloit époufer un Ifraëlite, devoit quitter la robe de fa captivité, fe faire rafer les cheveux, & couper fes ongles: Et cela nous apprend, que quand une ame afpire à l'honneur d'eftre l'époufe de Jefus-Chrift, elle doit fe dépouiller du vieil-homme, & fe revêtir du nouveau en quittant le péché ; & puis retrancher de fa vie toutes les fuperfuitez, qui peuvent la détourner de l'amour de Dieu.

Pour guérir l'ame, ainfi que pour guérir le corps,il faut commencer par fe décharger d'un mauvais amas de corrup tion; & c'eft ce que j'appelle purifier le cœur. Cela fe fit en un inftant, & parfaitement dans faint Paul; & cela s'eft encore fait dans fainte Magdeleine, fainte Pélagie, fainte Catherine de Gennes, & quelques autres faints ou faintes: Mais un tel avantage eft un auffi grand miracle, dans l'ordre de la grace, que la réfurrection d'un mort, dans celuy de la nature; & nous ne devons pas y prétendre. La guérifon de l'ame, Philothée comme celle du corps,eft lente,ne s'avance que par dégrcz,peu à peu

avec peine & à loifir; & l'on croit même qu'elle n'en eft que plus feûre: Car vous fçavez ceque dit le vieux Proverbe, que les maladies viennent à cheval & en pofte, & qu'elles s'en vont à pied & au petit pas; jugez ainfi des infirmitez fpirituelles.

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Il faut donc icy, ô Philothée, beaucoup de patience & de courage : Hélas! Que je plains ces perfonnes qui fe voyant fujettes à plufieurs imperfections commencent aprés quelques mois de dévotion à s'inquiéter, & à fe troubler; prêtes qu'elles font de fuccomber à la tentation de tout quitter, pour retourner fur leurs pas Mais une autre extrémité auffi dangereuse, est celle de certaines ames, qui par une tentation contraire, fe croyant dés les prémiers jours affranchies de leurs mau vaifes inclinations; qui penfent eftre parfaites fans avoir prefque rien fait; & qui prenant le grand vol fans avoir d'aî les, s'élèvent à ce qu'il y a de plus fublime dans la dévotion. O Philothée, que la rechûte eft à craindre,pour avoir voulu fe tirer trop tôt des mains du Médecin! Elles devroient bien confidérer les Anges de l'échelle de Jacob, qui ayant des aîles y montoient cependant

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