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CHAPITRE V.

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État de la Grèce comparé à celui où elle se trouvait au temps de Mardonius. - Anarchie des stratarques du Péloponèse. Retraite de Mavrocordatos. - Il passe à Hydra. -- Indignation des habitants de l'Archipel contre les Péloponésiens. - Mavrocordatos engage les Hydriotes à secourir l'Étolie. -Politique adroite de Moustaï pacha. Il séduit et trompe un grand nombre de Grecs. Sa sévérité envers quelques pillards. L'île d'Eubée est ravagée par Sélim pacha. — Fuite d'une partie de ses habitants. - Changement subit de conduite de Moustaï pacha.-Ses conséquences. Réunion du gouvernement hellénique à Salamine.-Mesures diverses qu'il adopte.-J. Coletti nommé éparque de l'Eubée, se rend dans cette île.-Précautions prises par Marc Botzaris pour défendre Missolonghi. Arrivée de l'éparque Constantin Métaxas dans cette ville. Nouvelles consolantes que reçoit Marc Botzaris. État malheureux des Grecs

bannis des provinces russes.

le canton d'Agrapha.

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— Hospitalité qu'ils reçoivent

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en Allemagne et en Suisse. Moustaï pacha pénètre dans Désordres commis par son armée. Lettre de Marc Botzaris à l'archevêque Ignace. Combats partiels de Stournaris, Zongos et Makrys contre les Turcs. Forces de l'armée ottomane.

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- Arrivée de Marc

Botzaris avec les Souliotes devant l'ennemi. Discours qu'il adresse à ses soldats. — Attaque nocturne qu'il médite et qu'il exécute. - Massacre qu'il fait des pachas Sépher, Hagos Bessiaris, et d'une foule de mahométans. Blessure mortelle qu'il reçoit. — Consolations qu'il donne à ses amis. Il leur recommande sa famille, relève leur courage.

-Défaite des Turcs. - Dernières paroles de Marc Botzaris. Sa mort. Son corps est transporté à Missolonghi. Honneurs funèbres qu'on lui décerne. Regrets du peuple et de l'armée grecque.

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HERODOTE rapporte (1) que l'armée perse ayant atteint la Béotie, les Thébains conseillèrent à Mardonius de s'arrêter dans un point d'où il pourrait soumettre la Hellade sans courir les hasards d'un combat. « Si vous suivez notre conseil, lui disaientils, vous vous rendrez sans peine maître de toutes «< leurs délibérations. Bornez-vous à envoyer de l'ar« gent aux hommes influents dans les différentes vil«<les; vous semerez ainsi la division dans la Grèce, <«<et ensuite à l'aide de ce moyen, vous viendrez « facilement à bout de ceux qui n'auront pas voulu << s'entendre avec vous. »

Ce moyen, comme on l'a vu dans un des livres précédents de cette histoire, avait été mis en usage, non à la demande des Béotiens, mais des agents de la police Britannique, qui avait séduit plusieurs chefs Étoliens, quand Omer Brionès vint établir le siége devant Missolonghi, au mois d'octobre 1822. Depuis ce temps des divisions, plus dangereuses que l'or de Mardonius ne l'avait été pour leurs aïeux, divisaient les modernes Hellènes. Les ennemis de

· (1) Calliope, c. 11.

Mavrocordatos, non contents de l'attaquer par des libelles diffamatoires, en étaient venus au point d'attenter à ses jours, quand le sénat législatif et le peuple, dont il était chéri, lui conseillèrent de se condamner à un ostracisme volontaire, en se retirant à Hydra.

Il céda; et, tel que Phocion, avec lequel il avait déja plus d'un trait de ressemblance, il entrevit dans son éloignement un nouveau moyen de servir sa patrie. Mais avant de quitter Tripolitza, Mavrocordatos conseilla au corps législatif de se rendre à Salamine, où, réuni au président du pouvoir exécutif, il pourrait contribuer aux moyens de salut public que nécessitaient les évènements qui agitaient la Grèce orientale. On consentit à suivre son avis; et, comme il eut encore la satisfaction de voir qu'on mettait à la disposition du ministre de la marine une somme de deux cent mille piastres, il espéra que cet acheminement à un retour vers l'ordre lui donnerait le moyen de calmer l'amirauté d'Hydra, qui était en rupture ouverte avec le gouvernement hellénique.

