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trop fufceptible des amitiez humaines: En un mot il n'eft prefque perfonne en qui l'on ne puiffe remarquer une imperfection femblable. Or quoyque ces inclinations foient naturelles, on peut les corriger & les modérer, en tâchant d'acquérir les perfections contraires : L'on peut même s'en défaire abfolument ; & je vous dis, Philothée, que vous devez aller jufque-là. N'at-on pas trouvé l'art de donner de la douceur aux amandiers les plus amers, en les perçant feulement au pied, pour en faire fortir un fuc âpre & rude? Pourquoy donc ne pourrions-nous pas nous décharger de nos inclinations perverfes, n'en retenant que ce qu'elles ont de bon, pour en faire des difpofitions favorables à la pratique de la vertu? Comme il n'y a point de fi bon naturel, que les habitudes vicieuses ne puiffent corrompre; il n'y en a pas non plus de fi méchant, qu'on ne puiffe dompter, & entiérement changer par une conftante application, foutenuë de la grace de Dieu.

Je m'en vais donc vous donner les avis, & vous propofer les exercices, que je juge les plus néceffaires pour dégager votre ame de toutes les mau

vaises affections au péché véniel, de tous les attachemens aux chofes inutiles & dangereufes, & de toutes les imperfections naturelles ; & vôtre ame en fera encore mieux précautionnée contre le péché mortel: Dieu vous faffe la grace de les bien pratiquer.

SECONDE PARTI E. 6 966 996 905 90896 B

DIVERS AVIS

POUR ELEVER L'AME A DIEU

PAR

L'ORAISON

ET PAR L'USAGE

I.

DES SACREMENTS.

CHAPITRE I.

De la néceffité de l'Oraifon.

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UISQUE 'Oraifon fait entrer nôtre efprit dans toute la lumière de la divinité, & tient nôtre volonté exposée aux ardeurs du divin amour: Il n'y a rien qui puiffe mieux diffiper les ténébres, dont l'erreur & l'ignorance ont obfcurci nôtre enten

dement, ni mieux purifier nôtre cœur de toutes nos affections dépravées. C'est l'eau de bénédiction, qui doit nous fervir à laver nos ames de nos iniquitez, à defaltérer nos cœurs preffez

par la foif de nôtre cupidité, & à nourrir les prémiéres racines que la vertu y a jettées, & qui font les bons defirs.

2. Mais je vous confeille principalement l'oraifon de l'efprit & du cœur, & fur tout celle qui eft occupée de la vie & de la paffion de nôtre Seigneur : Car à force de le regarder dans l'exercice de la méditation, toute vôtre ame fe remplira de luy, & vous formerez vôtre conduite intérieure & extérieure fur la fienne. Il eft la lumière du monde: C'est donc en luy, & par luy, & pour luy que nous devons être éclairez. Il est le mystérieux Arbre du defir, dont parle la fainte Epoufe des Cantiques :C'est donc à fes pieds qu'il faut aller refpirer un air plus doux, pour peu que le cœur fe foit laiffé échauffer par l'efprit du fiècle. Il eft la vraye Fontaine de Jacob, cette fource d'eau vive & pure: Il faut donc aller fou vent à luy pour nettoyer l'ame de toutes fes foüilleures. Vous le fçavez, les

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petits enfans entendant parler continuellement leurs méres, & s'efforçant de bégayer avec elles, apprennent à parler la même langue : C'eft de cette forte que nous attachant au Sauveur dans la méditation, & y observant fes paroles, fes actions, ses sentimens, & les inclinations, nous apprendrons avec fa grace à parler comme luy, à agir comme luy, à juger comme luy, & à aimer ce qu'il a aimé. Il s'en faut tenir là, Philothée ; & croyez-moy; nous ne fçaurions aller à Dieu le Pére, que par cette porte, qui eft JesusChrist; ainsi qu'il nous l'a dit luy-même. La glace d'un miroir ne peut arrêter notre vûë, à moins qu'elle ne foit appliquée à un corps opaque comme le plomb, ou l'eftain: De même nous n'aurions jamais pû bien contempler la divinité en cette vie mortelle; elle ne fe fût unic à nôtre humanité dans Jefus-Chrift, dont la vie, la paffion, & la mort, font pour nos méditations l'objet le plus proportionné à la foibleffe de nos lumières, le plus doux à nôtre cœur, & le plus utile au reglement de nos mœurs.

Le Sauveur s'eft appellé le Pain defcendu du Ciel pour bien des raifons;

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