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M. Ulbach a vu dans ce fait une atteinte à ses droits d'auteur et une dépréciation d'autant plus fâcheuse pour son œuvre qu'elle émanait de l'éditeur lui-même, c'est-à-dire de la personne qui, suivant lui, aurait dû le mieux défendre ses intérêts. Il a donc assigné M. Charpentier à fin de résiliation de son traité et de suppression de la note mise à la suite de la préface. M. Ulbach demandait en outre l'autorisation de racheter les exemplaires vendus, le payement de dommages-intérêts, et l'insertion du jugement dans cinq journaux à son choix.

Le tribunal, après avoir entendu M EMMANUEL ARAGO, avocat de M. Ulbach, et Me WALKER, agréé de M. Charpentier, a fait droit aux principaux chefs de la demande par le jugement suivant (29 novembre):

«En ce qui touche la résiliation du traité du 15 mars 1860 : << Attendu qu'à l'exception du roman intitulé Françoise, les ouvrages qui font l'objet du traité dont s'agit n'ont donné lieu à aucune discussion entre les parties; que ces ouvrages ne forment point un tout dont la publication soit nécessairement liée, d'où il suit qu'il n'y a pas lieu de faire droit à ce chef de demande;

«En ce qui touche la suppression de la note de Charpentier : Attendu que Charpentier est l'éditeur du roman d'Ulbach intitulé Françoise; qu'à la suite de la préface de ce roman, Charpentier a publié une note prétendue rectificative de certaines assertions contenues dans ladite préface; que cette note n'a pas été communiquée à Ulbach;

<< Attendu qu'en acceptant la préface de l'auteur, Charpentier a épuisé tous ses droits d'éditeur; qu'il ne saurait faire à l'œuvre de l'auteur aucune addition; qu'il s'ensuit que, sans qu'il soit nécessaire d'examiner le but de la note dont il s'agit, non plus que les termes dans lesquels elle est conçue, il y a lieu d'en ordonner la suppression;

«En ce qui touche le rachat des exemplaires vendus et la réclamation de 50 fr. par chaque contravention constatée :

<< Attendu que de ce qui précède il ressort qu'il y a intérêt pour Ulbach que les exemplaires vendus soient retirés de la circulation, que ce retrait satisfera aux conclusions de ce chef de demande, et qu'il y a lieu de l'ordonner;

« En ce qui touche les dommages-intérêts :

« Attendu que l'insertion de la note de Charpentier dans l'ouvrage d'Ulbach a causé à celui-ci un préjudice dont la réparation lui est due; que le tribunal possède des éléments suf

fisants d'appréciation à ce sujet, et qu'il n'y a pas lieu d'ordonner en outre des insertions dans les journaux :

Par ces motifs,

« Déclare Ulbach non recevable en sa demande en résiliation du traité du 15 mars 1860;

• Ordonne la suppression de la note insérée par Charpentier à la suite de la préface d'Ulbach;

• Ordonne que les exemplaires vendus seront rachetés par Ulbach aux frais de Charpentier;

⚫ Condamne ce dernier au payement de 500 fr. à titre de dommages-intérêts, et en outre aux dépens. »

Un auteur peut-il distribuer ou faire distribuer ses propres ouvrages sans tomber dans l'exercice illicite de la profession de colporteur? Sur cette question, la jurisprudence tendait à se fixer de manière à créer à quiconque se fait imprimer bien des ennuis. Le seul fait de remettre ou faire remettre à ses amis un livre, une brochure, était assimilé par les divers tribunaux correctionnels à un délit contre la loi relative au colportage et entraînait les mêmes peines. Un arrêt plus conforme à l'équité, au bon sens et à la nature des choses a été rendu par la Cour impériale de Rennes, dans son audience du 7 septembre. Elle a jugé que l'article 6 de la loi du 27 juillet 1849, qui oblige les distributeurs ou colporteurs d'écrits à se munir d'une autorisation préalable, ne s'applique qu'aux distributeurs ou colporteurs de profession.

Voici le texte de cet arrêt, dont les considérants sont rédigés avec une netteté et une précision remarquables:

« La Cour,

< Considérant qu'il résulte du texte et de l'esprit de l'article 6 de la loi du 27 juillet 1849 que cet article n'a d'autre objet que de remédier aux abus du colportage en obligeant les distributeurs ou colporteurs d'écrits à se pourvoir d'une autorisation préalable pour exercer leur industrie; qu'il suffit de lire la discussion qui a précédé cette loi, de se reporter aux circonstances dans lesquelles elle a été rendue et de se rappeler l'intention hautement manifestée par ceux qui l'on présentée,

pour se convaincre que l'Assemblée législative, qui l'a votée. n'a jamais eu la pensée d'interdire aux citoyens la faculté de distribuer eux-mêmes les écrits qu'ils ont le droit de publier, ni de classer dans la catégorie des distributeurs ou colporteurs assujettis à l'autorisation préalable l'individu qui accidentellement distribue un écrit;

« Considérant que Guibouin n'est ni un distributeur ni un colporteur dans le sens de la loi de 1849, mais un simple cultivateur que Merson, dont il est le fermier, a chargé de distribuer un certain nombre d'exemplaires de son écrit; que cet acte unique et isolé de distribution ne constitue pas de sa part le délit prévu par l'article 6 de la loi du 27 juillet 1849, d'où il suit que c'est à tort que les premiers juges lui ont fait application de cet article ;

« Réforme le jugement dont est appel, et décharge Guibouin des condamnations prononcées contre lui. »

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Produit annuel des théâtres de Paris.

Voici, d'après la Revue et Gazette des Theatres, le relevé par mois des recettes brutes des divers théâtres, concerts et autres établissements publics de plaisir soumis à la perception du droit des indigents :

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Les théâtres proprement dits entrent pour la plus grande partie dans ces chiffres de produits; car voici, par l'exemple d'un mois, le mois de décembre, dans quelles proportions les recettes se répartissent entre les divers établissements soumis au droit des pauvres :

Théâtres impériaux......
Théâtres secondaires.....
Cafés, spectacles, concerts, bals.
Curiosités diverses...

553 858 f. 35

989 366 17

193 988 DD

5 862 50

1 743 075 02

En comparant les chiffres qui précèdent aux chiffres des recettes de l'année 1861, qui s'élevaient à 16 622 739 fr. 32 c., on trouve en faveur de l'année 1862 une différence de 777 912 fr. 80 c.

FIN.

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