Les habitants des Cyclades, indignés de savoir les escadres grecques amarrées dans leurs ports sans tenir la mer, faute d'argent pour payer leurs équipages, avaient envoyé leurs contributions à Hydra, à Spetzia et à Psara; et les navarques, dans un conseil tenu à Métochi, persuadés de l'urgence du danger, n'eurent pas plus tôt entendu Mavrocordatos, qu'ils résolurent d'équiper une escadre pour secourir Missolonghi, place regardée comme le boulevard du Péloponèse,

du côté de l'Étolie. C'était le meilleur moyen de faire cesser l'anarchie qui désolait la presqu'île. On pouvait espérer qu'en apprenant ces préparatifs, les Arcadiens qui venaient de prendre les armes contre la faction de Colocotroni et des Deli -Ianéi, Zaïmis et Lando, qu'on savait retirés dans l'Achaïe, formeraient aussitôt un faisceau pour combattre l'ennemi commun, et que les deux pouvoirs réunis à Salamine ne trouvant plus que quatre cents hommes réunis à l'isthme, le danger forcerait un chacun à faire franchement son devoir, sauf à se déchirer quand on n'aurait plus les Turcs sur les bras.

L'ennemi était aux portes. Le moderne Mardonius, Moustaï pacha, guidé par les conseils de ceux qui avaient empêché les Monténégrins d'opérer une diversion en faveur des Grecs, était à peine arrivé à Tricala qu'il s'était empressé de ratifier le traité conclu entre le visir de Larisse, Stournaris et Cara Hyscos, pour la neutralité respective d'Agrapha et de la Thessalie. Non content d'adopter cette mesure politique, le jeune visir qui unissait une prudence qu'on était loin d'attendre de sa part à une extrême affabilité, s'était appliqué à rassurer les esprits au point qu'une partie des villages d'Agrapha, instruits des dissensions qui déchiraient le Péloponèse, avaient consenti à déposer les armes. Accordant sûreté et amnistie, et faisant remise des impôts, la renommée de sa justice qui volait de bouche en bouche avait attiré jusqu'à son quartier un grand nombre d'Armatolis plus contents de servir sous ses

drapeaux que sous ceux de chefs avides dont ils n'avaient qu'à se plaindre. Enfin, Moustaï pacha ayant fait pendre un de ses propres beys, ainsi que les Guègues qu'il commandait, parce qu'ils avaient pillé un village grec, cet acte de sévérité lui aurait gagné tous les cœurs s'il n'avait pas été dans sa destinée de rentrer dans la voie de l'iniquité, pour complaire aux fanatiques dont il était entouré.

Elle se dévoilait, cette iniquité, à l'extrémité orientale de la Thessalie par les œuvres du sérasker Sélim et du visir de Nègrepont. Ces chefs, informés de ce qui se passait au camp de Moustaï pacha, rappelant subitement les troupes qu'ils avaient portées dans la Béotie, étaient rentrés dans l'Eubée, qui se trouvait momentanément dégarnie de ses meilleurs soldats. Traversant cette île dans tous les sens, ils y avaient égorgé trois mille femmes ou enfants, et répandu une telle épouvante, que les habitants qui n'avaient pu gagner les montagnes s'étaient réfugiés à Skiathos, à Scopélos, et jusqu'à Ténos, où la peste avait entièrement cessé ses ravages. L'intention des Turcs, par cette mesure d'extermination, était de ne laisser aucun ennemi sur leurs flancs, avant de pénétrer dans l'Attique, qui était défendue par le capitaine Hervé Gouras.

Moustaï pacha, apprenant bientôt les évènements de l'Eubée, résolut, à l'exemple de ses collègues, de purger le Pinde des bandes dont l'attitude pouvait compromettre le succès de ses opérations. Élevant d'abord des difficultés contre la teneur de l'armistice

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