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par ordre, d'échelon en échelon. Ah! dit le Prophéte Royal, il vous est bien inutile de vous lever avant que le jour foit venu. L'ame qui remonte du péché à la dévotion, eft comparée à l'aube du jour; laquelle en s'elevant, ne diffipe. pas les ténébres en un inftant, mais peu à peu, & d'une maniere imperceptible.

Jamais perfonne n'a mieux pratiqué ce confeil de bien purifier le cœur, que ce faint Pénitent; qui ayant été déja lavé de fon iniquité, demanda néanmoins durant toute fa vie d'en être toûjours lavé de plus en plus. Ainfi cet exercice ne devant & ne pouvant finir qu'avec nôtre vie, ne nous troublons point à la vûë de nos imperfections: Nôtre perfection confifte à les combattre, & d'ailleurs nous ne fçaurions ni les combattre, ni les vaincre, fans les fentir, & fans les connoître ; la victoire même que nous en efpérons, ne confiste pas à ne les point fentir, mais à n'y point confentir.

Au refte ce n'eft pas y confentir, que d'en eftre quelque fois incommodé: Il faut bien dans ce combat fpirituel, que pour l'exercice de nôtre humilité nous nous attendions à en recevoir quelques

fâcheufes atteintes. Cependant nous ne fommes jamais vaincus, que quand nous avons perdu la vie ou le courage: Or les imperfections & les fautes vénielles ne peuvent nous faire perdre cette vie fpirituelle de la grace, que le feul péché mortel nous ravit; & il n'y a rien à craindre, finon de perdre le courage: Mais difons à Dieu comme David: Seigneur, délivrez-moy de l'efprit de lafcbeté & de découragement. C'est donc pour nous une douce & heureuse condition dans cette milice fpirituelle, que de pouvoir toûjours vaincre, pourveuque nous voulions toûjours combattre.

CHAPITRE VI,

Qu'il faut prémiérement purifier l'ame des péchez mortels.

Le premier foin de celuy qui veut E dégagement du péché doit eftre purifier fon cœur: Et c'est ce que l'on fait dans le Sacrement de pénitence. Cherchez le plus digne Confeffeur que vous pourrez trouver; ayez un de ces petits Livres, qui ont été faits pour aider la confcience, dans l'examen

qu'on doit faire de fa vie, comme Gre nade, Bruno, Arias, Auger, ou autres femblables; lifez-le attentivement, & remarquez de point en point, en quoy vous avez offenfé Dieu depuis l'ufage de raifon : Et fi vous vous defiez de vôtre mémoire, écrivez ce que vous avez remarqué. Aprés cette recherche de vos péchez, déteftez-les avec la contrition la plus vive & la plus parfaite que vous pourrez concevoir par la confideration de ces quatre grands motifs: Que par le péché vous avez perdu la grace de Dieu, abandonné vôtre droit fur le Paradis, mérité les peines éternelles de l'enfer, & renoncé à tout l'amour de Dien.

Vous voyez bien, Philothée, que je vous parle d'une Confeffion générale de toute la vie; & je vous avoue en même temps que je ne la croy pas toûjours abfolument néceffaire : Mais confidérant l'utilité qu'elle porte pour ces commencemens, je vous la confeille extrémement. Il arrive fouvent que les confeffions ordinaires des perfonnes qui vont uncertain train de vie commune, font pleines de grands défauts: On ne s'y prépare point, ou fort peu; l'on n'a pas la contrition requife; l'on va fe confeffer avec une fécréte volonté de pécher;

foit

éviter

foit parce que l'on ne veut pas les occafions du péché ; foit parce que l'on n'eft pas difpofé à prendre tous les moyens néceffaires à l'amandement de la vie ; & en tous ces cas-là une Confeffion générale eft néceffaire pour affùrer le falut. Mais outre cela, elle nous donne une parfaite connoiffance de nous-mêmes: Elle nous remplit d'une confufion falutaire à la vûë de tous nos péchez: Elle foulage l'efprit de beaucoup d'inquiétudes: Elle tranquillife la confcience: Elle excite en nous plufieurs bonnes refolutions: Elle nous fait admirer la miféricorde de Dieu, qui nous a attendus avec tant de patience: Elle met nôtre Pére fpirituel en état de nous donner des avis plus convenables : Et elle nous ouvre le cœur pour confeffer nos péchez à l'avenir avec plus de confiance.

Ainfi, Philothée, puis qu'il s'agit du renouvellement entier de vôtre vie, & de la parfaite converfion de vôtre ame à Dieu : C'eft avec raison, ce me femble, que je vous confeille de faire une confeffion générale.

B

CHAPITRE VII.

Qu'il faut encore purifier l'ame de toutes les affections au péché.

T

Ous les Ifraelites fortirent d'Egy pte, mais plufieurs y laifférent leur cœur. Et c'eft ce qui leur fit defirer dans le defert les oignons & les viandes d'Egypte. De même il eft beaucoup de pénitents qui fortent de l'état du péché, & qui n'en quittent pas pour cela l'affection; je m'explique: Ils fe propofent de ne plus pécher; mais c'est avec une certaine répugnance à fe priver des plaifirs du péché: Leur cœur y renonce & s'en éloigne; mais il luy échappe toujours de certains retours, qui le portent de ce côté-là ; à peu prés com me il arriva à la femme de Loth, qui tourna la tête vers Sodome. Ils s'ab ftiennent du péché comme les malades font des melons, vous le fçavez, ils n'en mangent pas, parce qu'ils craignent la mort dont le. Médecin les menace: Mais ils s'inquiétent de cette abftinence; ils en parlent avec chagrin, & doutent de ce qu'ils ont à faire, du moins

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