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PARIS

TYPOGRAPHIE GEORGES CHAMEROT

19. RUE DES SAINTS-PÈRES, 19

DE

L'ENSEIGNEMENT

PUBLIÉE

Par la Société de l'Enseignement supérieur

COMITÉ DE RÉDACTION

M. BERTHELOT, Membre de l'Institut, Sénateur,
Président de la Société.

M. E. LAVISSE, Professeur à la Faculté
des Lettres de Paris, Secrétaire général de la
Société.

M. L. PETIT DE JULLEVILLE, Directeur
d'études pour les Lettres et la philologie à la
Faculté des Lettres de Paris, Secrétaire géné-
ral adjoint.

M. ARMAND COLIN, éditeur.

M. BEAUSSIRE, Membre de l'Institut.

M. G. BOISSIER, de l'Académie française,
Professeur au Collège de France.

M. BOUTMY, de l'Institut, directeur de l'École
libre des Sciences politiques.

M. BREAL, Membre de l'Institut.

M. BUFNOIR, Professeur à la Faculté de
Droit de Paris.

M. DASTRE, Professeur à la Faculté des
Sciences de Paris.

M. FUSTEL DE COULANGES, de l'Institut,
Professeur à la Faculté des Lettres de
Paris.

M. GAZIER, Maitre de Conférences à la
Faculté des Lettres de Paris.

M. P. JANET, Membre de l'Institut, Profes-
seur à la Faculté des Lettres de Paris.

M. LEON LEFORT, Professeur à la Faculté
de Médecine de Paris.

M. LYON-CAEN, Professeur à la Faculté de
Droit de Paris.

M. MARION, Professeur à la Faculté des
Lettres de Paris.

M. MONOD, Directeur-adjoint à l'École des
Hautes-Études.

M. PASTEUR, de l'Académie française.
M. TAINE, de l'Académie française.

REDACTEUR EN CHEF

M. EDMOND DREYFUS-BRISAC

TOME QUINZIÈME

Janvier à Juin 1888

PARIS

ARMAND COLIN ET Cie, ÉDITEURS

1, 3, 5, RUE DE MÉZIÈRES

1888

DE

L'ENSEIGNEMENT

LA VIE ET LES TRAVAUX

DE M. EUGENE BENOIST

MEMBRE DE L'INSTITUT, PROFESSEUR A LA FACULTÉ DES LETTRES

L'enseignement du latin à la Faculté des lettres de Paris a subi l'année dernière une perte cruelle. Le 23 mai 1887, les collègues et les amis de M. Benoist, titulaire de la chaire de poésie latine, lui rendaient les derniers devoirs. Bien qu'une maladie douloureuse l'eût forcé depuis quelque temps à suspendre son cours, ses auditeurs ne l'ont pas oublié. Ils se rappellent ces leçons si précises et si pleines de choses où il apportait les résultats d'un travail obstiné, cette parole forte et sincère qui n'éprouvait qu'un embarras, celui de choisir entre les matériaux accumulés. M. Benoist se donnait à eux tout entier, sans réserve et sans ménagements; il exposait ses idées avec chaleur et les défendait avec ténacité, sans crainte de heurter les opinions contraires, parce que ses convictions étaient le fruit d'un long et laborieux effort, et qu'elles devenaient une partie de sa nature même. Aussi voulait-il qu'on accordât au genre d'études dont il s'occupait l'honneur et la place qu'elles méritent. Sévère pour lui-même, il ne souffrait point chez les autres la légèreté et l'ignorance; s'il rudoyait parfois aux examens les candidats hasardeux et mal préparés, c'est qu'il avait une grande idée de ses devoirs; les travailleurs sérieux ont toujours trouvé chez lui un appui efficace et sûr. On savait en outre avec quelle énergie, avec quelle honnêteté il

REVUE DE L'ENSEIGNEMENT.

XV.

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avait toujours accepté toutes les charges de la vie, et ces qualités morales l'avaient mis en haute estime.

Mais ce n'est point à l'homme, c'est surtout au savant et au professeur que cette notice doit être consacrée. La confiance de sa famille, qui a bien voulu mettre à ma disposition tous ses papiers, me rend la tâche relativement facile; j'ai parcouru avec émotion sa correspondance scientifique avec les savants de notre pays et des pays étrangers et ces monceaux de notes jetées souvent d'une main fébrile sur des papiers de rencontre, témoins fidèles qui retracent année par année le travail constant, les longues veilles d'une existence bien remplie.

M. Eugène Benoist est né le 28 novembre 1831 à Nangis (Seineet-Marne). Son grand-père avait été tambour dans les armées de la République. Son père, d'abord huissier, puis notaire à Thomery, était, à la suite d'héritages, devenu l'un des gros propriétaires de la commune des Sablons, près de Moret-sur-Loing, dont il fut nommé maire. Il avait là une grande maison qui fut vendue depuis. M. Benoist, qui allait souvent passer ses vacances tout auprès, espérait dans ces derniers temps la racheter avec le prix de ses ouvrages en train; la mort ne lui a pas permis de réaliser ce désir.

Son père tenait avant tout à ce qu'il reçût une excellente instruction. Il fut mis d'abord au collège de Fontainebleau, puis à l'institution Jauffret et au collège Charlemagne; il a formé là quelques amitiés qui l'ont suivi toute sa vie, et connu About et Sarcey, qui venaient passer leurs vacances aux Sablons, l'abbé Thénon, le docteur Fournier, Goumy, Georges Perrot. En 1848 il était en quatrième, quand des revers de fortune atteignirent sa famille; on allait être obligé de le retirer du lycée, lorsqu'à la fin de l'année il obtint le premier prix de thème grec au concours général (1), ce qui lui valut une bourse à Jauffret. Il put donc achever tranquillement ses études et remporta de nombreux succès, surtout en histoire. Il fit sa rhétorique avec des professeurs célèbres, MM. Berger et Lemaire, pour qui il conserva toujours un souvenir reconnaissant, et, après quelques incertitudes car il eut un moment l'idée de se diriger vers Saint-Cyr-il se décida pour l'École normale, où il fut reçu en 1852 le quatrième, après MM. Perrot, Goumy et Bréal.

Licencié en 1854, il fut envoyé en 1855 au lycée de Marseille, où il professa d'abord les classes de grammaire, puis la seconde. Après le stage obligé, il passa en 1859 son agrégation des lettres,

(1) M. Benoist a obtenu au concours général deux prix et neuf accessits.

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