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Musique chinoise.

Musique notée, inconnue à la Chine.

fixe la première ou principale poutre ; 5o lorsqu'on pose la première porte; 6o lorsqu'on met l'avant-toit; 7° lorsqu'on place les inscriptions; 8° enfin, lorsque le bâtiment est entièrement achevé. Alors on remercie les esprits et sur-tout celui de la terre. Le nombre des musiciens, qui concourent à chacune de ces cérémonies, est ordinairement fixé à dix.

Les Chinois ne connoissent point l'usage de nos notes de musique; ils n'ont point ces signes variés qui marquent la différence des tons, les diverses élévations ou les abaissements gradués de la voix; rien, en un mot, qui indique toutes ces modifications du son, d'où résulte l'harmonie. Ils ont seulement quelques caractères pour désigner les tons principaux : tous les airs qu'ils ont appris, ils les répètent par routine. Aussi l'empereur Kan-hi fut-il singulièrement étonné de la facilité avec laquelle un Européen peut saisir et retenir un air, dès la première fois qu'il l'entend. En 1679, il fit appeler au palais les PP. Grimaldi et Péreira, pour toucher un orgue et un clavecin qu'ils lui avoient autrefois présentés. Il parut goûter la musique d'Europe et l'entendre avec plaisir. Il ordonna ensuite à ses musiciens de jouer un air chinois.

Le P. Péreira prit ses tablettes, et y nota l'air Musique chitout entier, pendant que les musiciens l'exé- noise." cutoient. Lorsqu'ils eurent fini, le missionnaire répéta l'air sans omettre un seul ton, et avec autant d'aisance que s'il eût passé beaucoup de temps à l'étudier. L'empereur fut si frappé d'étonnement, qu'il avoit peine à croire ce dont il étoit témoin. Il ne pouvoit comprendre comment un étranger avoit pu retenir si tôt un morceau de musique qui avoit coûté tant de travail et de temps à ses musiciens, et que, par le secours de quelques caractères, il se le fût tellement approprié qu'il ne pouvoit plus l'oublier. Il combla d'éloges la musique européenne, et admira les méthodes qu'elle fournit pour faciliter et abréger le travail de la mémoire. Cependant un reste d'incrédulité lui fit désirer de multiplier les épreuves. Il chanta lui-même plusieurs airs différents, que le missionnaire notoit à mesure, et qu'il répéta aussi tôt avec la dernière précision. Il faut avouer, s'écria l'empereur, que la musique d'Europe a des ressources incomparables, et que ce père (le P. Péreira) n'a pas son semblable dans tout l'empire.

Mais quoique ce prince, peut-être par complaisance ou par une suite de sa prédilection

Musique d'Europe, peu goûtés des Chinois.

noise,

Musique chi- pour les arts de l'Europe, ait paru applaudir à notre musique, il n'en est pas moins vrai qu'elle n'est nullement goûtée des Chinois. Le P. Amiot, qui étoit bon musicien, qui savoit jouer de la flûte-traversière et toucher le clavecin, avoue ingénuement qu'ayant voulu plusieurs fois exécuter sur ces instruments les pièces les plus brillantes de nos meilleurs compositeurs, en présence des seigneurs de la cour qui passoient pour connoisseurs et amateurs de musique,il ne tarda pas, malgré tout le soin qu'il mit dans son jeu, de remarquer que ces airs, si mélodieux pour nous, ne produisoient sur ses auditeurs aucune impression de plaisir. Il ne voyoit autour de lui que des physionomies froides et distraites. Un d'eux, interrogé sur ce qu'il pensoit de cette musique, répondit poliment que nos airs n'étant point faits pour leurs oreilles, ni leurs oreilles pour nos airs, il n'étoit point surprenant qu'ils n'en sentissent pas toutes les beautés. Les Européens en disent autant de la musique chinoise, qui ne parle pas plus à leurs sens, et ne leur fait entendre qu'un vain bruit. Chaque peuple a non-seulement sa manière de vivre et de s'habiller, mais encore celle de sentir: les Suisses ne préfèrentpas leur ranc des vaches à toute la mélodie

ils

de la musique italienne? Et nous-mêmes, • Musique chicombien de temps a-t-il fallu pour nous ac- noise. coutumer à goûter celle-ci, née si près de

nous ?

CHAPITRE II.

Architecture de la Chine.

se

de l'ar

La nation chinoise est trop ancienne, trop Architecture religieusement attachée à ses antiques usages, de la Chine. pour que son architecture ne se ressente pas Caracture chinoide celle des premiers âges. Aussi l'œil observateur y reconnoît l'empreinte de la haute antiquité. Comme dans les anciens monuments de l'Egypte, on y retrouve le goût pour la forme pyramidale et l'emploi fréquent des colonnes, uniquement destinées à servir de points d'appui. Si cet art n'a pas atteint, à la Chine, le degré de perfection auquel il est parvenu chez les Grecs et les Romains, on ne peut du moins s'empêcher de remarquer, dans l'ordonnance et les proportions des édifices chinois, de grandes beautés de détails, quelquefois même des hardiesses, et toujours une grandeur qui étonne. Les maisons impériales sont de véritables palais; et

Architecture par l'immensité, la symétrie, l'élévation et la de la Chine. magnificence des bâtiments qui les composent, elles annoncent la grandeur du maître qui les habite. Le Louvre seroit au large dans une seule des nombreuses cours du palais de Pé-kin. Tous les missionnaires, qui ont pénétré dans cette vaste et superbe demeure, conviennent que si chacune de ses parties, prise isolément, ne plaît pas autant à la vue que les morceaux de la grande architecture européenne, leur ensemble leur a du moins offert un spectacle nouveau et imposant, auquel rien de ce qu'ils avoient vu jusqu'alors ne les avoit préparés.

L'architecture chinoise n'a aucun rapport avec celle de l'Europe. Placée sous un ciel différent, elle a dû suivre d'autres lois, en se modifiant selon les besoins du climat et les qualités physiques du sol. Sa pratique n'est point livrée à une routine aveugle; elle a aussi ses principes, ses règles, ses proportions. Dès qu'une colonne a deux pieds de diamètre à sa base, disent les architectes chinois, il faut qu'elle en ait quatorze de hauteur; et d'après l'une ou l'autre de ces mesures, on peut déterminer celles de toutes les parties du bâtiment. Cette colonne, qui n'a en hauteur que

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