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HISTOIRE

DE LA RÉGÉNÉRATION

DE LA GRÈCE.

LIVRE HUITIÈME.

CHAPITRE PREMIER.

Khourchid tourne ses armes contre Souli.- Prise de Régniassa

par les Turcs. Douleur des Souliotes.

deux de leurs capitaines.

- État de l'armée mahométane.

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Punition de

Affaire du

-Dispositions et plan de défense des Grecs.

29 mai. Ses résultats. Combat du 30.

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Anxiétés des chrétiens.—Affaire du 31; ils perdent leurs positions.-Prise du village de Souli par les Turcs;—ils sont repoussés à Samoniva. Traits particuliers d'audace.-Fidélité admirable d'un vieux Osmanli.-Pertes respectives.-Manière de combattre des parties belligérantes.

Arrivée de Khourchid à l'armée.
Assaut du 7 juin.

et rompues.

Souliotes.

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Combat du 1er juin. —
Négociations entamées
Résolution terrible des

Courage de leurs femmes, qui s'organisent

militairement.

10 juin, reprise des hostilités. 12 juin, victoire des Grecs;-s'emparent du cheval de bataille d'Omer Brionès.—Regrets de celui-ci. — Injures mutuelles des combattants. - Déroute des Turcs. - Osmanlis prisonniers. Retour de Khourchid à Janina. l'archevêque Gabriel. risse.

Son entrevue avec

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Son départ et son arrivée à La

Le ciel avait exaucé les vœux des guerriers de la Selleïde. Rassuré par la promesse que le lord haut commissaire des îles Ioniennes, Thomas Maitland, lui avait donnée d'empêcher les vaisseaux grecs d'approcher des côtes de l'Épire et de l'Acarnanie, Khourchid pacha s'était décidé, conformément aux ordres qu'il avait reçus du sultan, à attaquer Souli avant de se porter contre la Morée; et pour régulariser ses opérations, il résolut de s'emparer de Régniassa

(i).

C'était le point principal de communication des Souliotes avec les Hydriotes; il n'y avait pour le défendre qu'une tour qui renfermait une garnison de cinquante-trois soldats, commandés par les capitaines Costas Timolas et Kitzos, contre lesquels on dirigea un corps de quatre mille hommes, commandés par Achmet Brionès, neveu d'Omer pacha. Il avait ordre d'en finir de gré ou de force avec le poste de Régniassa, c'est-à-dire d'employer, pour en venir à

(1) Régniassa. T. 11, p. 1, 4, 39, 111; t. 1, v, p. 184, 185 de mon Voyage dans la Grèce.

bout, la voie des armes et de la corruption. Avec ce double moyen de succès, Achmet Brionès se mit aus sitôt en campagne; et comme les chrétiens n'étaient pas assez nombreux pour venir à sa rencontre, il les attaqua de prime abord avec deux pièces de campagne qu'il traînait à sa suite. Les assiégés firent bonne contenance; mais après quelques engagements dans les quels il y eut du côté des Turcs douze hommes tués et trente blessés, leur commandant ayant parlé d'argent, les Souliotes, qui n'avaient perdu qu'un seul homme, consentirent à traiter. Ils dictèrent la capitulation. Elle portait qu'ils recevraient quarante mille piastres turques, pour solde de leurs services pendant le siége de Janina, sous les drapeaux d'Ismaël Pachô bey, qui ne les avait pas payés, et qu'ils rentreraient à Souli avec armes et bagages.

Ces conditions furent acceptées. Ils partirent. Ils livrèrent un poste qu'ils avaient juré de défendre jusqu'à la mort, sans que les tombeaux de ces femmes généreuses, qui s'ensevelirent sous les ruines de la tour de Régniassa en 1802 (1), pour se dérober à l'ignominie de tomber au pouvoir des Turcs, réveillassent en eux aucun sentiment de gloire.

Ω ΜΕΓΑ ΠΕΝΘΟΣ ΣΕΛΛΑΙΩΝ, Ω ΓΗΣ ΑΠΕΙPOTAN! 6 douleur des Souliotes! o terre d'Épire! s'écria le polémarque Nothi Botzaris, en recevant la lettre qui lui donnait avis d'une pareille transaction. Il fait défendre à la garnison de Régniassa, qui se

(1) Voy. liv. 1, ch. v de cette histoire.

trouvait au pont de l'Achéron, de monter à SainteVénérande. Il envoie en même temps un détachement de palicares pour la désarmer; Costas Timolas et Kitzos sont mis aux fers, et leurs maisons sont peintes extérieurement en noir depuis les combles jusqu'aux fondements, en signe de deuil. Leurs femmes s'arrachent les cheveux en demandant le divorce. Comment, disaient-elles, nous présenter à l'avenir devant nos compagnes? Dequel front pourrions-nous soutenir leurs regards? Qui d'entre nous oserait désormais aller aux citernes, où nous ne serions admises qu'avec dédain à puiser de l'eau (1)? Assises aux derniers rangs dans les églises du Seigneur, comme des lépreuses et des excommuniées, qui nous donnera le salut de paix?

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Malheureux! s'écriaient les pères des Souliotes capitulés, nous avons trop vécu. Emportées par leurs transports, quelques mères, tant leur douleur était véhémente, ne craignirent pas de découvrir à leurs lâches enfants le sein qui les avait engendrés. Opprobre de ma vieillesse, si tu pouvais rentrer dans ces flancs qui t'ont porté, s'écria une d'elles, je te pardonnerais, dans l'espoir qu'en te donnant une seconde fois la vie, tu renaîtrais peut-être à l'hon

(1) L'usage voulait que les femmes des Souliotes qui s'étaient déshonorés par quelque acte de lâcheté, ne fussent admises que les dernières à puiser de l'eau aux fontaines publiques, et elles devaient céder partout le pas aux épouses des braves.

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